Mais trêve d’émileries. Wall Street a fini par se faire rattraper par la patrouille obligataire pour la seconde fois en moins de deux mois. Ça s’est produit hier. Après une longue série de variations modestes et très majoritairement haussières, les principaux indices ont reculé plus brutalement, à l’image du S&P 500, qui a lâché 1,61% à la clôture. C’est son plus gros écart baissier en un mois (le précédent datait du 21 avril, -2,36%). Le Russell 2000, l’indice des petites capitalisations américaines, a lui décroché de 2,8%. C’est significatif et ça traduit la préoccupation des investisseurs vis-à-vis du segment le moins robuste du marché. En effet, quand les nuages s’amoncellent, les grandes entreprises, mieux capitalisées et disposant d’une palette élargie de solutions de financement, sont moins fragiles que les petites.
La montée des craintes des milieux financiers est la conséquence de la hausse des rendements obligataires, elle-même alimentée par les perspectives de dégradation de la situation budgétaire américaine. Les Etats-Unis vivent au-dessus de leurs moyens actuels. Ce n’est pas nouveau et ce n’est pas le seul pays dans ce cas, loin de là. Mais le budget que Donald Trump tente de faire adopter au forceps va aggraver la situation. Avant de l’améliorer, selon l’intéressé lui-même. Comme en matière de droits de douane, en somme : le président américain demande aux Américains d’accepter la douleur immédiate en échange d’une promesse de prospérité future.
Mais les investisseurs n’achètent pas. Comme ce fut le cas avec les droits de douane il y a un peu plus d’un mois, le marché de la dette a commencé à agiter les drapeaux rouges. Les financiers ont vendu des obligations, ce qui a mécaniquement fait grimper les rendements, selon le principe des vases communicants. La rémunération de la dette US à 10 ans, qui avait baissé après l’abandon provisoire des droits de douane réciproques, a repris plus de 10% depuis le début du mois de mai. Hier, un autre événement est venu assombrir l’humeur et accroître les pertes de Wall Street : la faible demande pour une adjudication de bons du trésor US à 20 ans. C’est un signal négatif qui montre que les investisseurs ont moins d’appétit pour la dette américaine, perçue comme plus risquée qu’avant. Ils pourraient donc exiger à l’avenir une rémunération plus élevée pour absorber les placements.
Ce regain de tension obligataire s’accompagne d’une saillie du patron de JPMorgan, le très respecté Jamie Dimon, qui a alerté pour la seconde fois en une semaine sur le risque de stagflation aux Etats-Unis. Quand les actions s’étaient effondrées début avril à cause d’un début d’incendie sur le marché de la dette, c’était déjà lui, Dimon, qui était allé prêcher la bonne parole à la Maison Blanche et qui avait, probablement, aidé à faire prendre conscience de la gravité de la situation. Curieuse analogie de circonstances donc, à peine six semaines plus tard, comme un mauvais remake : l’obligataire qui se tend, et Dimon au micro.
Les dernières informations disponibles ce matin laissent penser que le « grand et magnifique projet de loi » (Big Beautiful Bill) de Donald Trump pourrait finir par passer, malgré la fronde de certains élus républicains. La commission des règles de la Chambre des représentants a voté mercredi soir, à 8 voix contre 4, en faveur de l’adoption du projet de loi après 22 heures de palabres. Les dirigeants républicains doivent encore voter deux fois, avant d’envoyer le texte au Sénat, où il sera encore longuement débattu. Reste à savoir si la progression du texte dans le dédale réglementaire apaisera les marchés. D’un côté, une impasse budgétaire serait perçue négativement comme un signe de tension politique. De l’autre, l’adoption du texte reviendrait à accepter un alourdissement de la dette qui viendrait compliquer le pilotage de l’économie américaine.
Dans le reste de l’actualité, Donald Trump aurait indiqué en privé aux dirigeants européens que Vladimir Poutine n’est pas prêt à mettre fin à la guerre, selon les infos du Wall Street Journal. L’UE qui a présenté une proposition commerciale révisée aux Etats-Unis afin de redynamiser les négociations avec la Maison Blanche. Dans une semaine peu fournie en indicateurs macroéconomique et où les investisseurs semblent faire peu de cas des discours des banquiers de la Fed, les données publiées aujourd’hui seront probablement scrutées de près, en particulier les indicateurs d’activité PMI (zone euro à 11h00 et USA à 15h45).
En Asie Pacifique, le Japon poursuit sa décrue de 0,9%, pendant que Hong Kong lâche 1% et que la Corée du Sud perd 1,2%. L’Inde et Taiwan (-0,7%) ainsi que l’Australie (-0,4%) suivent aussi le mouvement baissier initié par les Etats-Unis. Les indicateurs avancés sont baissiers en Europe.
Le CAC40 perd 0,35% à 7881 points à l’ouverture. Le SMI cède 0,5% à 12 320 points. Le Bel20 recule de 0,4% à 4505 points.
Les temps forts économiques du jour
Au programme aujourd’hui : les indicateurs PMI des grandes économies, notamment la France, l’Allemagne, la zone euro, le Royaume-Uni et les Etats-Unis. Outre-Atlantique, il y aura aussi l’indice d’activité nationale de la Fed de Chicago, les nouvelles demandes d’allocations chômage et les ventes de logements existants. Tout l’agenda ici.
Les cotations sont celles du jour autour de 7h00 :
- Euro : 1,1332 USD
- Spread Bund / OAT : 66 points (stable)
- VIX : 20,8 (+2,8%)
- Once d’or : 3338 USD
- Brent : 64,77 USD
- 10 ans US : 4,587%
- Bitcoin : 111 612 USD
Les principaux changements de recommandations
- Alcon : Kepler Cheuvreux passe de conserver à acheter en visant 86 CHF.
- Asmodée : BNP Paribas Exane maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours relevé de 110 à 120 SEK. Nordea Bank maintient sa recommandation d’achat avec un objectif de cours relevé de 126 à 142 SEK.
- ASR Nederland : Morgan Stanley maintient sa recommandation de surpondérer et relève l’objectif de cours de 55 à 60 EUR.
- BP Plc : Zacks dégrade de neutre à sous-performance avec un objectif de cours réduit de 32 USD à 25 USD.
- Carrefour : Landesbank Baden-Württemberg maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours relevé de 13,90 à 14,40 EUR.
- EFG International : Mediobanca maintient sa recommandation de surperformance avec un objectif de cours réduit de 16 à 15 CHF.
- Indra Sistemas : Intermoney Valores passe d’achat à conserver avec un objectif de cours relevé de 30 à 33 EUR.
- Julius Bär : Goldman Sachs maintient sa recommandation d’achat avec un objectif de cours relevé de 61 à 68 CHF. JP Morgan maintient sa recommandation de surpondérer avec un objectif de cours réduit de 72 à 69 CHF. RBC Capital maintient sa recommandation de surperformance avec un objectif de cours réduit de 65 à 63 CHF.
- LDC : Euroland Corporate maintient sa recommandation d’achat avec un objectif de cours relevé de 89 à 101 EUR.
- Lloyds Banking Group : Redburn Atlantic passe de neutre à achat avec un objectif de cours relevé de 60 GBX à 100 GBX.
- Marks & Spencer : Jefferies passe de conserver à acheter avec un objectif de cours relevé de 370 GBX à 440 GBX.
- Nestlé : Barclays maintient sa recommandation de pondération de marché avec un objectif de cours relevé de 90 à 92 CHF.
- Repsol : Barclays améliore sa recommandation de pondération de marché à surpondérer avec un objectif de cours de 15 EUR.
- Safran : Deutsche Bank maintient sa recommandation d’achat avec un objectif de cours relevé de 246 à 280 EUR.
- Schindler Holding : Octavian AG dégrade son conseil d’achat à conserver avec un objectif de cours réduit de 300 CHF à 290 CHF.
- Sonova Holding : HSBC dégrade sa recommandation d’achat à conserver avec un objectif de cours réduit de 290 CHF à 285 CHF. Redburn Atlantic dégrade de neutre à vendre avec un objectif de cours réduit de 285 CHF à 225 CHF.
- Swiss Life Holding : Vontobel maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours relevé de 784 à 813 CHF. Mediobanca démarre le suivi à neutre avec un objectif de cours de 790 CHF.
- Swiss Re : Vontobel maintient sa recommandation d’achat avec un objectif de cours relevé de 161 à 166 CHF.
- Unibail : BNP Paribas Exane passe de neutre à surperformance.
En France
Annonces importantes (et moins importantes… Je précise que les informations sont données à chaud avant l’ouverture et ne préjugent pas de la couleur des actions pendant la séance)
- Orange ne sera « pas à la manoeuvre » en cas de mise en vente de SFR, selon sa PDG.
- Sanofi va racheter Vigil Neuroscience, spécialiste d’Alzheimer, pour 470 M$ minimum.
- Bernard Arnault (LVMH) exhorte l’UE à adopter une approche plus « constructive » dans les négociations commerciales avec Trump.
- Crédit Agricole prend une participation minoritaire dans la banque belge Crelan.
- Publicis rachète la plateforme de marketing d’influence Captiv8.
- Vinci cède sa participation de 50% dans Mantiqueira Transmissora pour 130 M€.
- Spie place 600 M€ d’obligations 5 ans à 3,75%.
- Euronext lance des obligations convertibles d’un montant de 425 M€ à échéance 2032.
- Eramet place 100 M€ d’obligations 5 ans à 6,5%.
- Robertet publie sa feuille de route 2030.
- LDC confiant sur son objectif d’Ebitda de près de 560 M€.
- Elior ajuste ses prévisions après une activité faible mais plus rentable au S1 fiscal.
- GL Events acquiert 69 % de West And East Animal Veterinary Conference Capital.
- Compagnie Chargeurs Invest signe plus de 100 M€ de financements.
- Exail signe deux commandes pour plus de 10 M€ en aéro-défense.
- Maurel construit une centrale solaire en Angola.
- Amoeba fait état d’un vote à l’unanimité des Etats membres de l’UE en faveur de l’approbation de la substance active de biocontrôle du groupe.
- Nanobiotix est financée jusqu’à mi-2026.
- OSE Immuno signe une collaboration autour des thérapies à base d’ARNm.
- Mauna Kea cherche toujours des solutions pour assurer son avenir.
- Les principales publications du jour : Reworld, Genfit, Netgem… Le reste ici.
Dans le vaste monde
Annonces importantes (et moins importantes)
D’Europe
- Stora Enso va vendre 12,4% de ses forêts suédoises pour environ 1 milliard de dollars.
- Adidas est assignée en justice par Steven Madden pour avoir tenté d’empêcher la société américaine de chaussures de vendre des sneakers à deux bandes non parallèles.
- Le bénéfice de Generali dépasse les prévisions avant l’examen de l’offre d’achat de Banca Generali.
- BT Group enregistre une hausse minimaliste de ses bénéfices.
- Telefonica vend sa filiale uruguayenne pour 440 millions de dollars.
- easyJet reste confiante malgré la forte demande dans le secteur du voyage.
- QinetiQ obtient une prolongation de cinq ans de son contrat LTPA avec le ministère britannique de la Défense pour 1,54 Md£.
- Honeywell rachète l’unité catalyseurs de Johnson Matthey pour 1,8 Md£.
- Allegro confirme ses prévisions après une hausse de 4,8% de son bénéfice au premier trimestre sur son marché domestique.
- DocMorris a levé environ 200 MCHF avec son augmentation de capital.
- Relief Therapeutics obtient de la FDA une désignation de maladie pédiatrique rare pour son anti-infectieux RLF-TD011.
- Les principales publications du jour : Generali, BT Group, Orlen, Intertek, Aegon, CTS Eventim…
D’Amérique du Nord
- Sociétés qui montent hors séance après leurs trimestriels : Urban Outfitters (+17,5%), Snowflake (+7,4%)…
- Sociétés qui baissent hors séance après leurs trimestriels : Enersys (-3%)
- Nike s’apprête à augmenter ses prix la semaine prochaine et prévoit de vendre à nouveau sur Amazon.
- UnitedHealth a chuté hier après des rumeurs de versements d’argent à des maisons de retraite pour réduire les transferts vers les hôpitaux.
- AT&T va racheter la division fibre de Lumen pour 5,75 milliards de dollars.
- Boeing accélère la cadence de production du B737 grâce à l’amélioration de la qualité et de la culture de la sécurité.
- Google va intégrer de la publicité à son moteur de recherche renforcé à l’IA.
- Walmart prévoit des suppressions d’emplois dans le cadre d’une restructuration visant à simplifier ses opérations.
- OpenAI s’attaque aux appareils connectés, avec le designer historique d’Apple.
- Les principales publications du jour : Intuit, The Toronto-Dominion Bank, Analog Devices, Workday, Copart, Autodesk, Ross Stores, Williams-Sonoma, Deckers Outdoor, Ralph Lauren…
D’Asie Pacifique et d’ailleurs
- Le CEO de Rio Tinto quittera son poste plus tard dans l’année.
- Samsung BioLogics se scinde pour séparer la fabrication de médicaments sous contrat et créer de nouveaux moteurs de croissance.
- Le PDG de MercadoLibre se retire après 26 ans d’activité.
- Lenovo annonce une baisse de 64% de ses bénéfices au quatrième trimestre fiscal.
- Les principales publications du jour : ITC Limited, Singapore Telecom, Sun Pharmaceutical, Lenovo…
Le reste de l’agenda mondial des publications ici.
Lectures
- La Chine à bâti une forteresse dans son combat contre les USA (Wall Street Journal, en anglais).
- Les banques US se tournent rapidement vers les cryptomonnaies avec la dérégulation (The Information, en anglais).
- Le patron de Nestlé déclare que son prédécesseur a affaibli l’entreprise (Financial Times, en anglais).
- Le Qatar prêt à dépenser des montants astronomiques pour devenir le « Wall Street » du Moyen-Orient (Bloomberg, en anglais).
- Une mode véritablement durable peut-elle être économiquement viable ? (The Conversation).
- Que faut-il acheter sur le marché si l’IA est vraiment une révolution ? (FT Unhedged, en anglais).
- Pourquoi les villes de la Belle Epoque étaient-elles belles ? (Res Obscura, en anglais).
- L’espace est-il encore une affaire d’Etat ? (L’ADN).
- Cette génération est confrontée à une multitude de menaces sanitaires totalement inédites (National Geographic, en anglais).