Il y a trop de consanguinité dans l’IA, et ça commence à se voir même si personne n’en parlait beaucoup jusque-là. A la montagne, d’où je vous écris, on connaît bien le sujet. Eh oui, quand on habitait au fin fond d’une vallée enneigée, éloignée, ou les deux, il fallait bien se débrouiller pour fonder une famille avec ce qu’on avait sous la main. Souvent un cousin ou une cousine, puisqu’à l’époque, je vous rappelle que le Parisien, l’Anglois ou le Russe se faisait beaucoup plus rare que maintenant dans ces contrées. Le développement des hameaux de cousins-cousines n’a pas fait que du bien. Avec l’IA, c’est aussi une histoire de consanguinité et de vallée. De Silicon Valley.
J’ai déjà parlé du problème du vase un peu trop clos de l’écosystème, donc je ne reviens pas dessus en détail (lire ici ce papier de Tommy qui résume la situation). Le plus gros souci, c’est que les centaines de milliards qui rentrent d’un côté de la machine infernale sont consommés dans le processus et que pas grand-chose ne sort de l’autre côté. C’est peut-être juste une question de temps.
Ça, c’est exactement le pari des investisseurs qui balancent des pelletées de dollars dans la chaudière. Si rien n’en sort jamais, ou trop tard, ou trop peu, ça devient un problème. C’est l’une des principales raisons de la montée du doute cette semaine. Bon, n’exagérons pas trop : c’est encore l’ombre d’un doute. Si on commence à paniquer parce qu’un indice a perdu 0,5% après sept séances de hausse consécutives, il faut faire contrôler sa tension. Mais la question est en train de devenir mainstream, alors qu’elle se cantonnait jusqu’ici aux cercles des prophètes grincheux.
Oracle a apporté sa pierre à l’édifice hier. Indirectement et à son corps défendant. C’est le média poil à gratter de la Silicon Valley, The Information, qui a mis sur la place publique un chiffre tiré de documents internes du groupe de Larry Ellison. Le 10 septembre dernier, l’action Oracle avait flambé de 36% en une seule séance au motif que sa petite division cloud avait vu son chiffre d’affaires s’envoler et qu’elle allait continuer à croître à un rythme effréné jusqu’en 2030. Ça marquait l’entrée symbolique d’Oracle dans la confrérie des stars de l’IA, alors que le marché ne l’avait pas trop vu venir. Or The Information révèle que les 900 millions de dollars de chiffre d’affaires issus de l’activité IA de la société au cours du dernier trimestre n’ont généré que 14% de marge brute. La moyenne des autres activités d’Oracle tournant à 70%, la publication en conclut assez mécaniquement que les marges vont baisser à l’avenir. Les revenus, c’est bien, mais les bénéfices, c’est mieux.
Cela pose évidemment la question du modèle économique. Les sénateurs de l’informatique ont passé des années à bâtir des marges de cochon en optimisant leurs solutions et en démultipliant le rendement de leurs investissements. Mais depuis l’irruption de l’IA, ils doivent investir à nouveau massivement, ce qui bouleverse leurs équilibres. Microsoft est un excellent exemple. Les CAPEX du groupe, c’est-à-dire les dépenses d’investissement capitalisées dans le bilan, représentaient moins de 15 milliards de dollars par an jusqu’en 2019. Sur le dernier exercice, la facture est montée à 64,5 milliards. Elle devrait atteindre 89,5 milliards de dollars cette année, et dépasser 90 milliards sur les deux suivantes.
Le pari, c’est que ces dépenses sont nécessaires pour maintenir les positions de leaders de ces entreprises, et qu’elles permettront d’assurer leur prochain cycle de domination et de marges élevées. Comme évoqué plus haut, c’est le temps qui va faire la différence. Est-ce que ces efforts vont produire des effets à deux ans, à cinq ans, ou jamais ? C’est le paradoxe de l’IA en ce moment, et c’est ce qui crée les interrogations actuelles. Sauf pour les fournisseurs de matériel, c’est à dire de puces et de serveurs, dont il est acquis qu’ils transforment actuellement les investissements en marges records. Les vendeurs de semiconducteurs et de systèmes sont les bénéficiaires réels du boom de l’IA. Les acheteurs finaux de ces semiconducteurs ne sont que les bénéficiaires potentiels.
L’autre sujet du moment sur les marchés, si l’on écarte la décadence politique française, c’est la flambée de l’or. L’once vient de passer la barre symbolique des 4 000. Pour rester dans le domaine montagnard, 4 000, c’est la hauteur des Droites, dans le massif du Mont-Blanc. Le plus « petit » des 82 sommets de 4 000 mètres et plus des Alpes. La ruée vers l’or version 2025 a entraîné une hausse de 52% du métal précieux depuis le début de l’année. C’est le rempart préféré des investisseurs contre les doutes pesant sur la solidité de l’économie dans le monde Trump II. La poussée de fièvre récente tient beaucoup à la perte du statut de valeur refuge du dollar. Les investisseurs réorientent leurs actifs vers l’or et même vers les cryptomonnaies, puisque le bitcoin est considéré par certains comme plus sûr que le billet vert. Qui aurait pu dire ça il y a quinze ans ?
En Asie-Pacifique, le Nikkei 225 finit par baisser légèrement au Japon, après avoir dignement fêté l’arrivée au pouvoir de Sanae Takaichi, une Première ministre partisane des taux bas. Après un jour férié, Hong Kong reprend en baisse de 1% dans le sillage de la tech américaine. La Chine continentale ne rouvrira que demain, après une semaine entière à se tourner les pouces. La Corée du Sud est fermée elle aussi pour un second jour férié consécutif. Taiwan a repris en baisse de 0,4%. En Australie, l’ASX affiche une troisième séance de baisse lilliputienne. L’Inde évolue autour de l’équilibre. Les indicateurs avancés européens sont à nouveau hésitants.
Le CAC 40 démarre la séance en hausse de 0,2% à 7 984 points. Le SMI affiche +0,3% à 12 555 points. Le Bel 20 gagne 0,3% à 4 928 points.
Les temps forts économiques du jour
La production industrielle allemande et les stocks de bruts US (sous réserve) sont programmés aujourd’hui. Tout l’agenda ici.
Les cotations sont celles du jour autour de 7h00, les liens permettent d’avoir le temps réel :
- Euro : 1,1619 USD
- Once d’or : 4011 USD
- Brent : 65,99 USD
- Spread Bund / OAT : 86 points (+0,9%)
- VIX : 17,24 (+2,1%)
- 10 ans US : 4,135%
- Bitcoin : 121 534 332 USD
Les principaux changements de recommandations
- Aixtron : JP Morgan démarre le suivi à neutre avec un objectif de cours de 13,40 EUR.
- Amrize : Wells Fargo démarre le suivi à surpondérer avec un objectif de cours de 57 USD.
- Arkema : JP Morgan reste à une recommandation neutre avec un objectif de cours réduit de 65 à 55 EUR.
- BNP Paribas : Morgan Stanley reste à pondération de marché avec un objectif de cours réduit de 96 à 92 EUR.
- Bonduelle : BNP Paribas Exane maintient sa recommandation neutre et relève l’objectif de cours de 7,80 à 9 EUR.
- Crédit Agricole : Morgan Stanley reste à pondération de marché avec un objectif de cours réduit de 20 à 19 EUR.
- CTT-Correios de Portugal : AS Independent Research passe de vendre à neutre avec un objectif de cours de 6,55 EUR.
- Euronext : Jefferies maintient sa recommandation d’achat et réduit l’objectif de cours de 170 EUR à 160 EUR.
- Harvia : Inderes passe d’alléger à accumuler et réduit l’objectif de cours de 41 EUR à 40 EUR.
- Innate Pharma : Goldman Sachs reste à neutre avec un objectif de cours réduit de 2,49 à 2,23 EUR.
- KBC Groupe : Citi reste à neutre avec un objectif de cours relevé de 72,40 à 101,20 EUR.
- Landis+Gyr Group : Bank Vontobel reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 58 à 61 CHF.
- Metlen Energy & Metals : Bernstein démarre le suivi à performance de marché avec un objectif de cours de 48 EUR.
- Metso Outotec : SEB Bank passe de conserver à acheter avec un objectif de cours relevé de 11,40 EUR à 13,50 EUR.
- Nanobiotix : Stifel maintient sa recommandation d’achat et relève l’objectif de cours de 17 à 25 EUR.
- Netcompany Group : ABG Sundal Collier passe d’acheter à conserver avec un objectif de cours relevé de 290 DKK à 300 DKK.
- Nokia : DNB Carnegie passe de conserver à acheter avec un objectif de cours relevé de 4,10 EUR à 4,70 EUR.
- Primary Health Properties : Barclays reprend le suivi à surpondérer avec un objectif de cours de 110 GBX.
- PSP Swiss Property : Barclays passe de surpondérer à pondération de marché avec un objectif de cours de 135 CHF.
- Rémy Cointreau : Bernstein reste à surperformance avec un objectif de cours relevé de 72 à 74 EUR.
- Sandvik : JP Morgan passe de neutre à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 230 à 310 SEK.
- Sanofi : Guggenheim reste à acheter avec un objectif de cours réduit de 104 à 101 EUR.
- Scor : Barclays reste à pondération de marché avec un objectif de cours relevé de 29,10 à 29,40 EUR.
- Shell : Wolfe Research passe de surperformance à performance de marché.
- Sotkamo Silver : Inderes passe d’alléger à accumuler avec un objectif de cours relevé de 1 à 1,50 SEK.
- Swiss Prime Site : Barclays passe de pondération de marché à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 102 à 118 CHF.
- UBS Group : Deutsche Bank maintient sa recommandation d’achat et relève l’objectif de cours de 35 à 36 CHF.
- Valiant : Octavian AG démarre le suivi à l’achat avec un objectif de cours de 156 CHF.
- VITEC : DNB Carnegie passe de vendre à acheter avec un objectif de cours relevé de 375 SEK à 445 SEK.
En France
Annonces importantes (et moins importantes… Je précise que les informations sont données à chaud avant l’ouverture et ne préjugent pas de la couleur des actions pendant la séance)
- Crédit Agricole acquiert une participation minoritaire de 9,9% dans la banque coopérative belge Crelan.
- ArcelorMittal et Aperam saluent les propositions antidumping de l’UE pour protéger son marché de l’acier.
- Legrand signe le rachat de Cogelec et déposera une OPA à 29 EUR par action pour désintéresser les minoritaires.
- Ampère (Renault) confirme viser une réduction du coût de production d’un véhicule électrique de 40% d’ici 2028 et l’atteinte d’un seuil de rentabilité dès cette année.
- Sanofi a obtenu des résultats positifs en phase II avec AlphaMedix dans les tumeurs digestives.
- Air Liquide renforce ses activités aux Etats-Unis.
- Capgemini lance un rachat d’actions pour neutraliser la dilution actionnariale associée à son 12e plan d’actionnariat salarié.
- Euronext annonce une augmentation des volumes échangés sur ses plateformes en septembre.
- Argan et Danone lancent le chantier d’un nouveau site logistique à Sorigny.
- Dassault Aviation a livré son 300e Rafale.
- Ayvens estime être correctement couverte par sa provision en amont du possible remboursement de certains crédits auto UK.
- Spie rachète ECOexperts Automation.
- Le comté de Scott, Linwood et Waga Energy mettent en service une unité de production biométhane dans l’Iowa.
- Ampacimon et Drone Volt s’allient pour l’installation automatisée de capteurs DLR sur les lignes à haute et très haute tension.
- Hoffmann Green Cement signe un partenariat avec CNR Construction.
- Hospitex (Ikonisys) remporte l’appel d’offres public de la polyclinique de Bari pour les systèmes de cytologie Cytofast.
- Groupe TERA vend ses laboratoires d’analyses chimiques TERA Environnement et Toxilabo à CELNOR France.
- Les principales publications du jour : Voyageurs du Monde, Vaziva, Fermentalg, Cogra, Teract, Upergy, Gensight, Obiz, Bilendi… Le reste ici.
Dans le vaste monde
Annonces importantes (et moins importantes)
D’Europe
- La FCA pourrait imposer à des banques officiant en Grande-Bretagne de rembourser 8,2 milliards de livres aux automobilistes dans une affaire de ventes abusives sur certains crédits auto.
- ABB vend ses activités robotiques au groupe SoftBank pour 5,4 milliards de dollars.
- Un fonds UBS est exposé à 30% à la faillite de l’équipementier automobile First Brands. Et cette fois, ce n’est pas la faute du Crédit Suisse.
- BMW abaisse légèrement ses prévisions à cause de ventes décevantes en Chine.
- Leonardo obtient une facilité de crédit renouvelable de 1,8 milliard d’euros liée à l’ESG.
- Umicore vend ses stocks d’or pour 410 millions d’euros.
- Aurubis vise un résultat opérationnel compris entre 300 et 400 millions d’euros sur l’exercice 2025/2026.
- Givaudan lance la construction d’un nouveau site de production aux Etats-Unis grâce à un investissement de 187 millions de francs suisses.
- GEA Group réorganise ses activités en trois divisions et une nouvelle direction exécutive pour simplifier ses opérations.
- Aryzta a nommé le président Urs Jordi au poste de directeur général par intérim pour succéder à Michael Schai, qui a démissionné, avec effet immédiat.
- Unite Group confirme ses prévisions de BPA ajusté pour l’exercice.
- Nordex obtient une commande de 236 MW d’éoliennes en Amérique du Nord.
- Verisure fixe le prix de son introduction en bourse à 13,25 EUR par action.
- Defender Capital s’oppose au projet de vente de Staar Surgical à Alcon.
- Les principales publications du jour : CVS Group, Finnair…
D’Amérique du Nord
- Tesla lance des versions meilleur marché des Model 3 et Model Y.
- JPMorgan consacre 2 milliards de dollars par an au développement de technologies d’intelligence artificielle, selon son CEO.
- Exxon Mobil envisage de revenir en Irak pour explorer le champ pétrolifère de Majnoon, selon Bloomberg.
- Google lance Google AI Plus dans 36 pays.
- Le CEO de Nvidia annonce que la société continuera à sponsoriser les visas H-1B, indique Business Insider.
- Walt Disney acquiert les droits de la série de livres « Impossible Creatures » pour une franchise cinématographique.
- Nuburu acquiert Orbit.
- Les principales publications du jour : McCormick…
D’Asie et d’ailleurs
- MercadoLibre propose à ses abonnés la livraison gratuite le jour même au Brésil.
- Toyota explore le développement d’un petit système de drones civils pour assister les véhicules sur les routes non pavées et les sentiers.
- Les principales publications du jour : néant…
Le reste de l’agenda mondial des publications ici.
Lectures
- Quatre signes avant-coureurs de la bulle de l’IA (Platformer, en anglais).
- La survalorisation des actions, c’est la faute des propriétaires immobiliers (Klement on Investing, en anglais).
- Ces gouvernements-éclairs qui ont marqué (ou pas) l’histoire politique française depuis deux siècles (Historia).
- Etes-vous un vrai descendant d’Américains ? (The Atlantic, en anglais).
- Kering : Luca de Meo impose son rythme effréné aux maisons du groupe (La Lettre).
- Aux Philippines, les bonnes affaires de la pollution plastique (XXI).
- Vers une bonne mondialisation (Noéma, en anglais).
- Les vidéos slop sont en train de submerger le Web (L’ADN).
- Pourquoi les constructeurs chinois quittent la Russie (Le Grand Continent).
- Les IA pensent-elles vraiment à nous ? (CRNS).