Take cover

Solutions Investissements

  • Interview Daniel Germann
  • Portfolio manager
  • Progressive Capital Partners

« Étonnamment, certaines couvertures sont de nouveau bon marché »

Depuis sa création à Zoug en 2001, Progressive se concentre sur les placements alternatifs. En ce moment, c’est la demande des investisseurs pour des stratégies de couverture, en raison de la forte hausse des taux d’intérêt et des tensions géopolitiques, qui requiert toute son attention, comme l’explique Daniel Germann.

Francesco Mandalà

Jusqu’à présent, les stratégies de type « liquid alternatives » et « long volatility » n’étaient plutôt connues que des spécialistes. Avec la forte hausse des taux d’intérêt, il semble que la situation a changé ? Quelle en a été la raison ?

Les crises géopolitiques tant en 2022 qu’en 2023, le recul du marché des actions en 2022 ainsi que les fluctuations accrues sur les marchés en général ont rappelé à de nombreux investisseurs institutionnels la raison d’être des stratégies de couverture. Parallèlement, le recul des marchés en 2022 a également montré qu’une approche de couverture insuffisamment diversifiée pouvait s’avérer décevante.

Couverture, cela sonne toujours comme un coût. Quel est votre point de vue à ce sujet?

Bien sûr, c’est un thème récurrent. Notre approche reste toutefois clairement axée sur les couvertures dites « carry-neutral ». Cela signifie que nous sommes en principe « long » sur la volatilité, qu’elle soit réelle ou implicites. Il en va ainsi de nos 11 sous-stratégies, diversifiées dans toutes les classes d’actifs et dans toutes les régions.

Pour nous, les coûts doivent cependant toujours être considérés eu regard de la qualité de la gestion mise en œuvre. Des solutions prétendument « bon marché » peuvent en fin de compte coûter parfois nettement plus cher que des solutions de grande qualité et une étiquette de prix qui leur correspond. Nous constatons régulièrement qu’il existe des potentiels de diversification considérables à exploiter parmi les approches de couverture très hétérogènes. En outre, et c’est pour nous un point essentiel, un large réseau de couvertures augmente la fiabilité dans la perspective de différents scénarios de crise.

Lorsque les marchés actions étaient performants, vous avez donc vu des rendements moins élevés ?

Exactement, la stratégie Long Volatility, en particulier, est moins utilisée en période de faible volatilité. Pour nos clients, elle joue avant tout le rôle de protection contre les crises. Et nous en avons vraiment beaucoup en ce moment. Pour nous, l’aspect « value » de ces expositions – sélectives et gérées activement – reste toutefois dominant. Nous pouvons typiquement les obtenir dans les 5 à 25% les plus bas des fourchettes historiques à long terme, ce qui recèle en soi un certain potentiel de hausse, même en l’absence de crise majeure.

Les incertitudes macroéconomiques persistent. A quoi doivent s’attendre les investisseurs?

Nous aurons tendance à voir des volatilités encore plus élevées. L’époque où l’inflation était faible est révolue. Les puts accordés par les banques centrales n’existent plus. La transition vers un nouveau « macro-régime » est en cours, même si les taux d’intérêt n’augmenteront plus aussi fortement et qu’ils se sont même arrêtés ici et là. En outre, nous assistons à un renforcement de la réglementation et à une augmentation des coûts sur le marché du travail, ce qui tend à favoriser une hausse continue de la volatilité.

Quel en est l’impact pour Progressive?

Eh bien, nous nous voyons confortés dans notre stratégie d’acteur de niche très ciblé. La demande pour des options de de couverture, notamment dans le domaine de la volatilité, augmente. Ceux qui se diversifient et veillent à des corrélations faibles, idéalement négatives, en particulier dans le domaine des alternatives liquides, devraient être récompensés en ces temps.

 

Daniel Germann

Progressive Capital Partners

Daniel Germann a rejoint Progressive Capital Partners en 2019. Auparavant, il a travaillé chez Vontobel Asset Management, où il s’est également concentré sur les stratégies Global Macro et Systematic Trading. Il était membre du comité d’investissement alternatif et a travaillé sur des mandats d’investissement alternatifs discrétionnaires et consultatifs. Avant de rejoindre Vontobel, Daniel Germann a travaillé pour Raiffeisen Suisse et sa filiale Notenstein La Roche Privatbank. Daniel Germann est titulaire d’un Master of Arts in Banking and Finance de l’Université de Saint-Gall.

Outlook

Solutions Investissements

  • Interview Cédric Dingens
  • Head of Investment Solutions and Alternative Investments
  • NS Partners

“Hedge funds, un contexte actuel idéal pour la génération d’alpha »

Le 28 novembre, à Genève, au Mandarin, pour célébrer ses cinquante ans de gestion alternative, NS Partners présente un tour d’horizon complet sur cette classe d’actifs, revenue en grâce ces dernières années. Cédric Dingens livre ici un premier aperçu de cet outlook exceptionnel.

Francesco Mandalà

 Quelles raisons vous ont-poussé à organiser ce rendez-vous sur la gestion alternative le 28 novembre à Genève ?

Le moment nous a semblé idéal. Nous fêtons cette année nos cinquante ans dans la gestion alternative. Et les turbulences actuelles redonnent tout leur intérêt à ces stratégies. A la fin 1973, lancer l’un des tout premiers fonds de hedge funds était une véritable révolution. Auparavant, si les hedge funds existaient déjà, ils avaient des seuils d’investissement très élevés et ils étaient notoirement difficiles d’accès.

Les fonds de hedge funds ont donc permis à un public plus large d’accéder aux investissements alternatifs et de profiter de leurs atouts en termes de diversification et de protection à la baisse.  En posant les bases de la sélection de fonds et de la gestion de portefeuilles multi-manager, nous avons donc été parmi les pionniers d’une toute nouvelle industrie, dont Genève est devenu l’un des centres mondiaux.

Quel le contenu de cet Outlook dans les grandes lignes ?

Nous allons nous livrer à un tour d’horizon complet des perspectives de la gestion alternative pour les douze prochains mois. Nous rappellerons pourquoi le contexte actuel, caractérisé par une volatilité accrue, une hausse des taux et une inflation persistante, est idéal pour la génération d’alpha. Nous rappellerons comment l’industrie s’est réinventée, en particulier à travers l’optimisation de la gestion des risques et nous évoquerons les tendances fortes pour l’année 2024. Enfin, nous nous intéresserons à la Chine et à l’Asie en termes de stratégies alternatives.

Pourquoi est-il devenu si difficile d’investir dans le secteur des hedge funds ?

D’abord, contrairement aux marchés boursiers, il n’existe tout simplement pas d’annuaires des hedge funds, ni de base de données exhaustive. Ils sont donc difficiles à repérer d’autant qu’ils sont domiciliés dans un large éventail de juridictions. Une détection rapide des nouveaux fonds est également très importante car ils clôturent souvent après avoir atteint une certaine taille. Il est donc essentiel de bénéficier d’un excellent réseau dans l’industrie. Une seconde raison tient au fait que ces fonds exigent souvent des investissements minimaux parfois assez lourds. Une troisième raison est la liquidité. Ces fonds imposent une période d’investissement minimale pendant laquelle il n’est pas possible de récupérer son argent. De plus, la liquidité est souvent mensuelle, voire trimestrielle, avec des délais de préavis importants.

Enfin, une dernière raison porte sur la complexité des stratégies utilisées par ces fonds. Pour obtenir des résultats positifs dans un large éventail de conditions de marché, leurs gérants recourent à des stratégies non conventionnelles bien éloignées du « buy & hold » traditionnel. Ils se tournent vers des produits dérivés qu’ils combinent dans des stratégies complexes, utilisent des techniques d’arbitrage, pratiquent la vente à découvert ou investissent dans des marchés exotiques comme les matières premières. Il est donc primordial de disposer des compétences nécessaires pour évaluer le bien-fondé de la stratégie choisie.

NS Partners, c’est donc cinquante ans de gestion alternative. Quels grands enseignements en retenez-vous ?

Contrairement à ce que prétendent ceux qui veulent nous vendre des produits indicés, il existe des gestionnaires de talent vraiment capables de faire la différence. Il suffit pour cela de regarder la performance réalisée par Haussmann Holdings depuis son origine : +36’663%. Et, si les temps changent, il y a toujours une relève de nouveaux gérants talentueux qui ne craignent pas de s’aventurer hors des sentiers battus.

Nous avons aussi constaté que les stratégies alternatives ont été un peu délaissées depuis une dizaine d’années car les marchés boursiers ont pratiquement monté sans discontinuer. On peut faire le parallèle avec les assurances, dont on ne voit pas l’utilisé tant qu’on n’a pas eu d’accident, Aujourd’hui, la situation a changé. Les stratégies plus actives et plus aptes à protéger le capital sont redevenues d’actualité.

Dans les grandes lignes, à quoi devrait ressembler 2024 pour la gestion alternative ?

Avec la hausse des taux d’intérêt, les inquiétudes macroéconomiques et le retour de la volatilité sur les marchés, les stratégies long/short devraient à nouveau pouvoir démontrer leur intérêt. De même, des opportunités et des inefficiences semblent émerger dans les thèmes de la transition énergétique et dans le monde des matières premières.

Les données historiques montrent que les gérants de hedge funds obtiennent leurs meilleurs résultats en période de taux d’intérêt élevés, comme ce fut le cas entre 1990 et 2007. Avec des rendements à 5% pour les emprunts à 10 ans, une inflation qui devrait perdurer et des déficits importants, on se trouve donc dans une situation plutôt favorable aux stratégies alternatives. Elles devraient profiter également des tendances majeures que sont la déglobalisation, la transition énergétique et les élections américaines car leurs performances dépendent aussi de la dispersion sur les marchés actions.

 Pour plus d’informations sur l’Outlook du 28 novembre, à l’Hôtel Mandarin Oriental de Genève:

Outlook NS Partners – Sphere

Cédric Dingens

NS Partners

Cédric Dingens dirige le pôle « Investment Solutions & Institutional Clients » de NS Partners. A ce titre, il est membre du comté d’investissement de Haussmann depuis 2016. Cédric a débuté sa carrière à la Banque du Luxembourg en 2001. L’année suivante, il a rejoint Notz Stucki à Luxembourg en tant que gestionnaire de portefeuille. Il a développé le cadre interne de gestion des risques quantitatifs avant d’être nommé responsable de la gestion des risques à Genève en 2010, puis d’être promu à son poste actuel en 2016. Il est titulaire d’un diplôme en finance quantitative de l’École nationale supérieure des mines de Nancy (France) et détient la certification Chartered Alternative Investment Analyst.

Objectif

Solutions Investissements

  • Maad Osta
  • Analyste
  • AtonRà

Finance durable : l’heure n’est plus aux illusions mais à l’action 

Dans le sillage de la SFDR, l’engouement pour les fonds « durables » monte en flèche. Mais derrière le vernis vert, la réalité des investissements n’est pas toujours aussi éthique qu’elle n’y paraît. Maad Osta se penche donc sur la question.

Francesco Mandalà

L’introduction de la réglementation SFDR en mars 2021 a initié une ère nouvelle pour la finance durable, visant à distinguer les véritables initiatives écologiques de l’écoblanchiment. Au cœur de cette réglementation, les fonds Article 9, qui, malgré une récente vague de reclassifications en Article 8, gardent une place significative. Avec 301 milliards d’euros, ils représentaient 3.4% du marché européen à fin septembre, selon un récent rapport de Morningstar. Cette situation interpelle et màne à une question inévitable: les fonds Article 9 sont-ils réellement plus durables dans leurs investissements ?

Le dilemme de la définition : quand durabilité rime avec ambiguïté

L’univers des investissements durables, bien que porteur d’espoirs, est encore empreint d’ambiguïtés et de définitions floues. La notion de «sustainable investment», concept central des fonds Article 9, souffre d’une absence de définition uniforme et précise, laissant place à une multitude d’interprétations qui peuvent varier d’un gestionnaire à l’autre.

Cette nébulosité s’étend aux éléments contraignants, ou « binding elements », qui sont censés ancrer les engagements des fonds en matière de durabilité. Ces éléments soi-disant contraignants manquent souvent de transparence et de quantification, s’appuyant sur des méthodologies internes peu rigoureuses et parfois opaques. Cela explique pourquoi il n’est pas rare de trouver des banques, plateformes d’e-commerce, ou entreprises de paiement dans des fonds Article 9.

L’empreinte carbone en question

L’empreinte carbone, souvent érigée en étalon de l’impact climatique, révèle ses limites en tant qu’indicateur unique de durabilité. Sa principale faiblesse réside dans la difficulté à intégrer les émissions indirectes – ou émissions de scope 3 – qui peuvent constituer la majorité des émissions d’une entreprise. Ces émissions indirectes, qui incluent les émissions liées à la chaîne d’approvisionnement et à l’utilisation des produits, sont complexes à mesurer. Elles souffrent par ailleurs d’un manque d’harmonisation dans les méthodologies de calcul, entraînant ainsi une sous-estimation de l’impact climatique réel des entreprises ou alors des double comptages.

En outre, l’empreinte carbone traditionnelle ne prend pas en compte les émissions évitées, un concept pourtant essentiel dans l’évaluation de l’impact environnemental. Les émissions évitées font référence aux réductions d’émissions résultant de l’utilisation de produits ou services plus écologiques par rapport à des alternatives conventionnelles. Une entreprise qui produit par exemple des batteries pour véhicules électriques, malgré une empreinte carbone élevée due à son processus de fabrication intensif en énergie, joue un rôle crucial dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Elle facilite de toute évidence la transition vers des modes de transport plus propres. En revanche, une entreprise spécialisée dans les paiements en ligne, bien que présentant une empreinte carbone relativement faible en raison de ses opérations numériques, peut contribuer indirectement à des pratiques non durables. C’est le cas notamment de la surconsommation et de l’augmentation des transactions électroniques qui encouragent potentiellement une consommation excessive et un consumérisme rapide.

Cette problématique est illustrée par une analyse récente de Goldman Sachs. Elle révèle que les fonds Article 9 sous-pondèrent  – de -75% en moyenne –  le secteur de la technologie matérielle « Technology Hardware » pourtant essentiel à la fabrication de technologies propres. En parallèle, ces fonds surpondèrent des secteurs moins directement liés à la durabilité, tels que des fonds immobiliers hypothécaires « Mortgage REITs » (+880%) et les produits de loisirs « Leisure Products » (+480%).

Un horizon d’actions, pas d’illusions

L’avenir de la finance durable ne se jouera pas dans les salles de conférence ni dans les déclarations d’intention, mais dans l’arène de l’action concrète et mesurable. Afin d’éviter que les fonds durables ne soient réduits à de simples artifices marketing, une définition rigoureuse et universellement reconnue des « investissements durables » doit être établie, accompagnée d’«éléments contraignants» quantifiables et véritablement significatifs.

Il est essentiel de dépasser les visions réductrices centrées sur l’empreinte carbone pour adopter une approche holistique qui prend en compte l’impact final des produits et services dans le cadre d’une décarbonisation globale. Seule une telle évolution garantira à la finance durable de ne pas être un simple label, mais un véritable moteur de changement en faveur d’un avenir plus vert.

Maad Osta

AtonRâ

Maad Osta a rejoint AtonRâ Partners en 2018 en tant que spécialiste Eergie. Il s’occupe principalement de la recherche fondamentale sous-jacente à l’univers d’investissement de la stratégie « Sustainable Future ». Auparavant, Maad a travaillé en tant qu’ingénieur projet puis gestionnaire de projet au sein d’une société active dans le secteur du gaz et de l’énergie. Maad est titulaire d’un Master en gestion de l’énergie et développement durable obtenu à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne.

Home Sweet Home

Solutions Investissements

  • Aman Kamel
  • Gestionnaire de fonds
  • Trillium

Signes de stabilisation et de légère progression sur le marché suisse

Dans un environnement relativement sain, avec des entreprises qui affichent de solides fondamentaux, le marché suisse voit ses perspectives se dégager en cette fin d’année. Le segment des Small & Mid Caps semble particulièrement attrayant au vu des valorisations qui ont cours.

Francesco Mandalà

En amenant le marché suisse en territoire négatif depuis le début de l’année – l’indice SPI perdait 0,96% fin octobre – le contexte et les indicateurs macroéconomiques délétères prennent le dessus sur les nouvelles microéconomiques. Tant le baromètre avancé KOF que le PMI Industriel révèlent un certain pessimisme. Néanmoins, depuis le mois d’août, ces mêmes indicateurs montrent des signes de stabilisation et de légère progression, tendance qui devrait se confirmer avec les données du mois d’octobre. Les valorisations, plus particulièrement celles petites et moyennes capitalisations deviennent attrayantes, avec un price earnings ratio de 18.6%. Sur ce segment, il est intéressant de noter que la plupart des entreprises n’ont pas fait d’avertissement sur leurs résultats et que les investisseurs ont effacé toute la valeur générée lors de la période post-COVID. Les chiffres d’affaires sont en croissance, au-dessus de ceux réalisés lors de la période pré-COVID.

Les résultats des entreprises au 3e trimestre, déjà publiés, permettent de constater que les discours des chefs d’entreprises redeviennent prudemment optimistes. L’effet de déstockage semble se terminer avec des volumes en amélioration dans la consommation. Dans l’industrie, le creux paraît être passé avec une amélioration sensible de la visibilité pour le 4e trimestre, voir le 1e trimestre 2024 pour les commandes. Il semblerait aussi que la Chine redémarre progressivement mais cela reste à confirmer dans la durée. Les prémices des résultats Q3 montrent l’agilité et la résilience des sociétés suisses à s’adapter rapidement au contexte économique, tout en maintenant ou améliorant leurs marges dans une période d’instabilité et de renforcement du franc suisse. Cependant, après plus d’un an de hausse continue des prix, force est de constater que le « pricing power » commence à s’essouffler.

Quant à l’environnement des taux d’intérêts sur le marché suisse, la valeur actuelle de 1.75% reste un palier confortable pour les sociétés. Cela ne nous semble pas problématique pour la croissance et la rentabilité d’entreprises qui ont pour la plupart des niveaux d’endettements raisonnables.

L’innovation a une importance cruciale pour les sociétés suisses qui continuent de maintenir leurs dépenses d’investissement et de R&D. Il est à relever que ces dépenses R&D dépassent souvent la moyenne mondiale, et donnent ainsi un avantage compétitif décisif. Se positionner sur le savoir-faire suisse, c’est participer par conséquent à une croissance à l’international tout en restant investi en franc suisse.

Une société comme Lonza, leader mondial spécialisée dans la sous-traitance pharmaceutique, a engagé énormément de budget ces dernières années pour augmenter ses volumes de production et devenir le « manufacturing hotel » qu’elle voulait être. Par le passé, la société n’avait pas assez investi et de ce fait manqué des opportunités, ce qu’elle souhaite éviter dans le futur. Malgré un deuxième avertissement sur résultat en l’espace de quelques mois et le départ du directeur général, nous restons convaincus que l’entreprise reviendra sur la voie de l’expansion plus rapidement qu’escompté. En place depuis 2017, le président du conseil d’administration de Lonza connaît parfaitement la société et le management a été renforcé afin d’avoir plus de poids et d’agilité pour gérer la croissance potentielle. Aussi, la visibilité du chiffre d’affaires est de l’ordre de 60% jusqu’à fin 2026 sur la base des résultats de 2023. Les contrats de sous-traitance sont en général entre 3 et 8 ans, ce qui amène à une bonne prédictibilité. La tendance à la sous-traitance pharmaceutique et à la capacité de production sera déterminante pour les prochaines années dans un marché estimé à plusieurs dizaines de milliards.

 

AMAN KAMEL

Trillium

Aman Kamel a rejoint l’équipe de gestion de Trillium en 2022 pour prendre notamment sous sa responsabilité le fonds Manavest Swiss Equity. Auparavant, il a passé plus de 13 ans en tant qu’analyste et gestionnaire de fonds sur le marché suisse et US, au sein de la BCGE, pour la gamme Synchrony. Aman est titulaire d’un diplôme de gestion de fortune et d’une certification en finance durable de l’Institut Supérieur de Formation Bancaire (ISFB).

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Solutions Investissements

  • Maurizio Caputo
  • CEO
  • Bridport

«La dette émergente profite aujourd’hui de ses excellents fondamentaux»

Après avoir énormément souffert en 2022, la dette émergente a retrouvé de l’aplomb cette année. Les investisseurs internationaux redécouvrent ses solides fondamentaux et sa capacité à générer de l’alpha.

Francesco Mandalà

La dette des pays émergents est souvent sous-pondérée dans les portefeuilles, mais elle représente aujourd’hui une part de marché importante en forte croissance au cours des dernières deux décennies. Injustement, elle est toujours considérée comme un pilier tactique plutôt que stratégique. Or, cette classe d’actifs pourrait à nouveau attirer l’attention des investisseurs internationaux à l’avenir.

Extrêmement hétérogène, la dette EM comprend des pays avec des notations de crédit élevées – comme les pays du Moyen-Orient – et d’autres où le risque de crédit reste très élevé. Il en va ainsi de l’Argentine, de la Turquie et de l’Afrique Subsaharienne. Une gestion active est donc essentielle pour gérer risque de crédit et génération d’alpha.

 Sur le marché de la dette EM, trois principaux domaines d’investissement captent la majorité de l’intérêt des investisseurs mondiaux : le marché de la dette souveraine en monnaie forte, le marché de la dette souveraine en monnaie locale et le marché de la dette d’entreprise en monnaie forte.

 Plusieurs éléments lui valent cet intérêt de plus en plus marqué.

 Tout d’abord, les risques d’inflation accrus et des gouvernements plus « dépensiers » ont poussé les rendements obligataires des marchés développés à la hausse, réduisant ainsi l’écart avec leurs homologues EM. Au cours des deux dernières années, la volatilité des rendements des obligations d’État à 10 ans a généralement été beaucoup plus élevée dans les pays développés que dans les marchés émergents. Cela est principalement dû à deux raisons : l’inflation a été un problème plus aigu dans les pays développés, tout comme la détérioration des déficits et des dettes publics. Au contraire, la plupart des marchés émergents a, en règle générale, adopté des politiques plus rigoureuses dans un passé récent.

Au cours des deux dernières décennies, nous avons généralement assisté à une amélioration progressive de la solvabilité moyenne des pays compris dans les indices de référence EM. Les notations de crédit ont généralement convergé vers la catégorie « investissement », notamment tirées par le Moyen-Orient.

L’explication tient à différents facteurs. Le cadre institutionnel a évolué vers les normes adoptées dans les pays développés. La plupart des pays émergents plus avancés ont accru l’indépendance de leurs banques centrales et sont passés à des régimes de ciblage de l’inflation. Les mauvais élèves – Argentine et Turquie- ont payé un lourd tribut pour ces lacunes. Pour les bons élèves, le cadre légal est devenu plus stable et fiable, les régimes de change sont devenus plus libéraux, entraînant une plus grande stabilité des flux de capitaux étrangers.

Autre fait appréciable : de nombreuses banques centrales des pays émergents ont adopté des politiques monétaires proactives en les resserrant plus rapidement et plus énergiquement en 2021-22 par rapport à celles des pays développés. Elles sont désormais en mesure de commencer à réduire leurs taux d’intérêt. C’est plus particulièrement le cas en Amérique Latine, comme au Brésil, où la BCB a déjà commencé à réduire ses taux.

Les autres arguments clés qui plaident en faveur de ces économies sont leur richesse en matières premières – Chili, Pérou et Chine- une dynamique économique plus vigoureuse et une grande disponibilité de main d’œuvre grâce à leur population active jeune, notamment en Inde. Beaucoup de ces économies possèdent non seulement des matières premières traditionnelles, mais abritent également des terres rares et d’autres intrants clés pour les produits technologiques et la « révolution verte ». Ces ressources leur permettront d’accroître leur importance géopolitique, d’attirer des investissements étrangers et d’augmenter leur potentiel économique à long terme.

En termes de valorisations, la dette EM, notamment en monnaies locales, offre désormais un cadre rarement vu au cours des dernières décennies. Après avoir subi l’une des plus importantes corrections depuis plusieurs années en 2022, elle offre désormais des rendements réels historiquement élevés, de la diversification (faible corrélation avec actions et obligations US), tout en donnant accès à des devises très sous-évaluées. Dans un portefeuille largement diversifié, la dette émergente, surtout locale, pourrait donc être très attractive.

 

Maurizio Caputo

bridport & co

Senior managing partner de bridport, Maurizio Caputo en est également le Chief Executive Officer depuis janvier 2019. Fondée voilà maintenant 30 ans à Genève, bridport propose à ses clients un accompagnement dans l’univers du fixed income avec une gamme qui s’étend de la sélection individuelle d’obligations à l’analyse complète d’un portefeuille obligataire, en passant par le conseil en investissement. Avant d’en être nommé CEO, Maurizio a occupé pendant dix ans les fonctions de Chief financial officer de bridport. Diplômé de HEC Lausanne, il a débuté sa carrière chez PricewaterhouseCoopers au sein de la ligne métier Financial services. Ancien auditeur agréé Finma, Maurizio Caputo est membre de l’AICPA.

Digital

Solutions Investissements

  • Marc Amyot
  • CEO
  • Trillium

«100 sociétés du S&P500 ont cité l’IA lors de la publication des résultats»

Trillium, le pôle Asset Management du groupe Citadel Finance, a produit un tracker, le Manavest Digital Futures Index, pour capter les tendances qui animent le monde du digital, en s’intéressant plutôt au segment Small & Mid Caps. Marc Amyot nous en propose un tour d’horizon.

Francesco Mandalà

A quoi ressemble le secteur de la tech aux Etats-Unis en dehors des GAFAM ?

Le Nasdaq 100 et le S&P 500 sont des indices large-cap très populaires composés de noms similaires. Toutefois, au-delà du nombre de titres qui les composent, ils sont différents dans leur allocation sectorielle et pondération. Les 5 du groupe GAFAM représentent 36% de l’indice Nasdaq 100. Les 95 autres sociétés en représentent 64% et elles sont actives dans diverses industries telles que médias, pharma et biotechnologie, transport, alimentation et services.

Quelles sont les tendances majeures qui se dégagent dans ce secteur ?

En 2023, beaucoup d’entreprises utilisent à profusion les termes Intelligence Artificielle et Apprentissage Automatique des Machines dans leur discours. Cette année, un record de 20% des sociétés du S&P 500 ont cité l’IA lors de la publication des résultats du premier trimestre, soit le double de l’année précédente. Elles sont essentiellement présentes dans le secteur des services de communication et des technologies de l’information.

Quelle place prend vraiment le digital aujourd’hui dans la transformation de ces entreprises ?

Suite au buzz autour de l’IA et de la transformation numérique que nous avons connu cette année, les entreprises ont investi massivement dans le digital, quitte à perdre des parts de marché ou à se voir reléguées pendant un temps. Cependant, il y a un grand travail d’analyse à mener pour déterminer dans quelles mesures et à quel stade elles sont réellement engagées dans des activités de transformation digitale. Cette transformation semble irrémédiable, mais il est encore tôt pour déterminer celles qui sont aujourd’hui les plus avancées. Cependant, il est certain que les grands noms traditionnels de la tech en feront partie, car ils ont la taille critique et les moyens financiers pour acquérir et intégrer de nouvelles startups dans leur modèle d’affaires.

Quels effets de la numérisation voyez-vous sur la croissance économique et le monde du travail ?

Les technologies numériques transforment depuis de nombreuses années notre quotidien et nos entreprises. L’arrivée d’UGP superpuissantes – les unités de traitement graphique – ont permis une croissance exponentielle des rapidités de calcul et des capacités de stockage qui sont à la base du développement de l’IA et de l’AAP. Ces technologies devraient offrir un important potentiel pour améliorer la productivité des entreprises et, à terme, notre niveau de vie. Selon le Rapport sur l’avenir de l’emploi 2023 du World Economic Forum, d’ici 2027, 42% des tâches commerciales liées à l’entreprise seront effectuées par des machines et 23% des emplois subiront une mutation notable avec l’adoption des nouvelles technologies.

Comment aborder en ce moment l’univers des digital assets ?

Lorsqu’on parle des actifs digitaux, ce qui nous vient immédiatement à l’esprit, c’est le Bitcoin, l’Ethereum ou un NFT arborant une tête de singe sous dix mille formats. Or, cet univers est bien plus étendu. Nous nous positionnons en investissant dans des sociétés d’exploitation minière de crypto cotées en bourse, ainsi que dans de petites et moyennes entreprises pionnières dans différents domaines. C’est le cas par exemple de l’analyse des données de masse, de la cybersécurité, du cloud, des logiciels IA ou encore des applications IA à la robotique domestique.

Qu’en est-il est développements de la blockchain, indépendamment des crypto-monnaies ?

La technologie de la blockchain est en plein essor. Je rappelle que la blockchain est une technologie de registre numérique décentralisé et distribué, qui enregistre des transactions sur un réseau d’ordinateurs de manière ultra-sécurisée, transparente et immuable. C’est en fait une chaîne de blocs, et chaque bloc contient une liste de transactions. Une fois qu’un bloc est terminé, il est lié au bloc précédent, formant ainsi une chaîne continue. L’utilisation de la technologie blockchain élimine les intermédiaires, car les interactions ont lieu directement entre l’acheteur et le vendeur. Le processus est ainsi rendu plus efficace, ce qui permet d’économiser du temps et de l’argent. La technologie Blockchain s’étend au-delà des crypto-monnaies et trouve des applications dans divers secteurs, tels que : la gestion des chaînes d’approvisionnement, la gestion des dossiers médicaux, la programmation des contrats intelligents ou la production d’identité digitale décentralisée. De très nombreuses applications qui simplifieront notre quotidien, aussi bien sur le plan personnel que professionnel, apparaitront à terme.

 

Marc Amyot

Trillium

Fondateur de Trillium en 2002, Marc Amyot en est depuis lors l’administrateur délégué, assurant aussi la direction générale. Outre ses fonctions dirigeantes, il est membre du comité d’investissement et gestionnaire de fonds. Avant de créer Trillium, Marc a travaillé pour de grands établissements bancaires et compte ainsi plus de 25 ans d’expérience de l’investissement.
Spécialiste de l’allocation tactique d’actifs et des arbitrages de marché, Marc est diplômé de l’Université de Western Ontario au Canada. Il a été, pendant plus de 5 ans, membre de la direction de l’organisme d’autorégulation de l’Association Suisse des Gérants de Fortune (ASG) et du comité romand.