Masters
Arnaud Dubois
Matis
L’art contemporain renforce son statut de valeur refuge
Composée à l’origine du Brésil, de la Russie, de l’Inde et de la Chine, l’alliance élargie des BRICS+ voit ses pays bénéficier d’une croissance rapide dans des secteurs à forte valeur ajoutée comme la technologie, l’approvisionnement énergétique, les matières premières avec, qui plus est, une productivité assez impressionnante. Leur capacité à stimuler la croissance est telle qu’elle oblige les investisseurs à revoir leurs stratégies en profondeur.
Ces trente dernières années, notre approche de l’investissement a reposé sur le libre-échange, la mondialisation et la paix dans le monde, assurée dans le cadre d’un système international dirigé par l’Occident. Ces trois dynamiques, qui ont régi l’ordre mondial après la guerre froide, ont favorisé la libre circulation des marchandises, des capitaux, des personnes et des informations, tout en permettant d’éviter des conflits systémiques entre puissances rivales.
Mais elles ne peuvent plus être considérées comme acquises à l’heure où l’ordre géopolitique et économique mondial subit des changements majeurs, et elles sont même remises en cause.
C’est dans ce contexte que la coalition des BRICS+ est apparue, et qu’elle s’impose progressivement face au G7 du fait de la montée de la polarisation, en donnant à ses membres – les pays du Sud global insatisfaits du système international tel qu’il existe aujourd’hui – la capacité d’exercer leur souveraineté et leur influence. Cette alliance s’affirme aussi peu à peu en tant qu’entité: elle organise ses ressources collectives et ses marchés pour défier le système international dirigé par l’Occident.
L’essor des BRICS+ nous invite à prendre du recul et à faire le point sur notre pratique de la gestion d’actifs, d’autant que, si l’on en croit notre analyse, cette alliance montante et la fracturation croissante de l’ordre mondial auront de profondes répercussions sur notre approche de l’investissement, ainsi que sur la catégorisation des classes d’actifs.
Nous sommes habitués à répartir les actifs entre les marchés dits développés et les marchés dits émergents. Les premiers sont généralement réputés très liquides, avec un risque politique faible, un PIB par habitant élevé, des technologies de pointe et des exportations dynamiques dans une grande diversité de secteurs. Les seconds sont quant à eux considérés comme générant une croissance potentielle dynamique, mais ils sont moins liquides et offrent des opportunités d’investissement plus limitées, en plus de comporter un risque politique et un risque de volatilité accrus.
Le monde actuel, de plus en plus fracturé, est caractérisé par une multiplication des barrières commerciales, des marchés plus segmentés et l’altération des facteurs traditionnels de soutien à la croissance. Voilà qui incite les gérants à revoir la manière dont ils identifient les opportunités d’investissement dans un monde de plus en plus structuré autour de thématiques, qui ne sont plus l’apanage des marchés développés ou émergents.
Dans cette nouvelle réalité, les opportunités d’investissement résulteront des grands leviers de croissance: la technologie, l’approvisionnement énergétique, les matières premières/ressources, ou encore les écarts de productivité. Ces facteurs revêtaient certes déjà de l’importance, mais leur nature évolue. La technologie d’aujourd’hui dépend des semi-conducteurs et de l’intelligence artificielle (IA). L’approvisionnement énergétique concerne à présent les combustibles fossiles, les énergies renouvelables et le nucléaire. Les matières premières et les ressources comprennent les terres rares et les minerais convoités pour accompagner les innovations et la transition verte. Et les écarts de productivité résultent désormais principalement des avancées dans l’IA ainsi qu’en matière de robotique. On assiste dès lors à une redéfinition des relais de croissance et de leur importance.
Ces changements modifient le classement des économies et de leurs secteurs d’activité, et nous imposent d’adopter une approche thématique de l’exposition des pays aux facteurs qui porteront leur croissance. Certains pays du G7 et membres des BRICS+, qui possèdent par exemple des ressources naturelles, ont une longueur d’avance sur les autres: la Chine domine ainsi largement la production de minerais et de terres rares critiques pour la transition verte. Leur contrôle des routes commerciales maritimes, leurs ressources énergétiques et leurs capacités militaires pourraient aussi aider les BRICS+ à acquérir de l’ascendant. En parallèle, certains pays développés ne pourront plus compter sur les sources de croissance qui leur ont permis d’arriver là où ils en sont aujourd’hui.
En conséquence, parallèlement à l’essor de la coalition des BRICS+, les puissances économiques rivalisent pour exploiter les matières premières et les ressources qui seront essentielles pour soutenir leur croissance ces prochaines années. Les ambitions du président Trump concernant le Groenland s’inscrivent par exemple dans ce contexte. Grâce à leurs vastes ressources naturelles, objet de toutes les convoitises, les BRICS+ bénéficieront de solides sources de croissance dans le monde divisé de demain. De la même manière, le contrôle des routes commerciales leur donnera plus de poids, ce qui explique l’intérêt de l’administration Trump pour le canal de Panama – l’un des rares points de passage maritime stratégiques sur lesquels les BRICS+, et notamment la Chine, n’ont pas la mainmise.
Si la coalition parvient à tirer pleinement parti de tous les leviers et moyens d’action dont elle dispose, la croissance supérieure que certains de ses membres enregistrent déjà pourrait profiter à un groupe plus large de nations en développement, et ainsi favoriser leur émancipation du système commercial à l’occidentale.
L’alliance des BRICS+ a tenté de mettre en place des institutions pour l’accompagner dans sa transformation. Elle a notamment créé la Nouvelle Banque de développement (New Development Bank, NDB) – banque multilatérale dont la vocation est de participer au financement de la construction d’infrastructures et au développement de ses Etats membres –, et a instauré des systèmes de paiement pour contourner les processus existants, qui reposent principalement sur le dollar. De tels dispositifs ont permis aux membres d’éviter les lourdes sanctions imposées par les Etats-Unis et l’Union européenne.
Mais il manque un élément à la coalition qui finira par freiner sa croissance: sa propre monnaie de référence. D’après notre analyse, il faudra sans doute attendre au moins dix ans avant qu’une alternative viable vienne rivaliser avec les devises occidentales dominantes (USD, EUR, GBP, CHF, JPY). Jusqu’à présent, les efforts déployés par les pays développés pour entraver l’essor des BRICS+ ont surtout concerné les tarifs douaniers, mais ils ont engendré un phénomène de substitution: les échanges commerciaux ont nettement progressé entre les économies en développement.
L’évolution de ces dynamiques économiques justifie de revoir en profondeur notre approche de l’investissement, ainsi que notre manière de définir et de classer les actifs. La polarisation et la fragmentation croissantes de l’ordre économique mondial engendreront plus de volatilité, tout en limitant la liquidité. Elles pourraient aussi alimenter l’inflation, les deux blocs rivaux s’efforçant de devenir indépendants les uns des autres, ce qui se traduirait par un dédoublement des processus et de l’expertise au sein de chacun de ces blocs. Il faut également s’attendre à ce que le capital soit plus coûteux et moins disponible: on peut en effet imaginer qu’il circulera principalement dans chaque bloc plutôt que librement à travers le monde.
Dans un environnement où les relais de croissance seront de plus en plus thématiques et où les divisions s’accentueront entre deux principaux blocs, la cotation en bourse pourrait devenir accessoire pour les entreprises cherchant à protéger leur propriété intellectuelle. Les entreprises cotées et non cotées donnant accès à des segments distincts du marché, une approche multi-actifs sera sans doute plus adaptée pour tirer parti des opportunités de croissance offertes par les deux types d’entités, plutôt qu’une exposition spécifique à chacune.
Les règles du jeu telles que nous les avons connues ces dernières décennies ont changé, et suggèrent d’adopter une approche d’investissement plus thématique et plus active – et donc moins passive.
Maria Vassalou
Pictet Research Institute
Maria Vassalou a rejoint le groupe Pictet en janvier 2024 pour créer et diriger le Pictet Research Institute. Elle était auparavant co-Chief Investment Officer de l’équipe Multi-Asset Solutions chez Goldman Sachs Asset Management. Elle a également été associée et gérante de portefeuille chez Perella Weinberg Partners, gérante global macro chez SAC Capital et responsable des stratégies d’investissement global macro chez Soros Fund Management.
Avant sa carrière dans la gestion d’actifs, Elle était professeure associée en finance à la Columbia Business School. Maria Vassalou est titulaire d’une licence en économie de l’Université d’Athènes et d’un doctorat en économie financière de la London Business School.
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La résurgence des tensions commerciales a ravivé les pressions inflationnistes et accentué les divergences de politiques monétaires entre États-Unis et Europe. Si l’environnement reste empreint d’incertitudes, les rendements du marché du crédit et les fondamentaux toujours solides des entreprises continuent d’offrir des perspectives attrayantes aux investisseurs.
La perspective de baisses des taux généralisées a été rattrapée par une réalité géopolitique plus complexe. Les tensions commerciales, liées à la l’introduction de nouveaux droits de douane par les États-Unis, ont notamment ravivé les tensions inflationnistes, engendrant une hausse des taux longs et des craintes sur la dynamique économique américaine. Les anticipations d’inflation à un an dépassent désormais 3,3 % et l’incertitude se renforce au regard de la volatilité des indicateurs économiques.
Dans ce contexte, la Réserve fédérale américaine demeure prudente, au grand dam de Donald Trump. Le locataire de la Maison Blanche a même décidé d’engager un bras de fer avec le président de la Fed, qu’il a lui-même nommé lors de son précédent mandat. Powell reste, pour l’heure, inflexible et maintient le statu quo, jugeant la situation économique peu propice à un assouplissement monétaire. Le marché du travail américain est robuste, alors que les entreprises continuent de publier des résultats de bonne facture et n’ont pas encore infléchi leurs politiques salariales. En conséquence, une spirale prix-salaires semble s’installer durablement et les investisseurs qui anticipaient quatre baisses de taux en début d’année, n’en n’envisagent désormais plus que deux.
Parallèlement, le creusement du déficit budgétaire américain et le resserrement quantitatif initié par la Fed depuis 2022 entraînent une explosion de l’offre nette d’obligations d’État. Près de 30 % de la dette américaine devra être refinancée en 2025, un niveau supérieur à la moyenne historique qui se situe autour de 22 %, alors que la notation du pays vient récemment d’être dégradée. Avec un taux directeur actuellement entre 4,25 % et 4,75 %, la soutenabilité de cette dette pose question et les rendements obligataires se tendent. Les investisseurs étrangers, Chine en tête, semblent se détourner de cette classe d’actifs et la pression sur les taux longs s’accentue, alimentant les craintes d’un désengagement plus large des investisseurs internationaux. La confiance dans la devise américaine pourrait elle-même s’éroder.
La divergence de politiques monétaires s’est renforcée au cours des derniers mois à mesure que la BCE continuait de baisser ses taux, maintenant son rythme de croisière. Après une dernière baisse en juin, une nouvelle est encore attendue d’ici la fin de l’année. De surcroît, les plans de relance allemand et européen ont engendré un sursaut de la Zone. Bien que molle, la dynamique économique européenne se maintient. Les besoins de financement vont croissants et soutiennent les taux longs entrainant une pentification de la courbe.
Alors que la soutenabilité des dettes souveraines interroge, les entreprises affichent des fondamentaux solides susceptibles de leur permettre d’encaisser de potentiels chocs macroéconomiques. Depuis le début de l’année, les investisseurs ont donc tendance à favoriser le crédit. Les taux encore élevés associés à la prime spécifique leur permettent d’obtenir un niveau de rémunération supérieur à la dette d’État.
Dans cet environnement, nous maintenons un positionnement prudent et opportuniste. Le marché nous semble peut-être trop optimiste face aux derniers revirements de Donald Trump sur le report de l’application des droits de douane. Ces derniers restent plus élevés qu’avant à son arrivée au pouvoir et nous attendons de voir ce qu’il adviendra une fois la pause de 90 jours arrivée à son terme. Nous restons, en conséquence, vigilants vis-à-vis des secteurs les plus exposés aux tensions commerciales, comme l’automobile. Par ailleurs, nous conservons une exposition importante aux financières que nous avons eu tendance à renforcer suite à la correction du mois d’avril. Nous restons convaincus du potentiel de cette classe d’actifs au regard de la solidité des fondamentaux des acteurs du secteur.
Nous avons progressivement baissé la sensibilité de nos portefeuilles à mesure que les taux baissaient. Par ailleurs, nous avons allongé les maturités au gré des souscriptions pour éviter de se laisser diluer et profiter de la pentification des courbes. Nous estimons qu’au sein du segment Investment Grade, les obligations les mieux notées de maturité 5 à 10 ans offrent les meilleures opportunités grâce au rendement excédentaire qu’elles permettent de capter. Le portage rend cette classe d’actifs naturellement attractive et la décorrélation entre les spreads et les taux modère sa volatilité car chaque effet se compense.
Nous considérons donc la situation actuelle comme relativement confortable. Le crédit reste cher, en dépit de l’épisode de volatilité d’avril dernier, mais les rendements demeurent attractifs grâce au niveau des taux. Les fondamentaux des entreprises sont solides, les flux sont présents, notamment sur l’Investment Grade, et des opportunités émergent ponctuellement. L’incertitude ambiante, bien qu’elle nous pousse à rester prudents, en raison notamment des risques d’escalade dans la guerre commerciale, génère des opportunités. Cette situation justifie que nous conservions des poches de liquidité pour nous positionner rapidement lorsque les valorisations deviennent plus attractives. Dans un environnement où les effets d’annonce précèdent souvent les impacts réels, la discipline et la réactivité restent nos meilleurs atouts.
Emmanuel Petit
Rothschild & Co Asset Management
Emmanuel Petit a débuté sa carrière en 1998 chez HSBC Asset Management comme analyste dans le domaine de l’attribution de performances AIMR-GIPS puis il est devenu analyste crédit en 2001. En 2006, il rejoint Rothschild & Co Asset Management en tant que gérant obligataire sur les obligations privées. Il en est responsable de la gestion obligataire depuis 2011. Emmanuel est diplômé d’un mastère spécialisé en Finance d’entreprise et membre de la SFAF (Société Française des Analystes Financiers).
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L’intérêt pour les marchés privés n’a pas faibli en 2025, stimulé par un potentiel de rendements attractifs, une plus grande diversification et un éventail d’opportunités plus large. Reste à savoir comment s’assurer d’un dosage optimal. Supriya Menon propose quelques éléments de réponse.
Si les marchés privés captivent autant, c’est avant tout grâce au potentiel de prime de rendement liée à leur illiquidité et leur complexité, entre autres facteurs. Moins faciles à acheter et à revendre, ces actifs offrent historiquement des performances supérieures aux marchés publics, rémunérant ainsi ceux qui acceptent de prendre les risques associés.
Mais cette prime n’est pas le seul attrait. Les actifs privés permettent aussi d’investir dans des segments habituellement hors de portée des marchés cotés, tels que les startups en phase pré-IPO ou les entreprises en capital-risque avancé. À l’heure où les small caps cotées se raréfient, ces opportunités deviennent précieuses. Toutefois, la prudence est de mise. La faible volatilité apparente des actifs privés ne constitue pas forcément une protection contre les turbulences du marché. Elle résulte principalement de la moindre fréquence des transactions enregistrées sur ce type d’actifs.
Reste donc à déterminer la manière la plus efficace d’intégrer ces investissements dans un portefeuille. Dans notre cas précis, il s’agit de structures fermées plutôt que de structures evergreen. Pour cela, une approche en trois étapes permet un calibrage optimal.
La première est cruciale. Elle consiste à évaluer sa capacité réelle à gérer l’illiquidité. Cela dépend directement des flux de trésorerie futurs, des contraintes réglementaires et de la complexité opérationnelle de gestion. Un portefeuille qui doit constamment dégager des liquidités pour honorer ses passifs aura naturellement moins de marge de manœuvre qu’un autre exclusivement orienté vers la croissance du capital. Les exigences réglementaires telles que les ratios de liquidité pour les banques ou les fonds propres requis pour les assureurs imposent également une vigilance particulière. Enfin, il faut prendre en compte la complexité opérationnelle des marchés privés, car ces investissements nécessitent des ressources internes importantes et une gouvernance rigoureuse.
Une fois déterminée la limite supérieure d’illiquidité, vient la question clé du rendement. Votre portefeuille a-t-il besoin de ces rendements excédentaires ? Pour répondre, il faut se demander si les objectifs du portefeuille peuvent être atteints sans ces actifs privés. Dans nos modèles, nous supposons que, par rapport aux marchés publics équivalents, ces actifs peuvent offrir une prime de 2 % pour la dette privée et de 3 % pour le capital-investissement. L’enjeu est d’évaluer objectivement si ces primes sont réalistes et suffisantes au regard du risque encouru.
Enfin, la troisième étape concerne la capacité concrète à accéder efficacement à ces investissements privés, à les sélectionner et à les gérer. Dans cet univers, l’accès aux meilleurs gestionnaires fait toute la différence, même si elle n’est pas garantie, tout comme la capacité à structurer, gérer et diversifier les allocations sur plusieurs millésimes à grande échelle. Historiquement, les rendements varient fortement d’un gestionnaire à l’autre, plaçant ainsi la sélection au cœur de la performance. Disposer d’une solide expertise interne ou externe pour identifier, choisir et suivre rigoureusement ces investissements s’avère donc déterminant. Il est également important de maintenir une cohérence stratégique dans le temps, malgré les fluctuations des cycles économiques.
En somme, dimensionner correctement une allocation aux marchés privés ne relève pas seulement de calculs financiers : c’est une équation subtile intégrant les contraintes d’illiquidité, les objectifs précis de rendement et les capacités réelles en matière de gestion et de sélection.
Cette approche structurée, adaptée aux spécificités des investisseurs professionnels, permet d’aligner au mieux les allocations en marchés privés avec des objectifs stratégiques de long terme. L’ambition est claire : maximiser la performance tout en maîtrisant les risques, pour faire des investissements privés un atout stratégique durable.
Supriya Menon
Wellington Management
Supriya Menon est responsable de la stratégie Multi-Actifs EMEA chez Wellington Management. Dans ce rôle, elle conseille les clients sur l’allocation stratégique et développe des solutions d’investissement multi-actifs sur mesure. Avant de rejoindre Wellington Management en 2022, elle a été pendant près de 10 ans stratège senior multi-assets chez Pictet Asset Management, où elle a piloté la stratégie d’allocation d’actifs pour des fonds institutionnels et wholesale. Supriya a aussi occupé des rôles similaires chez Aviva Investors et Lehman Brothers, après avoir commencé sa carrière chez Morgan Stanley.
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Alors que la finance durable s’impose indiscutablement, malgré quelques soubresauts, une ressource essentielle reste étonnamment absente des radars : l’eau. Pourtant, la pression croissante exercée sur cette ressource — entre stress hydrique, pollution et conflits d’usage — constitue un risque systémique pour les entreprises comme pour les investisseurs. Analyse de Brewen Latimier.
Les chiffres sont sans appel : 2,4 milliards de personnes vivent déjà sous un stress hydrique sévère selon le World Resources Institute. Le Forum Economique Mondial avance quant à lui que 50 % du PIB mondial dépend directement d’un accès sûr à l’eau. Et les entreprises interrogées par le Carbon Disclosure Project estiment à plus de 15 milliards de dollars les pertes financières liées à l’eau pour la seule année 2023. Si rien ne change, 40 % des besoins mondiaux en eau ne seront pas couverts d’ici 2030.
Pour les gestionnaires d’actifs, cela signifie que certains investissements – même jugés résilients sur le plan climatique – peuvent en réalité être exposés à des risques hydriques majeurs, avec des impacts directs sur la performance financière et la valorisation long terme.
La Suisse n’est pas épargnée. Nestlé Waters fait aujourd’hui face à une enquête pénale liée à sa gestion de la ressource à Henniez, et subit des restrictions d’exploitation croissantes en France. Plus largement, l’Europe connaît déjà des épisodes de stress hydrique récurrents, qui impactent les chaînes d’approvisionnement de secteurs clés : agroalimentaire, chimie, semi-conducteurs, énergie ou immobilier.
Pour mémoire, les inondations dans le Valais en 2024 ont perturbé l’activité d’un fournisseur de Porsche, entraînant une perte estimée à un milliard d’euros. Ces exemples montrent que l’eau ne relève plus de la philanthropie environnementale : elle est devenue une variable stratégique de gestion des risques, y compris pour des groupes cotés détenus dans les portefeuilles de clients privés.
La Suisse, place forte de la gestion durable, a un rôle pionnier à jouer. Face à des clients de plus en plus sensibles aux risques ESG et à la robustesse de leurs portefeuilles, intégrer l’eau dans l’analyse des actifs permet de se différencier tout en protégeant la performance.
Cela implique une triple évolution :
D’abord, intégrer les risques physiques, réglementaires et réputationnels liés à l’eau dans les due diligences. Ensuite, utiliser les outils de mesure déjà disponibles – données satellites, rapports CDP, Water Risk Atlas, scénarios de stress hydrique – pour affiner l’évaluation des actifs. Enfin, identifier les entreprises non seulement résilientes, mais aussi innovantes en matière de gestion ou de traitement de l’eau, qui incarneront les leaders de demain.
Les données existent mais ce qu’il manque, c’est une structuration de ces données dans les modèles d’analyse et de valorisation. Intégrer le coût de l’eau – ou son absence – dans les prévisions de cash flow, aligner stratégie d’investissement et résilience hydrique, ou encore identifier les entreprises porteuses de solutions durables : telles sont les pistes à explorer pour que l’eau devienne un véritable levier de performance.
Les Chief Investment Officers et les conseillers patrimoniaux doivent aujourd’hui penser l’eau non plus comme une simple contrainte environnementale, mais comme un paramètre économique fondamental. Une entreprise qui dépend fortement d’un accès à l’eau, sans stratégie de gestion durable, est une entreprise à risque – même si ses résultats actuels semblent solides.
C’est ici que le rôle du Chief Sustainability Officer devient stratégique. Le CSO n’est plus seulement garant de la conformité ESG ou des rapports extra-financiers : il devient un partenaire clé dans l’évaluation des risques matériels, en lien direct avec les décisions d’investissement. En collaboration avec les CIO, il peut identifier les zones de vulnérabilité hydrique, anticiper les régulations émergentes, intégrer les scénarios de stress dans l’allocation d’actifs et orienter les flux vers des entreprises capables de transformer cette contrainte en avantage compétitif.
Dans le contexte suisse, où la précision, la rigueur et l’anticipation sont des valeurs centrales de la gestion privée, ce tandem CSO–CIO est appelé à devenir un levier de performance différenciante. Car demain, la robustesse d’un portefeuille ne se mesurera plus seulement à sa rentabilité, mais aussi à sa résilience face à des chocs systémiques, comme ceux liés à l’eau.
Enfin, intégrer l’eau dans les portefeuilles est aussi une réponse aux attentes des clients fortunés de la nouvelle génération. Ceux-ci recherchent des placements alignés avec leurs valeurs, mais qui leur permettent aussi d’anticiper les grandes transitions systémiques à venir. Le risque hydrique en fait clairement partie.
L’eau ne peut plus être considérée uniquement comme un enjeu environnemental. Pour les wealth managers suisses, leaders aujourd’hui reconnus de la gestion durable, l’intégration stratégique de l’eau dans l’analyse financière et patrimoniale est l’occasion de concilier performance, anticipation des risques et excellence en matière d’investissement responsable. Sa rareté ou sa mauvaise gestion peut faire vaciller des business models entiers. A l’heure du changement climatique, gérer durablement l’eau, c’est aussi gérer durablement les actifs.
Brewen Latimier occupe les fonctions de Manager chez Colombus Consulting, où il est en charge du secteur des services financiers pour la Suisse. Il a plus de 15 d’expérience dans ce secteur. Après un début de carrière dans la direction financière d’une banque, il a rejoint le monde du conseil où il participe à de nombreux projets de transformation digitale à travers l’Europe et la Suisse pour des institutions financières. Il a récemment mis en place différentes stratégies digitales et data pour ses clients.
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Ces dernières semaines, SPHERE a mené une enquête approfondie sur le thème du private equity auprès de sa communauté de gérants indépendants, de banquiers privés et de family officers. En voici les résultats exclusifs qui mettent en lumière les grandes tendances, les freins identifiés et les dynamiques en cours.
Dans un contexte de mutation profonde des marchés financiers, le private equity s’impose comme une classe d’actifs incontournable. Avec près de 5’500 milliards de dollars d’actifs sous gestion dans le monde (Preqin 2024), il constitue une porte d’entrée vers l’économie réelle. Une enquête de Nuveen indique que plus de 90 % des investisseurs mondiaux détiennent en 2025 des investissements en private equity et crédit privé, contre 45 % en 2022.
Une classe d’actifs en progression, mais encore marginale
En Suisse, la part moyenne du private equity dans les portefeuilles des caisses de pension reste modeste, à 1,7 % en 2023 selon Swisscanto, bien loin des standards nord-américains. Pourtant, l’offre se diversifie et attire de nouveaux profils, notamment des investisseurs privés fortunés, grâce à l’essor des fonds semi-liquides, des solutions evergreen et des structures de co-investissement ou de secondaire.
Les gestionnaires de fortune suisses manifestent un intérêt accru pour le private equity, comme en témoigne Elisa Amar, Head of Private Markets chez Hottinger. “Il y a encore peu, les métiers du private equity n’existaient pas ou peu dans les sociétés de gestion de patrimoine. Les connaissances des marchés privés n’ont rien à voir avec le marché public, en termes d’analyse, d’accès, de due diligence même si les deux mondes se connectent. Mais depuis quelques années, ces métiers se renforcent”.
Selon le rapport VSV-ASG Investment Pulse 2024, bien que les allocations directes restent limitées, une tendance vers des investissements thématiques et alternatifs se dessine, notamment dans les secteurs de la technologie et de la santé. En 2024, le secteur suisse des biotechnologies a levé plus de CHF 2,5 milliards, soit une hausse de 22 % par rapport à 2023. “Le secteur de la santé performe bien en raison de la demande constante et des bonnes performances historiques des fonds”, souligne François Rostand, managing partner de Florestan.
Matthieu Horras, co-founder et CEO de Aspivix, constate lui-aussi cette évolution, tant des mentalités que des structurations. “Dans le secteur de la santé en Suisse, on trouve principalement des fonds d’amorçage, précise-t-il. Néanmoins, les fonds de croissance pour les sociétés avec des CA déjà établis, d’environ 5 millions de francs, se solidifient. C’était traditionnel aux Etats-Unis, mais cela n’existait pas en Suisse.” Il constate néanmoins un creux entre fonds d’amorçage et fonds de croissance. “Dans notre secteur, celui de la santé de la femme, les fonds spécialisés se trouvent plutôt aux Etats-Unis. Les fonds d’amorçage financent les études cliniques, mais pas la production du produit et sa mise sur le marché. C’est la partie compliquée. C’est là qu’il faut avoir de bons investisseurs dans l’amorçage, capables de faire des tours de suivis.”
Le dynamisme est réel, les attentes aussi. Mais aussi prometteuse soit-elle, cette classe d’actifs reste encore largement perçue comme complexe. Pour Sébastien Leutwyler, managing partner et CIO chez Capitalium Advisors, il y a un véritable enjeu d’éducation et de pédagogie. “Il faut aider le client, l’accompagner dans la compréhension du bilan, des phases, des cycles, explique Sébastien. Les problématiques d’appel et de retour de capitaux ne sont pas usuelles, la manière de suivre son investissement, les performances non plus. Il y a également un décalage temporel entre l’actualité et son impact sur la société, entre 6 mois et un an.” Cet accompagnement est pour lui nécessaire et naturel car le private equity est un “outil patrimonial fantastique qui porte en lui la notion de temps long. Les actifs transformationnels, par nature cela prend 10 ans”. Il considère faire du “old-school”, proposant à ses clients “des belles histoires qui vont permettre de multiplier par deux l’investissement initial.” Et d’ajouter : “si on se lance dans le private equity, il faut y aller : c’est 20% du portefeuille qui fait de l’impact.”
Un marché en mutation : entre promesse d’accessibilité et complexité réglementaire
Les fonds evergreen connaissent une dynamique contrastée. En effet, ces fonds sans date de fin fixe offrant une certaine liquidité semblent attirer de nouveaux investisseurs. Leur nombre global progresse : 531 fonds evergreen en 2024, soit +8,4 % par rapport à 2023. Ils représentent désormais environ 5 % des encours mondiaux en private equity, soit 700 milliards de dollars, avec l’ambition d’atteindre 20 % d’ici dix ans, comme l’anticipe Hamilton Lane.
Cette croissance est tirée par les clients fortunés qui disposent d’un patrimoine supérieur à 1 million de dollars. Leur nombre a triplé entre 2000 et 2023, année où leur fortune s’est élevée à 214’000 milliards de dollars, d’après le UBS Global Wealth Report, soit près de la moitié de la richesse mondiale. Les « mass affluent », freins réglementaires obligent, ne participent cependant que très peu à cette croissance.
Du côté des fonds de continuation, le marché est en train d’exploser. En Europe, le marché a pris 67% entre 2023 et 2024. “Ces fonds représentent aujourd’hui une sortie sur dix en private equity, ce qui est déjà très important, d’après François Rostand, expert dans ce domaine. Et les spécialistes du secteur s’accordent à dire que nous en serons à une sortie sur cinq d’ici à 2030. Ce qui est colossal. Cela veut dire que les fonds de continuation se sont complètement normalisés.” Et de préciser que là où le secondaire traditionnel implique des portefeuilles diversifiés, les fonds de continuation mettent l’accent sur l’importance de la sélection des deals dans les fonds de continuation. Il note néanmoins que les investisseurs préfèrent souvent des options moins sélectives, comme celles proposées par des acteurs du secondaire. “Il faudra du temps pour que les investisseurs reconnaissent la valeur de la sélection dans ce domaine. Les fonds de continuation migrent en effet du multi-assets vers ce que l’on appelle des single assets. Le fonds de continuation n’est investi que dans une seule entreprise. C’est un peu à mi-chemin entre du co-invest ou du deal direct et du secondaire.”
Crise de liquidité : un réveil brutal
Le private equity se trouve confronté à une tension croissante sur la liquidité. En 2024, selon BlackRock, les firmes de private equity détenaient environ 3’600 milliards de dollars d’actifs non réalisés répartis sur 29’000 entreprises. Moins de distribution, effet “bouchon”, pour Elisa Amar, Head of Private Markets chez Hottinger. Si le pourcentage de private equity dans les portefeuilles de leurs clients a considérablement grossi ces dernières années, elle constate néanmoins qu’en 2025, les clients ne sont pas totalement satisfaits. “Il y a beaucoup de sorties retardées ou annulées. On continue encore à bouger les deadlines. Par ailleurs,en termes de DPI, de Distributions to Paid-In-Capital, les investisseurs s’attendaient à plus”.
Pour Jérôme Marie, Deputy CEO de Oddo BHF Asset Management et managing director de Oddo BHF Private Equity, une bonne nouvelle ressort: “la valeur liquidative augmente dans tous les portefeuilles. Cela témoigne de la bonne santé des sociétés en portefeuille, une bonne chose pour les investisseurs. Cependant, cela reflète également l’absence des opérations normales de sorties, ce qui pose problème. Les périodes de détention s’allongent et créent ainsi un frein à la robustesse des rendements, malgré l’augmentation de la valeur.”
Cette baisse des sorties traditionnelles s’est traduite par une hausse des fonds de continuation qui ont représenté environ 14 % des sorties sponsorisées par des fonds de private equity en 2024. Cette accumulation signale une tension croissante entre les GPs et les LPs : les premiers veulent plus de temps, les seconds veulent des retours.
Face à ces défis, plusieurs mécanismes ont été mis en place pour améliorer la liquidité. ”Le marché secondaire a connu une croissance spectaculaire au cours des deux dernières décennies, note Jérôme Marie. D’un marché de 5 milliards de dollars au début des années 2000, il est passé à 160 milliards de dollars l’année dernière, atteignant un nouveau volume de transactions record. À l’horizon 2025, le marché secondaire devrait poursuivre sur cette belle trajectoire. À mesure que les activités de levée de fonds secondaires se renforcent, le marché continue de bénéficier d’un large éventail de facteurs. Il s’agit notamment de la demande croissante de solutions de liquidité, de l’expansion des stratégies secondaires dans les domaines du crédit, des infrastructures, de l’immobilier et du capital-risque, de l’adoption accrue de structures innovantes dans les transactions menées par les GP et les LP, et enfin de l’arrivée de nouveaux acteurs qui stimulent la concurrence.
Jérôme Marie en arrive à la conclusion suivante: “la stratégie secondaire offre un rendement ajusté au risque supérieur, comparé aux autres stratégies de capital-investissement. Elle devrait être la première stratégie à envisager pour quiconque souhaite se lancer dans la constitution d’un portefeuille d’actifs privés.”
Les banques privées : nouveau relais de croissance
Longtemps réservé aux institutionnels, le private equity est aujourd’hui un peu plus proposé aux clients fortunés des banques privées, des tiers gérants et multi family offices grâce à des partenariats avec des gérants spécialisés, mais aussi à la mise à disposition de fonds offrant plus de “liquidité” et des minimums d’entrée plus bas.
Pour JP Morgan, les allocations recommandées tournent entre 10 % et 30 % du portefeuille. Quant aux allocations effectives des investisseurs institutionnels, McKinsey estime qu’elles ont augmenté de 6,3 % en 2020 à 8,3 % en 2024.
Les enseignements de l’enquête SPHERE
Pour mieux comprendre ces dynamiques, SPHERE a interrogé sa communauté d’investisseurs professionnels. Parmi les répondants, plus de 55% déclarent investir en direct, avec ou sans SPV, illustrant leur préférence pour la proximité avec les actifs, et potentiellement une recherche de performance ou d’implication stratégique. 40% s’en tiennent à des fonds ou fonds de fonds. Pourtant, dans une large majorité des cas, le poids du private equity dans les portefeuilles reste inférieur à 5%.
La tendance, toutefois, est à la hausse : plus de 60% des répondants se disent prêts à augmenter leur allocation, notamment si les barrières structurelles (liquidité, minimums d’investissement, durée) sont allégées.
Quelles stratégies ? Quels secteurs ?
L’appétit est marqué pour différentes stratégies : growth capital et buy-out, mais aussi pour le venture capital (cf. infographie pour plus détails). Les thématiques les plus plébiscitées pour 2025/2026 : IA & Cloud (64%), Santé et Biotech (59%), Fintech (41%), Consommation & Distribution (40%)
L’Europe, la Suisse et l’Amérique du Nord restent les zones géographiques de prédilection.
Les freins à l’adoption : expertise, accès, liquidité
Les principaux obstacles à une montée en puissance du private equity sont clairement identifiés par les participants au sondage : le manque de ressources internes pour mener des due diligences approfondies (67 %), le manque de liquidité inhérent à cette classe d’actifs (54 %), la durée de blocage des investissements, jugée trop longue (50 %).
Par ailleurs, la moitié des sondés considèrent les seuils d’investissement minimum comme un frein majeur, soulignant le besoin d’une offre plus souple. S’ajoute également une difficulté récurrente : l’accès aux bonnes opportunités.
Enfin, le facteur temps constitue un autre défi. “Les décisions doivent souvent être prises en quelques semaines. Cette contrainte implique une équipe capable de réaliser une due diligence financière et technique dans des délais resserrés, une compréhension rapide de secteurs parfois complexes et, côté tiers-gérants et banquiers, la capacité de présenter et commercialiser l’opportunité auprès de leurs clients HNWI avant qu’elle ne se referme” explique Olivier Mazeron, co-founder de Seerius. “Ces acteurs ont un besoin d’accompagnement pour accéder aux opportunités réelles et les analyser dans un temps court.” Les équipes de Seerius accompagnent quelques family offices et des tiers gérants dans cette recherche de fondamentaux, que ce soit dans des investissements en direct ou via des fonds en ayant un regard plus avisé auprès des fonds suivis.
“Lorsque le projet entrepreneurial et la stratégie de croissance sont au cœur de l’analyse du conseiller et sélectionneur, les investisseurs se sentent plus près de l’investissement, ils peuvent mieux appréhender les défis et la dynamique de la société cible, relève Pierre-Emmanuel Besnard, expert en la matière. Et du côté de l’entrepreneur, il y a un vrai sentiment d’accompagnement dans son projet et dans sa croissance jusqu’à son exit.”
Vers une délégation partielle ou complète ?
Face à ces défis, les investisseurs suisses expriment clairement leur intérêt pour un accompagnement professionnel. 62% sont prêts à déléguer tout ou partie du sourcing et de l’analyse à un tiers de confiance, quand 68% souhaitent des véhicules bancarisés – avec ISIN – pour faciliter leur exposition en direct.
En résumé
Si le private equity séduit par ses performances et sa capacité à capter l’économie réelle, il reste confronté à plusieurs freins structurels :
Mais attention, le private equity ne peut pas être réduit à une simple promesse de rendement accessible à tous. Sa nature illiquide impose un horizon long, souvent sous-estimé par des investisseurs peu familiers de cette classe d’actifs.
L’histoire récente l’a montré : trop vouloir démocratiser un produit illiquide comporte des risques. Les fonds semi-liquides ou « evergreen » constituent une piste intéressante, mais ils ne sont pas sans limites. En cas de crise, si tous les investisseurs souhaitent sortir en même temps, les mécanismes de liquidité – les fameuses gates – seraient activés simultanément, mettant en péril la structure même des fonds.
Le rôle de SPHERE : accompagner, éclairer, connecter
Ces résultats confortent SPHERE dans sa mission : informer, inspirer et fédérer la communauté d’investissement autour de l’innovation et des grandes transitions économiques.
Pour répondre à cette attente croissante, SPHERE renforcera en 2025 son accompagnement sur le private equity à travers :
En conclusion
Le private equity n’est plus un sujet périphérique pour les investisseurs suisses : il est un levier stratégique de diversification et de performance. SPHERE s’engage à être ce trait d’union entre l’intérêt et l’action, entre les porteurs de capitaux et les porteurs de projets.
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L’évolution du contexte géopolitique a donné un nouvel élan à l’Europe grâce à l’unité retrouvée de la Zone euro et à la fin de l’austérité budgétaire en Allemagne. Cette nouvelle donne devrait profiter plus particulièrement au style Value et aux pays membres de l’Union au travers de secteurs bénéficiant de cette impulsion. Explications.
Qu’est-ce qui a changé pour l’Europe depuis le début de l’année ?
Deux événements majeurs ont marqué le paysage européen au premier trimestre 2025, redéfinissant ses perspectives économiques et stratégiques.
D’une part, le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, accompagné d’une volonté affichée de désengagement militaire au sein de l’OTAN, a agi comme un électrochoc. Face à cette pression, l’Europe a su faire bloc, retrouvant une forme d’unité autour de la défense de sa souveraineté. Résultat : le lancement du plan de défense ReArm Europe par la Commission européenne, doté de 800 milliards d’euros, et un assouplissement des règles budgétaires pour permettre aux États membres de financer cet effort commun.
D’autre part, l’élection du chancelier Friedrich Merz a marqué un tournant historique en Allemagne. Berlin a mis fin à sa politique de rigueur budgétaire, rompant avec le Schuldenbremse, le fameux frein à l’endettement, et a annoncé un plan d’infrastructures de 500 milliards d’euros sur 10 ans, en plus de sa contribution au plan ReArm Europe. L’ampleur de cet engagement budgétaire est sans précédent puisqu’il équivaut, en termes d’effort, à la combinaison du plan Marshall et du plan de réunification.
Pour certains économistes, ce nouveau « whatever it takes » européen pourrait atteindre, d’ici 2030, un impact annuel de +1,5 % sur la croissance allemande et de +0,8 % sur celle de la Zone euro. Une dynamique qui pourrait bien redéfinir la trajectoire économique du Vieux Continent.
La surperformance de l’Europe sur les États-Unis peut-elle se prolonger ?
Depuis le début de l’année, l’Eurostoxx affiche u 16 mai une performance de 14,1 % contre -5,5 % pour le S&P 500. La performance de ces deux indices est par ailleurs équivalente sur trois ans – l’Eurostoxx à +50 % et le S&P 500 à +52 % – et si les projecteurs sont restés braqués sur les Magnificent 7 – +111 % sur 3 ans, toujours au 16 mai -, la performance des valeurs bancaires de la Zone euro a été largement supérieure sur cette même période. Elle s’est élevée en effet à +179 %. Un signal fort du regain de dynamisme de certains secteurs européens face aux géants technologiques américains.
C’est toutefois l’avenir qui suscite le plus notre intérêt. Sur ce point, les trajectoires des États-Unis et de l’Europe semblent diverger. Outre-Atlantique, Donald Trump doit composer avec un déficit devenu difficilement soutenable, ce qui l’oblige à prendre des décisions économiques délicates. À l’inverse, la Zone euro dispose aujourd’hui de marges de manœuvre inédites, fruit de la rigueur budgétaire passée de l’Allemagne et renforcées par le récent plan de réarmement européen. Cette dynamique pourrait bien ancrer durablement la surperformance européenne face aux États-Unis.
À plus court terme, l’environnement de politique monétaire joue également en faveur de l’Europe. L’inflation, plus modérée qu’outre-Atlantique, a permis à la BCE d’abaisser ses taux à 2,25 %, avec déjà trois baisses depuis le début de l’année. La Fed, de son côté, maintient une politique monétaire restrictive, avec des taux toujours autour de 4,5 %. Ce différentiel crée un contexte plus favorable à la croissance en Europe.
Enfin, les flux d’investissement confirment ce regain d’intérêt. Délaissée depuis l’invasion de l’Ukraine, la Zone euro attire à nouveau les investisseurs internationaux. Le mouvement reste encore modeste – les entrées récentes ne représentent qu’un quart des sorties cumulées depuis mars 2022 – mais la tendance est enclenchée. Avec des valorisations toujours attractives et un momentum macroéconomique en train de s’inverser au profit de l’Europe, les conditions semblent réunies pour une accélération de ces flux.
Qu’est-ce qui a changé pour l’Europe depuis le début de l’année ?
Deux événements majeurs ont marqué le paysage européen au premier trimestre 2025, redéfinissant ses perspectives économiques et stratégiques.
D’une part, le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, accompagné d’une volonté affichée de désengagement militaire au sein de l’OTAN, a agi comme un électrochoc. Face à cette pression, l’Europe a su faire bloc, retrouvant une forme d’unité autour de la défense de sa souveraineté. Résultat : le lancement du plan de défense ReArm Europe par la Commission européenne, doté de 800 milliards d’euros, et un assouplissement des règles budgétaires pour permettre aux États membres de financer cet effort commun.
D’autre part, l’élection du chancelier Friedrich Merz a marqué un tournant historique en Allemagne. Berlin a mis fin à sa politique de rigueur budgétaire, rompant avec le Schuldenbremse, le fameux frein à l’endettement, et a annoncé un plan d’infrastructures de 500 milliards d’euros sur 10 ans, en plus de sa contribution au plan ReArm Europe. L’ampleur de cet engagement budgétaire est sans précédent puisqu’il équivaut, en termes d’effort, à la combinaison du plan Marshall et du plan de réunification.
Pour certains économistes, ce nouveau « whatever it takes » européen pourrait atteindre, d’ici 2030, un impact annuel de +1,5 % sur la croissance allemande et de +0,8 % sur celle de la Zone euro. Une dynamique qui pourrait bien redéfinir la trajectoire économique du Vieux Continent.
La surperformance de l’Europe sur les États-Unis peut-elle se prolonger ?
Depuis le début de l’année, l’Eurostoxx affiche au 16 mai une performance de 14,1 % contre -5,5 % pour le S&P 500. La performance de ces deux indices est par ailleurs équivalente sur trois ans – l’Eurostoxx à +50 % et le S&P 500 à +52 % – et si les projecteurs sont restés braqués sur les Magnificent 7 – +111 % sur 3 ans, toujours au 16 mai -, la performance des valeurs bancaires de la Zone euro a été largement supérieure sur cette même période. Elle s’est élevée en effet à +179 %. Un signal fort du regain de dynamisme de certains secteurs européens face aux géants technologiques américains.
C’est toutefois l’avenir qui suscite le plus notre intérêt. Sur ce point, les trajectoires des États-Unis et de l’Europe semblent diverger. Outre-Atlantique, Donald Trump doit composer avec un déficit devenu difficilement soutenable, ce qui l’oblige à prendre des décisions économiques délicates. À l’inverse, la Zone euro dispose aujourd’hui de marges de manœuvre inédites, fruit de la rigueur budgétaire passée de l’Allemagne et renforcées par le récent plan de réarmement européen. Cette dynamique pourrait bien ancrer durablement la surperformance européenne face aux États-Unis.
À plus court terme, l’environnement de politique monétaire joue également en faveur de l’Europe. L’inflation, plus modérée qu’outre-Atlantique, a permis à la BCE d’abaisser ses taux à 2,25 %, avec déjà trois baisses depuis le début de l’année. La Fed, de son côté, maintient une politique monétaire restrictive, avec des taux toujours autour de 4,5 %. Ce différentiel crée un contexte plus favorable à la croissance en Europe.
Enfin, les flux d’investissement confirment ce regain d’intérêt. Délaissée depuis l’invasion de l’Ukraine, la Zone euro attire à nouveau les investisseurs internationaux. Le mouvement reste encore modeste – les entrées récentes ne représentent qu’un quart des sorties cumulées depuis mars 2022 – mais la tendance est enclenchée. Avec des valorisations toujours attractives et un momentum macroéconomique en train de s’inverser au profit de l’Europe, les conditions semblent réunies pour une accélération de ces flux.
Le style Value peut-il bénéficier de ce nouvel environnement ?
Observons d’abord qu’au cours des vingt dernières années, le style de gestion Value tend à surperformer le style Croissance lorsque le marché européen surperforme le marché américain. Cette corrélation s’explique notamment par la structure sectorielle des deux zones : l’Europe reste plus exposée aux secteurs industriels et financiers, tandis que les indices américains sont dominés par les valeurs technologiques. Cette tendance s’est de nouveau confirmée depuis le début de l’année puisque la Value surperforme la croissance de plus de 13 points.
Par ailleurs, si l’on remonte à la fin de l’année 2020 — période marquant le retour d’une meilleure visibilité économique post-Covid — l’écart dépasse désormais 28 points. Cette situation s’explique notamment par la normalisation des taux d’intérêt et son corollaire direct, l’amélioration de la profitabilité des secteurs financiers. Pourtant, malgré cette dynamique, la prime de valorisation des valeurs de croissance reste élevée : environ +90 % par rapport aux valeurs Value, contre une moyenne pré-Covid autour de +65 %. La normalisation de cette prime doit, selon nous, se poursuivre, d’autant que nous évoluons désormais dans un environnement de taux et de politique monétaire totalement différent de celui qui prévalait au cours de la décennie post-crise financière.
À court terme, cela doit s’opérer par la repentification de la courbe des taux qui doit continuer de soutenir les secteurs financiers. À moyen/long terme les plans de relance mentionnés précédemment sont structurellement porteurs pour l’activité de la zone, et soutiendront la croissance de secteurs Value cycliques comme la construction, les matières premières ou encore les équipementiers industriels. La redynamisation de la zone constituera un terreau toujours plus favorable aux secteurs financiers en raison de leur caractère fortement domestique.
Anthony Bailly
Rothschild & Co Asset Management
Anthony Bailly débute sa carrière en audit financier et commissariat aux comptes dans la division moyennes et grandes entreprises dans les secteurs de la télécommunication et des médias chez Arthur Andersen puis chez Ernst & Young (2001 à 2007). Il a intégré Rothschild & Co Asset Management en février 2007 comme analyste financier sur les secteurs de l’automobile, des médias, des technologies et de la communication. En septembre 2016, il devient co-gérant des fonds actions grandes capitalisations pour la zone Euro/Europe. En 2020, il devient Gérant actions et membre du Comité d’Investissement au sein de Rothschild & Co Asset Management. En 2024, il devient Responsable de la Gestion Actions européennes de Rothschild and Co AM. Anthony est diplômé de Kedge Business School Option Finance et d’un DEUG en Sciences économiques de l’université Bordeaux IV.
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