Hedge Funds 2025

Solutions d’investissement

    • Interview Cédric Dingens
    • Head of Investment Solutions and Alternative Investments
    • NS Partners

« La demande pour des stratégies plus sophistiquées, génératrices d’alpha, va croître encore »

Après avoir dressé la semaine passée le bilan des hedge funds pour 2024, Cédric Dingens présente ici ses perspectives pour 2025 et détaille les stratégies qui affichent les meilleurs potentiels dans un secteur en plein évolution.

Par Jérôme Sicard

Pour l’année qui vient, où pensez-vous qu’il soit envisageable d’aller chercher de l’alpha ?

Les stratégies global macro vont continuer à tirer leur épingle du jeu même si cela ne va pas être un long fleuve tranquille. Les stratégies « relative value » sur les taux n’ont pas bien fonctionné cette année et je pense qu’elles devraient reprendre des couleurs en 2025. La combinaison endettement élevé + incertitudes politiques dans certains pays est propice à des mouvements de taux abruptes. En outre, les spreads de crédits ayant atteint des niveaux proches des plus bas historiques dans un contexte de ralentissement économique en Europe, les stratégies « credit long/short » devraient offrir des performances ajustées au risque intéressantes. De manière générale, les ingrédients sont réunis pour que les hedge funds continuent à bien performer : des taux d’intérêts normalisés, une forte dispersion sectorielle et géographique et une volatilité soutenue des différentes classes d’actifs.

A quoi ressemble aujourd’hui l’univers des hedge funds ?

Avec plus de 4’500 milliards de dollars d’actifs, l’univers des hedge funds est dense, varié et intéressant. Les plateformes multi-gérants ont attiré beaucoup d’actifs ces trois à quatre dernières années pour représenter aujourd’hui plus de 20% de l’industrie. Elles allouent de plus en plus de capital à des gérants externes, avec une force de frappe qui n’a jamais été aussi grande dans l’histoire. En témoignent les termes de liquidité plus restrictifs imposés aux investisseurs – on peut y voir ici une forme de convergence entre le monde des hedge funds et le private equity – et les structures de frais « pass-through expenses ». Sur ce dernier point, les investisseurs remboursent directement certaines dépenses spécifiques liées à la gestion et au fonctionnement du fonds, en plus des frais traditionnels de gestion et de performance. La raison est simple : attirer les meilleurs traders. Au final, l’objectif est de bien évaluer si le jeu en vaut la chandelle.

Mais ne nous y trompons pas, nous trouvons des gérants de grande qualité à forte valeur ajoutée dans tout type de stratégie – global macro, equity long/short, event-driven, credit long/short, systematic – avec des tailles diverses. La culture d’entreprise est importante pour que les traders puissent s’épanouir. La connaissance de l’écosystème et la recherche demeurent des éléments clés pour construire un portefeuille de qualité.

Comment voyez-vous évoluer cet univers?

L’industrie des hedge funds est relativement mature mais en constante évolution. Je la vois évoluer favorablement pour plusieurs raisons.

D’abord, nous avons beau constater l’inexorable ascension de la gestion passive et qui se justifie à bien des égards, la demande pour des stratégies plus sophistiquées, génératrice d’alpha et offrant un « confort psychologique » plus grand va continuer à croître. Les clients privés d’une certaine taille ont en général une allocation en gestion alternative.

Deuxièmement, sans préjuger de l’évolution des marchés actions, nous sommes désormais dans un « bull market » qui dure depuis plus de 10 ans. L’histoire nous a montré que des cycles existaient et que nous ne sommes pas à l’abri d’une période plus compliquée. De plus, une bonne partie des stratégies ont un profil qui représente une alternative intéressante à une allocation obligataire et les taux courts sont plutôt sur la pente descendante.

Enfin, la réglementation a été une crainte plus prégnante ces dernières années. Néanmoins, l’élection de Trump aux États-Unis et la nomination au poste de secrétaire du Trésor américain de Scott Bessent – un hedge fund manager qui a fait une bonne partie de sa carrière chez George Soros et que nous connaissons bien – va dans le bon sens.

En fin de compte, c’est une question de philosophie d’investissement et de savoir si nous souhaitons avoir un portefeuille activement géré en termes de risque ou pas. Par ailleurs, l’alignement d’intérêt reste la pierre angulaire de tout investissement en hedge funds.

Comment les gérants alternatifs cherchent-ils à innover aujourd’hui pour conserver leur dimension « high tech » ?

Ils n’hésitent pas à se doter des meilleures infrastructures IT/Cloud pour leur environnement de travail. Posséder un système IT performant donne un accès aux données en temps réel, une capacité de modélisation, d’exécution et de gestion du risque optimal.

Les hedge funds ont été parmi les précurseurs de l’exploitation des Big Data et notamment de données alternatives innovantes afin de pouvoir identifier des tendances avant les autres dans le marché. C’est une course contre la montre et la recherche permet de faire la différence. Alors qu’ils ont subi une concurrence farouche de la part des sociétés tech pour attirer les meilleurs talents – les geeks d’entre les geeks ! – la tendance est désormais plus à la collaboration.

Enfin, l’émergence de l’IA permet un gain de temps et donne une capacité d’analyse supérieure dans des ensembles de données complexes. Les algorithmes d’apprentissage automatique aident à modéliser et tester différentes stratégies en temps réel, améliorant la prédictibilité des mouvements de marché.

Cédric Dingens

NS Partners

Cédric Dingens dirige le pôle « Investment Solutions & Institutional Clients » de NS Partners. Cédric a débuté sa carrière à la Banque du Luxembourg en 2001. L’année suivante, il a rejoint Notz Stucki à Luxembourg en tant que gestionnaire de portefeuille. Il a développé le cadre interne de gestion des risques quantitatifs avant d’être nommé responsable de la gestion des risques à Genève en 2010, puis d’être promu à son poste actuel en 2016. Il est titulaire d’un diplôme en finance quantitative de l’École nationale supérieure des mines de Nancy (France) et détient la certification Chartered Alternative Investment Analyst.

 

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    Hedge Funds 2024

    Solutions d’investissement

      • Interview Cédric Dingens
      • Head of Investment Solutions and Alternative Investments
      • NS Partners

    « Nous sommes à nouveau rémunérés pour shorter des titres »

    Alors que l’exercice 2024 touche à sa fin, les hedge funds présentent un bilan très favorable. C’est plus particulièrement le cas des stratégies long short. Elles affichent d’excellentes performances, aidées par la fin du free money et le retour aux fondamentaux, conditions qui ont permis de générer de l’alpha tant sur les books long que sur les books short.

    Par Jérôme Sicard

    Dans l’univers des hedge funds, quelles stratégies ont enregistré les meilleures performances cette année ?

    Toutes les stratégies de hedge funds ont plutôt bien performé cette année. Avec un bon choix de gérants, les performances ont même été excellentes.

    Celle qui a le mieux performé est la stratégie global equity long/short. Dans le fonds Haussmann, elle est en hausse de +18.2% year-to-date, au 30 novembre, nette de frais, à comparer avec les 20% de hausse de l’indice MSCI World. Les gérants avec un biais européen ont également bien performé. Ils gagnent +15.5% year-to-date en Euro, alors que l’indice MSCI Europe s’en tient à +6.3%. Et les gérants concentrés sur l’Asie surperforment aussi les indices – +14.0% year-to-date en Dollar versus +8.3% pour le MSCI AC Asia Pacific – tout en affichant des niveaux de volatilité bien inférieurs.

    La stratégie global macro discrétionnaire affiche également une belle performance avec +15.2% même si la dispersion entre les gérants s’avère plus importante. Le contexte de marché avec une volatilité accrue de toutes les classes d’actifs – taux, devises, matières premières et actions dans une moindre mesure… – est favorable aux traders macro.

    Quels ont été les mauvais élèves de la classe hedge funds en 2024 ?

    Ceux qui ont le plus souffert sont les gérants systématiques/CTA qui emploient des modèles de « trend following ». Ils ont plutôt bien commencé l’année avant de corriger significativement pour n’être en hausse que de +1.1% si l’on se réfère à l’indice SG CTA. Les gérants actifs sur les matières premières ont eu une année difficile en générale même s’il n’est pas rare qu’ils fassent leur Profit & Loss de l’année en quelques semaines et l’année n’est pas terminée.

    La performance des fonds multi-stratégies multi-gérants peut aussi être considérée comme décevante avec une performance autour des +6/+8% en fonction des indices, à comparer avec des fonds money market USD en hausse de près de 5% cette année. Cela ne constitue pas une surprise majeure dans la mesure où ces plateformes ont attiré beaucoup d’argent depuis le COVID. Sur fonds de guerre des talents pour attirer les meilleurs traders, la digestion de ces actifs s’avère délicate et la génération d’alpha s’en ressent.

    Quelles stratégies les investisseurs ont-ils eu tendance à privilégier cette année ?

    Les investisseurs ont eu tendance à privilégier d’une part, les fonds multi-stratégies multi-gérants dans un objectif de recherche de performances stables décorrélées des marchés et d’autre part, les fonds global macro dans un contexte macroéconomique moins lisible.

    Il existe un biais humain naturel qui pousse à privilégier les stratégies et gérants ayant des performances récentes supérieures à la moyenne alors qu’il est souvent judicieux d’avoir une approche contrariante, partant du principe que la sélection est bonne.

    Après l’excellente performance des CTAs en 2022, dans un contexte de baisse généralisée des marchés actions et obligataires, de nombreux investisseurs y ont augmenté leur exposition alors que ce n’était pas le bon moment. L’indice SG CTA a en effet perdu 2.2% depuis le 1er janvier 2023.

    Pourquoi l’environnement actuel a-t-il été si favorable aux long-short ?

    Les gérants equity long/short affichent de très bonnes performances ajustées au risque depuis plus de deux ans grâce à différents facteurs.

    Après une période prolongée de taux très bas, nous sommes enfin revenus à un environnement de taux d’intérêt normalisé. Même si les grandes banques centrales, à l’exception notable du Japon, ont commencé à baisser leurs taux, il n’est pas prévu de se rapprocher des 0%, à moins d’un sévère coup de bambou.

    Nous sommes donc à nouveau rémunérés pour « shorter » ou vendre à découvert des titres à une certaine échéance, ce qui change fondamentalement la donne. Les books shorts en dollars ont ainsi rapporté environ 4.5% cette année.

    Plus important, l’ère de l’argent gratuit arrive à son terme et cette fin commence à produire ses effets sur un ensemble d’entreprises mal gérées, dans des secteurs en difficultés. En témoigne le grand écart entre la performance du S&P 500 « cap-weighted » et du S&P 500 « equally-weighted ». De nombreuses sociétés américaines ont ainsi vu leur cours de bourse baisser cette année et les gérants ont gagné de l’argent sur leurs books shorts.

    Les gérants long/short ont également généré de l’alpha sur leurs books longs. Ils réussi à afficher un alpha positif sur 10 mois des 11 premiers mois de 2024. Avec une volatilité et une dispersion accrue entre secteurs et sociétés, le marché est favorable au stock picking, long comme short, et l’élection de Trump n’a fait qu’accentuer ce phénomène.

    Pour s’en tenir au S&P500, dans quels secteurs voit-on aujourd’hui le plus de dispersion ?

    Tous les secteurs du S&P 500 affichent des niveaux de dispersion supérieurs à leur moyenne historique mais ceux qui se démarquent le plus aujourd’hui sont les Industrielles, l’Energie et les Utilities. Ce n’est pas un hasard si les Industrielles représentent la plus grande allocation sectorielle en exposition brute d’un fonds comme Haussmann. Par ailleurs, nous avons sélectionné un certain nombre de gérants actifs dans le secteur Energie qui ont une vraie approche long/short sur ces trois dernières années. Encore une fois, la bonne nouvelle est que nous voyons de la dispersion dans tous les secteurs et des phénomènes comme l’IA ne va faire que renforcer cette tendance.

    Vous-même, que retenez-vous de cet exercice 2024 ?

    Il n’est pas encore terminé ! Cela dit, 2024 est une année positive pour la gestion hedge funds. Les performances, absolue et relative, sont déterminantes mais la manière dont celles-ci ont été générées est encore plus importante. Les gérants long/short ont bien performé tout en conservant une exposition nette au marché qui est raisonnable et, de surcroit, avec un portefeuille diversifié en termes de secteurs et de titres. En ce sens, un tel portefeuille se démarque clairement de la concentration des indices boursiers aujourd’hui. Grâce à ce positionnement, qui évolue au cours du temps, nous craignons moins les scénarios de rotations importantes entre les secteurs « growth » et « value ». La meilleure preuve en est la très bonne performance des gérants depuis l’élection de Trump.

    Un deuxième aspect que nous pouvons mettre en avant est le regain d’intérêt de la part de clients privés pour les hedge funds. Après avoir connu de belles années avec le private equity, certains émettent le souhait de se diversifier en s’exposant à des stratégies différentes.

    Cédric Dingens

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      Solana émerge comme le Nasdaq de la Blockchain

      Acteur clé dans le domaine de la Blockchain, Solana s’est attirée une attention notable sur le marché des cryptomonnaies en raison de ses performances récentes. Une question surgit alors dans l’optimisme qui a suivi l’élection de Donald Trump : après que le bitcoin ait passé le seuil des 100’000 dollars, Solana pourrait-il de son côté franchir la barre des 1’000 dollars ?

      Les origines de Solana remontent à 2017. Anatoly Yakovenko, ancien ingénieur de Qualcomm, propose alors une blockchain capable de traiter des données avec une vitesse et une efficacité sans précédent. En mars 2020, Solana lance sa version bêta, démontrant sa capacité à traiter plus de 65’000 transactions par seconde à un coût extrêmement bas. La plateforme connait une croissance particulièrement forte en 2021, stimulée par la demande pour la finance décentralisée DeFi et les NFTs. Son cours en profite pour grimper de 0,75 à un sommet de 259,96 dollars.

      En 2022, avec l’effondrement de FTX et de sa société sœur Alameda, qui détient une grande quantité de SOL , Solana n’échappe pas à la correction crypto et son cours chutte à 8,42 dollars. Solana a opéré depuis un rebond assez remarquable en se concentrant sur les améliorations de son réseau et des innovations technologiques. Son prix a grimpé de plus de 2’690 % par rapport à son point bas de 2022 et se situe désormais à 235 dollars.

      Au 3ème trimestre 2024, les investissements institutionnels dans l’écosystème Solana ont atteint un niveau record. De plus, l’activité liée à la popularité croissante des «meme coins» basés sur Solana a enregistré des gains significatifs. «Les meme coins attirent de nouveaux utilisateurs vers l’écosystème, ouvrant la voie à leur transition vers des cas d’usage plus sophistiqués comme la DeFi et les NFTs», souligne Dramane Meite, directeur produit chez Hashdex.  Avec une capitalisation boursière de plus de 109 milliards de dollars, Solana se classe aujourd’hui au 5ème rang des cryptomonnaies.

      Retour vers le futur.

      La robustesse de son infrastructure a été un élément clé de son succès. Sa blockchain à haute vitesse permet une mise à l’échelle efficace tout en maintenant des coûts de transaction faibles, ce qui la rend particulièrement attrayante pour les applications basées sur la blockchain. Pour répondre aux préoccupations passées concernant les interruptions du réseau, Solana a introduit des clients validateurs alternatifs (Firedancer et Tinydancer), améliorant ainsi la stabilité et la décentralisation.

      Les investissements institutionnels ont également été un moteur de croissance. «Les investisseurs institutionnels sont attirés par Solana en raison de sa capacité à gérer de manière transparente la tokenisation et les applications de niveau entreprise» , ajoute Pedro Lapenta, Head of Research chez Hashdex, La domination de Solana est également évidente dans la DeFi. En novembre 2024, le volume de ses échanges décentralisés (DEX) de Solana a dépassé 121,39 milliards, quasiment le double de ceux d’Ethereum, à savoir 63,67 milliards. Ce point illustre clairement le leadership de Solana dans les services financiers basés sur la blockchain, aidé par ses faibles frais et son réseau évolutif, qui continuent d’attirer développeurs et utilisateurs.

      Malgré ces atouts, Solana doit cependant composer avec quelques incertitudes réglementaires. La SEC a récemment rejeté plusieurs demandes relatives aux ETFs basés sur Solana, invoquant des préoccupations concernant sa classification en tant que “security”. La position du président de la SEC, Gary Gensler, suggère que les ETFs SOL au comptant sont peu susceptibles d’être approuvés sous l’administration actuelle. Cependant, la récente nomination de David Sacks comme conseiller de la Maison-Blanche pour l’intelligence artificielle et les cryptomonnaies a ravivé l’optimisme. En parallèle, des acteurs de premier plan tels que Bitwize, Grayscale, 21Shares, Canary Capital et VanEck poursuivent leurs démarches pour obtenir l’approbation d’ETFs basés sur Solana, facilitant ainsi son accès aux investisseurs institutionnels et particuliers.

      Bien qu’Ethereum, son principal concurrent, ait renforcé sa position sur le marché avec ses récentes mises à niveau, les experts estiment que Solana s’est imposée comme un acteur redoutable. «Les nouveaux concurrents de Solana font face à un défi bien plus difficile: ils doivent démontrer des avantages significatifs par rapport à une infrastructure déjà optimisée, précise Ayush Tripathi, analyste chez Bitwise. Nous assistons à l’émergence d’un nouveau poids lourd de la blockchain. En regardant vers 2025, je m’attends à ce que cet élan crée un puissant cercle vertueux: des cas d’usage réussis stimuleront une meilleure adéquation produit-marché, ce qui attirera à son tour davantage de développeurs et d’institutions. La question n’est plus de savoir si Solana réussira, mais plutôt quel sera l’ampleur de son impact.»

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        Mauvaise passe

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          • Olivier de Berranger
          • CEO et co-CIO
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        La zone euro, entre risque français et espoir allemand

        L’année 2024 entre dans sa dernière ligne droite, et c’est peu de dire qu’elle n’aura pas été très favorable aux actions européennes. Quand le S&P 500, l’indice phare de la bourse américaine, caracole à +27%, l’EuroStoxx 50 ne progresse que de 5%.

        De l’instabilité politique française au marasme de l’activité industrielle, en passant par l’exposition de nombreuses sociétés à une économie chinoise en berne, les sous-performances des actions européennes s’expliquent facilement. C’est la question des perspectives qui se pose à présent. Si, bien entendu, le destin de la zone euro va dépendre de la capacité de la Chine à relancer son économie et des droits de douane de l’administration Trump, elle devra vivre aussi au gré des péripéties de ses deux moteurs : la France et l’Allemagne.

        Côté français, c’est bien le risque d’un dérapage supplémentaire qui prédomine. L’instabilité politique perdurera certainement encore plusieurs mois. Le scénario d’une chute prochaine du gouvernement Barnier prend de l’ampleur, et s’il devait advenir, tous les scénarios seraient alors ouverts, jusqu’à une potentielle démission du président Macron. Un contexte qui ne pourrait que renforcer encore davantage la défiance des investisseurs. De plus, même un budget validé et l’absence de vote d’une motion de censure n’auraient sans doute qu’un impact marginalement positif, avec la perspective d’une nouvelle dissolution l’été prochain, et donc la persistance d’une instabilité du pouvoir. 

        Par ailleurs, au-delà de l’aspect purement politique, la question budgétaire restera centrale. Quand bien même le budget serait voté, cela ne ramènerait le déficit qu’à 5% du PIB, ce qui reste très élevé en absolu. De plus, ce calcul s’appuie sur l’hypothèse, consignée dans la loi de Finance, d’une croissance du PIB de 1,1% en 2025. Au regard de l’évolution récente des indicateurs économiques, ce chiffre a très peu de chance d’être atteint. Une croissance de l’ordre de 0,5 à 0,7% paraît plus crédible, avec un risque non négligeable de récession technique en cours d’année. Un budget calibré sur une hypothèse de croissance trop élevée ne peut que conduire à un nouveau dérapage. Et malheureusement, la situation française n’est ni nouvelle, ni exceptionnelle. La France est l’Etat à avoir le plus souvent dépassé le seuil de déficit excessif (3% du PIB) depuis la création de la zone euro – 20 années sur 26. De plus, elle est aujourd’hui le plus mauvais élève de l’union monétaire en termes de ratio déficit public/endettement : l’Italie et la Grèce, dont le ratio dette/PIB dépasse celui de la France, sont en 2024 quasiment à l’équilibre budgétaire pour la première, en net excédent pour la deuxième.

        Malgré ce bilan peu reluisant, et bien que le taux à 10 ans français ait récemment dépassé son homologue grec, la France continue d’emprunter à des taux modestes. Mais le risque est aujourd’hui réel que la poursuite de l’incurie budgétaire, associée à l’instabilité politique, finissent par engendrer un accès défiance tel que les taux s’envolent sur les marchés, et que la France connaisse, toutes proportions gardées, une sorte de crise de la dette. C’est indubitablement là que se situe le principal risque pour la zone euro au cours des prochains trimestres.

        Ce risque est toutefois contrebalancé par un espoir venu d’Allemagne, après l’éclatement de la coalition au pouvoir. Sauf retournement majeur, les élections fédérales anticipées, qui en découlent, devraient être remportées en février prochain par la CDU/CSU, menée par Friedrich Merz. Pressenti comme futur Chancelier, il fera ensuite alliance soit avec le SPD d’Olaf Scholz, soit avec les Verts, en fonction des scores de ces partis. Quelle que soit la couleur de la prochaine coalition, il semble certain que l’Allemagne, qui dispose de réelles marges de manœuvre avec seulement 59% de dette/PIB, sans aucun déficit primaire, ajuste enfin son orthodoxie budgétaire.

        Trois pistes crédibles s’offrent à elle. D’abord, alléger les conditions et activer plus fréquemment la clause de sauvegarde qui permet au Bundestag de suspendre le frein à l’endettement « en cas de catastrophe naturelle ou autre situation exceptionnelle d’urgence échappant au contrôle de l’État ». Ensuite, reconduire le fonds spécial de 100 milliards d’euros créé en 2022 pour soutenir le budget de la défense, ou en créer un nouveau. Enfin, revoir la limite de déficit budgétaire comprise dans le mécanisme de frein à l’endettement. Fixée aujourd’hui à 0,35% du PIB, elle pourrait remonter à 0,5 voire 0,75%.

        Ces ajustements peuvent paraître mineurs. Ils représenteraient toutefois une évolution majeure dans l’état d’esprit des dirigeants allemands, et il n’est guère crédible, pour l’instant, d’espérer davantage à court terme. En termes de perception du risque par les investisseurs, cela pourrait être une bouffée d’oxygène, la première économie de la zone euro prenant enfin la mesure d’un modèle économique déclinant depuis près d’une décennie et se montrant capable d’apporter un peu de flexibilité à son ordo-libéralisme parfois forcené. Cela pourrait également redonner de l’allant à certains secteurs cycliques boudés par les marchés, comme l’automobile ou la chimie.

        De la survenance d’un péril français ou de la matérialisation du – raisonnable – espoir allemand dépendra certainement une bonne partie du sort boursier de la zone euro en 2025.

        Olivier de Berranger

        La Financière de l’Echiquier

        Olivier de Berranger est le directeur général et le co-CIO de La Financière de l’Echiquier. Il a occupé depuis 1990 des postes de trader, ainsi que de responsable de desk de trading sur les produits de taux d’intérêt, cash et dérivés au Crédit Lyonnais puis chez Calyon. Il a ensuite été responsable du pôle Capital Markets chez First Finance. Olivier de Berranger rejoint La Financière de l’Échiquier en mars 2007 en qualité de gérant obligataire. Après être devenu directeur de la gestion taux, crédit et diversifié, il est nommé en 2017 directeur de la gestion d’actifs et entre au comité de direction. En décembre 2023, il en devient directeur général de LFDE. Olivier de Berranger est diplômé d’HEC.

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            • Françoise Maret
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          Les Américains ont-ils élu un nouveau Trump ?

          Kamala Harris, une relative inconnue menant une campagne d’à peine trois mois et demi, n’avait qu’une chance limitée de l’emporter face à un ancien Président bénéficiant d’une aura de star depuis plusieurs décennies. De plus, le message fade de la gauche incapable de reconnaître les erreurs d’une présidence Biden très peu populaire n’aura pas pesé bien lourd face à la rhétorique belliqueuse et conquérante de Donald Trump.

           

          Les médias de gauche autant que de droite avaient annoncé une bataille serrée et un comptage des votes qui devait prendre plusieurs jours. Pourtant, au lendemain du 5 novembre, les résultats, bien qu’encore provisoires, ne laissaient déjà plus place au doute. Il n’était plus question de savoir qui gagnerait, mais bien de combien de voix Donald Trump allait l’emporter. Très vite, le Sénat passait lui aussi en mains républicaines, puis enfin la Chambre des Représentants.

          Alors que l’on pensait que l’ancien Président obtiendrait le soutien d’un électorat avant tout masculin, mûr, blanc et peu éduqué, force est de constater qu’il a su convaincre bien au-delà de ces clichés, en faisant mouche notamment auprès des jeunes de toutes communautés, des hispaniques et asiatiques, et des personnes à faibles revenus.

          Des planètes alignées

          Le Donald Trump de 2024 est loin d’être aussi conciliant que celui de 2016, ou même de 2020. Admirateur de figures politiques pour le moins autoritaires telles que Vladimir Poutine, Kim Jong-Un ou Viktor Orban, Donald Trump semble déterminé à mener le pays à son idée et à faire taire toute voix discordante. Les premières nominations indiquent d’ores et déjà qu’une loyauté indéfectible sera exigée.

          Outre un Sénat offrant une marge confortable de six voix au Président-élu, la Chambre basse est elle aussi passée en mains républicaines. De plus, six des neuf juges de la Cour Suprême sont conservateurs, les trois plus fondamentalistes ayant par ailleurs été choisis par le futur Président lui-même.

          À l’échéance de ce nouveau mandat, Donald Trump ne pourra pas se représenter. Il y a donc fort à parier que celui qui avait promis d’être dictateur au premier jour de sa présidence mènera une politique empreinte d’absolutisme durant les quatre prochaines années. Au prix de sérieuses coupes budgétaires, il aura à cœur de tenir ses trois promesses électorales fétiches, à savoir réduire encore l’imposition des entreprises et des particuliers, mettre un frein à l’immigration et imposer des barrières douanières drastiques.

          Une cure de minceur

          Avec la majorité au Congrès, les républicains auront les coudées franches pour mettre en œuvre les mesures prônées par Donald Trump. La réduction de l’imposition des entreprises de 21% à 15% risque de creuser un trou béant dans les finances du gouvernement, sans apporter de bénéfice aux contribuables. Pour mémoire, en 2017, 81% de ces baisses avaient financé des rachats d’actions et distributions de dividendes, d’après les statistiques du Center on Budget and Policy Priorities.

          Comment combler ce déficit ? Elon Musk l’a annoncé : le peuple américain va vivre une période difficile. Nommé à la tête du tout nouveau Département de l’Efficacité Gouvernementale, la diminution du nombre de fonctionnaires est une de ses priorités. Certains programmes sociaux essentiels tels qu’Obamacare, Medicaid et la sécurité sociale, depuis longtemps déjà dans le viseur des républicains, seront nécessairement rabotés pour renflouer les finances fédérales.

          ‘America First’

          La décision d’imposer des droits de douane est en grande partie laissée à la discrétion du Président. Sa promesse de campagne d’appliquer 10% de manière uniforme et jusqu’à 60% sur les importations chinoises pourrait donc devenir réalité très rapidement. Elle devrait aussi en toute logique générer une inflation significative. En effet, si selon le Président-élu ces barrières renfloueront les caisses de l’Etat et dans le même temps créeront des emplois en poussant les entreprises à fabriquer sur sol américain, ce rationnel ne tient pas compte des potentielles mesures de rétorsion ni du manque de main d’œuvre. Omettre ces deux points équivaut à occulter l’inflation des prix et des salaires qui pourraient en découler et donc un envisageable retour de la politique restrictive de la Fed.

          Le futur du parti républicain

          Le parti républicain actuel n’a plus guère de points communs avec celui de Ronald Reagan, ou encore des George Bush père et fils. Bien plus à droite sur l’échiquier politique et plus adepte du culte de la personnalité que de la défense d’un idéal conservateur, bien des membres du Congrès se définissent comme ‘MAGA-Republican’. La défection durant la campagne de plusieurs personnalités éminentes du parti au profit des démocrates est preuve que le mouvement initié par Donald Trump n’a pas que des sympathisants. Est-ce à dire que les élections présidentielles de 2028 verront l’avènement d’un troisième parti enfin capable de concourir à égalité avec les deux géants ? Si la démocratie aurait tout à y gagner, rien n’est pourtant moins sûr.

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            Wrap-up

            Solutions d’investissement

              • Interview Emmanuel Petit
              • Directeur de la gestion obligataire
              • Rothschild & Co Asset Management

            « En 2024, nous avons surtout assisté à une pentification des courbes »

            Yoann Ignatiew et Emmanuel Petit, associés-gérants chez Rothschild & Co Asset Management, sont à Genève le jeudi 28 novembre pour présenter leurs perspectives 2025 sur les marchés actions et fixed income. L’opportunité, en avant-première, de revenir avec Emmanuel Petit sur l’évolution du segment obligataire en 2024, alors que l’année touche à sa fin.

            Par Jérôme Sicard

            Que faut-il retenir de l’année qui s’achève en matière de gestion obligataire?

            J’ai trouvé que c’était une année intéressante, notamment dans la façon dont les gens perçoivent l’environnement. Le sentiment général est que les taux ont baissé, mais il ne s’agit en réalité que des taux courts. Les taux longs sont eux en hausse. La forte baisse a eu lieu en fin d’année dernière. Mais en 2024, nous avons surtout assisté à une pentification des courbes, par une hausse des taux longs, ce que l’on appelle dans notre jargon un bear steepening. A ce stade du cycle, ce mouvement de pentification des courbes est assez normal. Cependant, cette baisse des taux est un boost que les banques centrales remettent dans l’économie avant que les chiffres d’inflation structurelle ne soient retournés à la cible des 2%. C’est donc un vrai pari qu’elles prennent et l’année 2024 peut se résumer dans cette volatilité des anticipations de marché sur le rythme de baisse des taux directeurs.

            Il faut retenir aussi la désynchronisation du cycle monétaire japonais qui a amorcé son cycle de resserrement monétaire, alors que son inflation retrouvait de la vigueur, bien après le mouvement que l’on a connu dans les pays occidentaux.Je pense d’ailleurs que nous allons voir ce même phénomène de désynchronisation prendre forme entre les Etats-Unis et le reste du monde, suite à l’élection de Donald Trump.

            Je terminerais par le crédit où se produit un véritable changement de paradigme avec l’écrasement des spreads entre dette corporate et dette souveraine. Ce spread a énormément baissé, redéfinissant du même coup la qualité relative de ces deux segments. Si l’on analyse la convergence des taux souverains et des taux de swaps, ca peut s’interpréter comme une dégradation de la qualité de crédit de la dette souveraine, et non comme une appréciation de la qualité de crédit des émetteurs corporates. Mais aussi, alors que nous sommes dans un cycle de Quantitative tightening, une réduction de la liquidité capable d’absorber la dette souveraine émise.

            Quelles en sont pour vous les implications à terme ?

            Pour l’instant, ca reste une observation qui nous alerte cependant sur la hausse du risque sur la dette souveraine. Est-ce un point de bascule? C’est difficile de se prononcer.

            Au cours des cinq dernières années, marquées par des bouleversements significatifs – covid, taux zéro, répression financière, lnflation galopante et tensions géopolitiques – dans quelle mesure avez-vous adapté vos stratégies d’investissement ?

            Notre ADN de gérants actifs, flexibles, veut que nous puissions nous adapter à des conditions de marché très variées quitte à changer de logiciel assez régulièrement. Je prends deux exemples. En 2021, nous avions vraiment une vue fondamentale sur les taux, anticipant les possibles poussées inflationnistes qui suivraient le passage aux taux négatifs. Cette année, nous avons privilégié une approche plus tactique, et nous avons géré la pente en fonction des anticipations de marché par rapport aux baisses de la BCE. Nous avons donc pris un horizon court-termiste, en ligne finalement avec des données macro capables de fluctuer d’un mois sur l’autre, rendant les banques « data dependent », façon élégante de dire qu’elles naviguent sans beaucoup de visibilité.

            Et j’ai un troisième exemple. Au moment du covid, il fallait être opportuniste. Et, au vu de la violence du choc, pouvoir se mettre en face du marché avec une rapidité une rapidité impressionnante. C’était d’une telle violence. La fenêtre s’est vite refermée avec l’intervention des banques centrales sont arrivées mais il y avait quand même des opportunités à saisir en se montrant très, très réactif. Pour cela, il faut que le pôle en charge de la gestion soit parfaitement organisé et c’est là en fait la caractéristique des gérants flexibles.

            Pourriez-vous revenir sur la désynchronisation des Etats-Unis avec le reste du monde que vous avez évoqué tout à l’heure.

            Un petit séisme vient de se produire avec l’élection de Trump qui s’est engagé à remettre du boost sur une économie déjà en pleine croissance. Le risque inflationniste ne peut plus être négligé. Les mesures protectionnistes qu’il veut appliquer vont pénaliser reste du monde. La Chine va souffrir en premier lieu, tout comme l’Europe à cette nuance près que l’Europe n’a pas les ressources de la Chine pour redresser son économie. Il y a de quoi s’inquiéter pour elle.

            Cette désynchronisation des économies à l’échelle mondiale va s’accompagner d’une désynchronisation des cycles monétaires et des politiques de taux. Nous allons modifier notre axe d’analyse où, jusqu’à présent, toutes les banques centrales étaient plus ou moins alignées sur la locomotive américaine. Demain, cette corrélation risque de disparaitre. Les politiques monétaires peuvent se différencier en fonction des impacts macro-économiques de ces éventuels bouleversements.

            Voilà sur le court terme. Sur le long terme, d’autres dangers apparaissent. La situation tient tant qu’il n’y a pas de craintes sur la soutenabilité de la dette US, sur son service. La règle est la suivante: pour qu’une dette soit soutenable, il faut que son coût soit inférieure au taux de croissance nominal du PIB. Mais si, Trump met en œuvre une relance budgétaire trop massive, les taux longs peuvent s’envoler et créer de facto un choc de marché.

            A quoi vous attendez-vous aujourd’hui de la part des banques centrales ?

            Suite à l’élection, les anticipations de mouvements de taux ont divergé entre les Etats-Unis et l’Europe. On a retiré ½ baisse de taux aux US et on en a ajouté ½ en Europe.

            Dans le scénario évoqué précédemment, la Fed pourrait potentiellement maintenir son biais restrictif ; et même si c’est prématuré, et il faut l’avouer très contrariant, on ne peut pas exclure des hausses de taux l’an prochain.

            En Europe au contraire, la BCE pourrait devoir adopter un biais accommodant plus rapidement si les impacts sur la croissance se matérialisent sur une économie déjà fragilisée.

            En cela, l’élection de Donald Trump modifie nos repères.

            Dans cet environnement compliqué, quelles options privilégiez-vous pour 2025 ?

            Dans un contexte de taux aussi incertain, il devient difficile d’acheter de la duration. La visibilité n’est pas vraiment géniale. Il va falloir observer la corrélation des taux européens avec les taux américains et agir en fonction.

            A cela, s’ajoute un risque macro qui pousse un peu plus à la prudence. Le crédit, qui se situe entre actions et dette souveraine, s’accommode assez bien de ces situations floues, de ces zones grises qui manquent singulièrement de dynamisme. En revanche, si la situation économique conduit à une hausse significative des taux de défaut, le crédit ne résistera pas.

            Au regard des niveaux de valorisation, le coût d’opportunité à réduire son risque a de toute façon baissé. Nous privilégions donc les émetteurs de meilleure qualité, et peu cyclique.

            Nous allons également nous concentrer sur les non cycliques car, en cas de récession, les cycliques vont traverser pas mal de turbulences.

            Emmanuel Petit

            Rothschild & Co Asset Management

            Emmanuel Petit a débuté sa carrière en 1998 chez HSBC Asset Management comme analyste dans le domaine de l’attribution de performances AIMR-GIPS puis il est devenu analyste crédit en 2001. En 2006, il rejoint Rothschild & Co Asset Management en tant que gérant obligataire sur les obligations privées. Il en est responsable de la gestion obligataire depuis 2011. Emmanuel est diplômé d’un mastère spécialisé en Finance d’entreprise et membre de la SFAF (Société Française des Analystes Financiers).

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