L’administration américaine, qui ne maîtrisait plus rien la semaine dernière, est parvenue à reprendre le contrôle de la narration. C’est ce qui explique le rebond de Wall Street au cours des deux dernières séances, malgré la coupure du weekend. Vous le savez, le récit a une importance capitale dans le monde actuel. Ça a toujours été le cas, mais c’est probablement exacerbé depuis que la planète entière est interconnectée et vibre au rythme des mêmes histoires. La Maison Blanche a perdu tout le monde, elle y compris, avec son offensive tarifaire. Mais elle est parvenue à inverser la tendance, en tout cas momentanément.
Cette récupération en catastrophe s’est faite au prix d’une série de dérobades qui n’a pas dû plaire à Donald Trump, habitué à avoir le dernier mot. Il a fallu détricoter dans l’urgence les annonces fracassantes et allumer des contrefeux. L’artisan de tout cela, c’est apparemment Scott Bessent, le seul membre de la garde rapprochée qui ne passe pas ses journées à caresser l’ego présidentiel dans le sens du brushing. Le secrétaire du trésor a pris les choses en main quand la situation a tourné au vinaigre sur les marchés. L’administration Trump a beau avoir joué Main Street contre Wall Street, la brutale dégradation du marché obligataire, après une chute déjà conséquente des actions, était devenue intenable.
La pause décrétée sur les droits de douane dits réciproques a été suivie de l’abandon d’une partie des surtaxes sur les produits électroniques importés de Chine. Puis d’une grande opération de com’ de membres de la Fed avec en punchline « n’ayez pas peur, nous sommes là ». Et il se murmure depuis quelques heures que certains composants automobiles pourraient aussi sortir du champ des dernières barrières douanières. Enfin, pièce importante du puzzle de la reprise en main de la narration, Scott Bessent a accordé hier une interview à Bloomberg, dans laquelle il a écarté le risque obligataire et les rumeurs de ventes de bons du trésor par des porteurs souverains internationaux, contribuant à faire reculer le rendement de la dette à 10 ans US, qui prenait une trajectoire inquiétante.
Même si Donald Trump envoie en parallèle le message « vous ne perdez rien pour attendre », la tendance est à l’apaisement. D’ailleurs, les éventuels droits de douane sur les semiconducteurs et les médicaments n’ont pas été assénés en mode « frapper d’abord, réfléchir ensuite ». L’administration a annoncé que des enquêtes ont été lancées et que les décisions à venir dépendront de leurs résultats. C’est une approche plus compatible avec l’idée que les marchés se font d’un comportement raisonnable. Mais Wall Street n’est pas dupe pour autant. Les financiers avaient pris à la légère la détermination initiale de Donald Trump. Comme l’écrit le Financial Times ce matin « le fait que ce soient les marchés qui aient forcé la main de Trump souligne que son destin reste étroitement lié à la fortune de l’élite financière, même si celle-ci continue d’être mise à l’écart dans son administration. » La cohabitation risque encore d’être tumultueuse.
A Wall Street, le S&P 500 a donc gagné 0,8% hier, pour clôturer à 5 406 points. L’indice de référence américain a repris 11,8% par rapport à son plancher du 7 avril, mais reste à 13,7% de son record du 19 février. Le même exercice avec le Stoxx Europe 600 aboutit à un gain de 7,7% depuis le plus bas du 7 avril, en intégrant le bond de 2,7% enregistré hier. L’indice large européen reste à 13% de son record du 3 mars. Les deux grands indices ont dont suivi à peu près le même schéma. Ils ont grosso modo fait la moitié du chemin de rebond vers leurs meilleurs niveaux.
Les investisseurs commencent à avoir des chiffres d’entreprises à se mettre sous la dent pour anticiper les mois à venir. Les banques d’affaires américaines (Goldman Sachs hier, après JPMorgan Chase et Morgan Stanley vendredi) profitent de la volatilité pour engranger des bénéfices XXL, à défaut de faire gonfler leurs actifs sous gestion. A l’inverse, LVMH se serre la ceinture (en cuir) : le groupe a publié hier soir après la clôture de la Bourse de Paris des chiffres en berne, très éloignés de la flamboyance habituelle des dernières années. Le marché a sanctionné (le titre coté aux Etats-Unis perdait 6% en soirée). Ericsson, qui a publié ce matin, a dépassé les attentes au T1 mais prévenu que les lendemains seront plus incertains. A l’inverse, Sika a publié un peu court, mais confirmé ses prévisions annuelles. Il y aura pas mal de trimestriels aux Etats-Unis aujourd’hui, en particulier ceux de Johnson & Johnson, qui apporteront la vision d’un acteur présent à la fois dans la pharmacie et les produits grand public.
En Asie Pacifique, le secteur automobile permet au Japon et à la Corée du Sud de gagner 1%. L’Inde a le vent en poupe (+2%), tandis que Taiwan est en forme (+1,9%). L’Australie est plus mesurée (+0,23%). Les marchés chinois sont hésitants, avec une baisse de 0,4% sur le continent et un Hang Seng étale à Hong Kong. La volatilité recule sur les marchés actions occidentaux, avec une ouverture attendue dans des bornes plus étroites que ces derniers jours, autour de l’équilibre.
Le CAC40 perd 0,6% à 7226 points. Le SMI est en retrait de 0,05% à 11 499 points. Le Bel20 gagne 0,2% à 4141 points.
Les temps forts économiques du jour
Au programme du jour : les chiffres de l’emploi britanniques, l’inflation française, la production industrielle de la zone euro et le sondage ZEW allemand en matinée. Aux Etats-Unis, place à l’indice Empire Manufacturing. Tout l’agenda ici.
Les cotations sont celles du jour autour de 7h00 :
- Euro : 1,1351 USD
- Spread Bund / OAT : 74 points (-4%)
- VIX : 31 (-7%)
- Once d’or : 3225 USD
- Brent : 64,92 USD
- 10 ans US : 4,347%
- Bitcoin : 85 300 USD
Les principaux changements de recommandations
- Adidas : Landesbank Baden-Württemberg dégrade d’acheter à conserver avec un objectif de cours réduit de 260 EUR à 210 EUR. Berenberg démarre le suivi à conserver avec un objectif de cours de 230 EUR.
- Aéroports De Paris : Grupo Santander dégrade de sousperformance à neutre avec un objectif de cours réduit de 118 EUR à 109 EUR.
- Bic : Bernstein maintient sa recommandation de surperformance avec un objectif de cours réduit de 82 à 70 EUR.
- Corbion : Berenberg dégrade de conserver à vendre avec un objectif de cours réduit de 24 EUR à 16 EUR.
- Deutsche Telekom : AlphaValue/Baader Europe passe d’alléger à accumuler avec un objectif de cours réduit de 35,70 à 35 EUR.
- Enento Group : Inderes améliore son conseil de réduction à accumulation avec un objectif de cours réduit de 17 EUR à 16,50 EUR.
- Equinor : Oddo BHF dégrade sa recommandation de sousperformance à neutre avec un objectif de cours réduit de 265 NOK à 255 NOK.
- Euronext : Goldman Sachs maintient sa recommandation de vente avec un objectif de cours relevé de 90 à 103 EUR.
- Hennes & Mauritz : AlphaValue/Baader Europe passe d’acheter à accumuler avec un objectif de cours réduit de 188 SEK à 150 SEK.
- JD Sports Fashion : Barclays passe de souspondérer à pondération de marché avec un objectif de cours réduit de 110 GBX à 80 GBX.
- Kuehne Und Nagel International : Goldman Sachs maintient sa recommandation de vente avec un objectif de cours réduit de 198 CHF à 183 CHF.
- Lassila & Tikanoja : Inderes relève sa recommandation d’accumuler à acheter avec un objectif de cours de 10 EUR.
- LVMH : Morgan Stanley dégrade de surpondérer à pondération de marché avec un objectif de cours réduit de 740 EUR à 590 EUR Goldman Sachs maintient sa recommandation d’achat et réduit l’objectif de cours de 725 à 630 EUR. JP Morgan maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours réduit de 650 à 610 EUR. Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 670 à 510 EUR. RBC Capital maintient sa recommandation de surperformance avec un objectif de cours réduit de 750 à 680 EUR. Telsey Advisory Group maintient sa recommandation de surperformance avec un objectif de cours réduit de 820 à 715 EUR.
- Next : Goldman Sachs passe de neutre à achat avec un objectif de cours relevé de 12200 GBX à 14000 GBX.
- Outokumpu : Deutsche Bank passe de conserver à acheter avec un objectif de cours réduit de 3,80 à 3,70 EUR.
- Puma : Berenberg démarre le suivi à l’achat avec un objectif de cours de 40 EUR.
- Rotork : RBC Capital surperforme sa recommandation de secteur à surperformance avec un objectif de cours de 370 GBX.
- Seb S.A : Berenberg maintient sa recommandation d’achat avec un objectif de cours réduit de 121 à 106 EUR.
- Técnicas Reunidas : Bestinver Securities passe de conserver à acheter avec un objectif de cours relevé de 13,85 EUR à 16,70 EUR.
- UCB : AlphaValue/Baader Europe maintient sa recommandation alléger avec un objectif de cours relevé de 140 à 152 EUR.
En France
Annonces importantes (et moins importantes… Je précise que les informations sont données à chaud avant l’ouverture et ne préjugent pas de la couleur des actions pendant la séance)
- LVMH subit une baisse d’activité au T1. Le valeur cotée aux Etats-Unis a réagi en baisse de 5% à l’annonce.
- Publicis en bonne voie pour atteindre ses prévisions annuelles après un T1 solide.
- Peninsula, la société d’investissement de la famille Diniz, a vendu la totalité de sa participation de 4,9% dans Carrefour Brésil (Carrefour).
- TotalEnergies prévoit une production d’hydrocarbures dans le haut de la fourchette de ses prévisions pour le premier trimestre.
- Veolia renonce à un projet de stockage de déchets dangereux dans le Pas-de-Calais.
- Sanofi annonce des données de phase II positives pour amlitélimab dans l’asthme.
- Un tribunal italien autorise une action collective contre Stellantis pour des airbags défectueux.
- JCDecaux remporte le contrat de mobiliers urbains pour l’information et services associés de la Ville de Rennes.
- VusionGroup décroche un contrat auprès de la chaîne de pharmacies européenne Dr. Max.
- Valneva reçoit la première autorisation de mise sur le marché pour IXCHIQ dans un pays où le chikungunya est endémique : le Brésil.
- Carmat obtient l’autorisation conditionnelle de la FDA de démarrer la seconde cohorte de l’étude EFS aux Etats-Unis.
- AB Science obtient un brevet aux USA dans la drépanocytose.
- Les principales publications du jour : Virbac, FDJ United, Esker, Waga, Prodways, Catana, Diagnostic Medical Systems, Ober… Le reste ici.
Dans le vaste monde
Annonces importantes (et moins importantes)
D’Europe
- Ericsson enregistre une hausse de 40% de ses bénéfices grâce à l’augmentation des ventes en Amérique du Nord avant l’entrée en vigueur des droits de douane de Trump.
- Sika annonce des ventes de 3,28 milliards de dollars pour le premier trimestre, en hausse de 1,1%.
- Beiersdorf annonce des ventes pour le premier trimestre légèrement supérieures aux prévisions.
- B&M prévoit un bénéfice annuel supérieur au milieu de la fourchette prévisionnelle.
- Le chiffre d’affaires trimestriel de TomTom dépasse les estimations.
- Robert Walters annonce une baisse de 16% de ses revenus nets au premier trimestre.
- Atlas Holdings propose de racheter De La Rue, l’imprimeur de billets de banque de la BoE, à 130 pence par action, selon Sky News.
- Applied Materials prend 9% du capital de BE Semiconductor.
- UniCredit obtient le feu vert de l’office allemand des ententes pour une participation importante dans Commerzbank.
- Bank Pekao vise un rendement des capitaux propres supérieur à 18 % d’ici la fin de l’année 2027.
- L’Italie et Retelit signent un accord pour le rachat de Sparkle à Telecom Italia, qui devrait être finalisé d’ici à la fin de l’année 2025.
- Prysmian cède sa participation dans Yofc en Chine pour 40 millions d’euros.
- Novo Nordisk met en garde les consommateurs contre des versions contrefaites d’Ozempic aux Etats-Unis.
- Les principales publications du jour : Sika AG, Ericsson, Publicis, Wise…
D’Amérique du Nord
- Apple a vu ses expéditions d’iPhone bondir de 10% au premier trimestre, selon IDC, mais il est difficile d’un tirer des conclusions car le groupe a profité d’achats opportunistes en prévision de hausses de prix.
- Compal, Wistron et Jabil seraient parmi les prétendants à la division ZT Servers d’AMD, selon Bloomberg.
- ON Semiconductor renonce à son offre sur Allegro Microsystems.
- Meta tente de convaincre la justice américaine de ne pas le priver d’Instagram et WhatsApp. Meta qui va utiliser les messages publics et les interactions avec l’IA pour former des modèles dans l’UE.
- Nvidia va faire fabriquer des puces IA entièrement aux Etats-Unis.
- AMD s’apprête à produire sa puce CPU dans l’usine TSMC en Arizona.
- Molson Coors annonce le départ à la retraite fin 2025 de son PDG Gavin Hattersley, vétéran du secteur, et lance une recherche de successeur en interne et en externe.
- Hertz révèle que des pirates informatiques ont volé les données de ses clients.
- KKR signe un accord de 3,1 milliards de dollars pour racheter l’entreprise de services post-marché de S&P Global et CME.
- Lowe’s va acquérir Artisan Design Group.
- Le médicament de Bristol-Myers Squibb contre les maladies cardiaques n’atteint pas ses principaux objectifs dans une étude de stade avancé.
- Mattel annonce une prolongation pluriannuelle de son accord de licence mondial avec la WWE.
- Les principales publications du jour : Johnson & Johnson, Bank of America Corporation, Citigroup, PNC Financial Services Group, United Airlines Holdings, Interactive Brokers Group, Omnicom Group, JB Hunt Transport Services, Albertsons Companies…
D’Asie Pacifique et d’ailleurs
- Le promoteur chinois Sunac cherche à convertir toutes ses obligations offshore en actions, selon Bloomberg.
- Collins Foods envisage de mettre fin à son partenariat avec Taco Bell et d’ouvrir davantage de points de vente KFC en Allemagne.
- Les principales publications du jour : Wanhua Chemical, Vale…
Le reste de l’agenda mondial des publications ici.
Lectures
- Comment Wall Street a eu tout faux sur Donald Trump (Financial Times, en anglais).
- Xi a une main plus forte que Trump (Financial Times, en anglais).
- Sur TikTok, tout le monde euphémise sur un potentiel assassinat politique (L’ADN).
- Pourquoi l’Europe craint-elle un déferlement de produits bon marché en provenance de Chine ? (New York Times, en anglais).
- Windows 11 : l’absurde politique de mise à jour de Microsoft (Le Monde).
- L’éditeur de romans d’amour rêve d’une dynastie pilotée par l’IA (Bloomberg, en anglais).
- Que sont les GPU, cette technologie à laquelle on doit l’essor des jeux vidéo et de l’IA ? (The Conversation).