Solutions Investissements

  • Gregor Trachsel
  • Chief Investment Officer
  • SG Value Partners

La réhabilitation progressive des actions japonaises

En mai, l’indice Nikkei a squatté la Une des journaux lorsqu’il est parvenu à son plus haut niveau depuis 33 ans. Les observateurs du marché ont avancé toute une série d’arguments pour expliquer cette hausse imposante. Gregor Trachsel avance ici les siens.

Francesco Mandalà

Dans les portefeuilles, la sous-pondération des investisseurs mondiaux au Japon reste énorme. Pourtant, les arguments en faveur d’une augmentation de cette exposition sont nombreux. La rentabilité des entreprises s’est régulièrement améliorée et les bilans des entreprises sont extrêmement solides. De plus, il existe de plus en plus de mesures favorables aux actionnaires, comme l’augmentation des dividendes et les rachats d’actions, ce qui est encore relativement nouveau au Japon. Pour finir, le gouvernement japonais tente d’inciter les citoyens à investir dans des actions avec des plans d’épargne fiscalement avantageux.

Quoi que l’avenir réserve, les actions “value” japonaises demeurent toujours bon marché et se montrent donc très attrayantes. Nous attribuons les fortes décotes du moment à trois facteurs structurels. D’abord, les pratiques commerciales japonaises reposent traditionnellement sur un modèle holistique de parties prenantes, qui prend en compte les perspectives des employés, des clients, des partenaires commerciaux et de la société dans son ensemble. Les investisseurs occidentaux, quant à eux, placent généralement leurs intérêts d’actionnaires au premier plan.

Deuxièmement, il est toujours plus difficile d’obtenir des informations de première main au Japon par rapport à ce qui se pratique dans le reste du monde. Les autorités de surveillance et les bourses mettent pourtant la pression sur les entreprises pour qu’elles renforcent la qualité des relations investisseurs. Ce décalage représente un obstacle majeur pour les investisseurs étrangers au cas où utilisent les mêmes formulaires que sur leurs marchés nationaux. De plus, les analyses de marché des courtiers japonais ne sont pas aussi complètes que pour d’autres marchés développés : La raison en est que Japon est resté trop longtemps, plusieurs décennies durant, une zone d’investissement assez impopulaire. Ce manque de profondeur et d’étendue de l’analyse conduit à une formation inefficace des cours, en particulier sur le segment des Small & Mid Caps.

Troisièmement, de nombreux investisseurs occidentaux hésitent à acheter des actions japonaises pour des raisons périphériques. Les évolutions démographiques ont l’air défavorables. Les entreprises passent pour plutôt ennuyeuses avec des marges bénéficiaires et des perspectives de croissance modérées. La dépréciation du yen inquiète les investisseurs sensibles aux devises étrangères. Enfin, les inconvénients en termes d’accessibilité et de communication, le problème du décalage horaire pour les traders dans les métropoles financières occidentales et la barrière linguistique en dissuadent plus d’un.

Malgré l’actuelle tendance à la hausse des actions japonaises, le proverbial “Wall of Worry” paraît donc toujours aussi abrupt et piégeux aux yeux des investisseurs mondiaux. Certains de ces obstacles et inquiétudes s’atténueront lentement mais sûrement avec le temps, à mesure que les entreprises pourront s’appuyer sur leurs récents succès en termes d’améliorations fondamentales de la gouvernance d’entreprise.

Gregor Trachsel

SG Value Partners

Gregor Trachsel est Chief Investment Officer de SG Value Partners à Zurich. Avec son équipe, il gère depuis plus de 20 ans des mandats d’actions globales Deep Value et des fonds de placement avec un horizon de placement à long terme. Depuis 2020, il privilégie la voie de l’indépendance avec SG Value Partners. Auparavant, il a travaillé sur la même stratégie pour M.M. Warburg (Switzerland) et Credit Suisse Asset Management à Zurich.