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  • Interview Fabian Charier
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«AWAP a dû professionnaliser son fonctionnement et structurer son offre. »

L’union fait la force. Et c’est ce dont auront besoin les gérants indépendants pour survivre. La mission de Fabian Charlier, nommé directeur général de l’AWAP en septembre, consistera donc à structurer et animer cette union. En s’appuyant surtout sur la technologie. L’objectif est de faire de l’association un «écosystème intégré» dont l’objectif est de simplifier le quotidien de ses membres.

Par Levi-Sergio Mutemba

L’un des trois piliers stratégiques que vous souhaitez soutenir est l’orthodoxie de gestion. Qu’entendez-vous par là?

Ce que nous entendons par orthodoxie de gestion, c’est le respect d’un ensemble de règles et de bonnes pratiques. Dans cette optique, AWAP accompagne ses membres GFI dans leurs obligations de conformité, en proposant des services de compliance à des tarifs compétitifs, rendus possibles grâce à la mutualisation des services. Nous les aidons également à se préparer à leurs audits et, plus généralement, à aborder toute nouvelle réglementation de manière structurée et efficiente.

Comment cela se traduit-il concrètement?

À titre d’exemple, la FINMA a récemment renforcé ses exigences en matière de cybersécurité. Nous avons donc organisé, avec notre prestataire IT, un webinaire expliquant comment y répondre de manière pragmatique, et nous avons proposé à nos membres un audit gratuit de leur organisation IT. Cette volonté d’accompagner les GFI dans une orthodoxie de gestion s’étend également au domaine de l’investissement. Nous partageons nos vues de marché et mettons à leur disposition des portefeuilles modèles, ainsi qu’une liste de fonds.

Il nous arrive aussi de jouer le rôle de sparring partner en analysant certains de leurs portefeuilles et en confrontant les risques financiers embarqués avec leur propre vue sur les marchés. C’est un soutien utile pour les petites et moyennes structures, qui n’ont pas toujours des ressources internes dédiées à l’investissement.

En quoi consiste le passage d’AWAP d’une «communauté de GFI» à un «système intégré»?

Au départ, AWAP était surtout une communauté de gérants réunis dans une logique de mutualisation et d’économies d’échelle. Cela a commencé il y a une quinzaine d’année par le partage de locaux, puis par des achats groupés de certains services. Avec l’introduction des licences FINMA consécutive à l’entrée en vigueur des lois LSFin/LEFin, AWAP a dû franchir une nouvelle étape. À savoir professionnaliser son fonctionnement et structurer son offre afin de répondre aux exigences accrues de la réglementation.

À quoi ressemble donc AWAP aujourd’hui?

AWAP regroupe aujourd’hui plus de 25 entités de gestion de fortune qui regroupe plus d’une soixantaine de relationship managers. Nous avons toutefois conservé l’esprit communautaire qui nous anime depuis le début. Aucun frais de gestion n’est prélevé et la contribution des membres reste modeste, adaptée à la taille de chaque entité. Ce montant est du reste souvent compensé par les économies réalisées grâce à la mutualisation des services. Grâce à notre plateforme, les GFI accèdent à un large réseau de prestataires, en matière par exemple de compliance, de systèmes de gestion de portefeuille, ou encore de solutions IT, et ce à des conditions avantageuses.

Techniquement, comment AWAP créé cette interconnexion entre ses membres?

Cette interconnexion est facilitée par myAWAP, notre intranet dédié, qui centralise l’ensemble des ressources, documents, communications et outils pratiques dont les membres ont besoin au quotidien. De fait, myAWAP constitue une véritable colonne vertébrale numérique qui permet de suivre les actualités du réseau en temps réel et de partager des bonnes pratiques.

Au fil des années, cette dynamique collaborative a forgé un fort sentiment d’appartenance au sein de la communauté AWAP. Nombre de nos membres valorisent d’ailleurs leur affiliation dans leur communication auprès de leurs clients, comme gage de sérieux, de transparence et d’engagement professionnel. En d’autres termes, nos GFI restent indépendants, mais ne sont pas seuls : ils bénéficient de la force d’un réseau et de ressources à leur disposition.

S’agissant de la consolidation des GFI, celle-ci se poursuivra-t-elle, selon vous?

À vrai dire, il faudrait déjà qu’elle commence réellement ! Voilà plus de dix ans qu’on en parle, mais dans les faits, très peu d’opérations se concrétisent. Les difficultés tiennent souvent à l’écart entre les attentes des vendeurs et des acheteurs, notamment en matière de valorisation, mais aussi quelquefois à des différences culturelles. En réalité, la dynamique de consolidation concerne aujourd’hui davantage le secteur du private banking, où l’on observe une baisse régulière du nombre de banques en Suisse.

L’égo des gérants joue-t-il un rôle dans la difficulté de trouver un terrain d’entente?

Je ne saurais l’affirmer de manière catégorique. Cela dit, l’égo peut effectivement entrer en jeu, notamment sur des aspects plutôt symboliques. J’ai entendu parler d’un rapprochement ayant achoppé sur des éléments tels que le choix du nom de la nouvelle entité. L’égo joue donc sans doute un rôle, sans être pour autant un facteur systématique. Il faut aussi garder à l’esprit qu’un gérant de fortune indépendant est, par essence, attaché à son indépendance. C’est une dimension identitaire forte, et forcément sensible lorsqu’il s’agit d’envisager un rapprochement.

Est-ce que l’indépendance des gérants a encore de l’avenir, compte tenu de la multiplicité des défis que la profession doit relever?

Je le crois profondément, oui. Les GFI restent – et resteront – des acteurs essentiels de la gestion de fortune en Suisse. L’indépendance demeure le socle d’un conseil objectif, sans biais ni conflit d’intérêts. Ce n’est pas toujours le cas dans les banques, où les impératifs commerciaux – voire de rentabilité – peuvent influencer certaines décisions de gestion. Cela dit, les défis sont bien réels, notamment pour les petites et moyennes structures. Elles subissent une hausse continue des coûts, tout en devant répondre à des exigences réglementaires toujours plus lourdes.

C’est précisément là qu’AWAP apporte sa valeur ajoutée. Notre conviction est simple. À savoir qu’ensemble, nous sommes plus forts. En unissant leurs forces au sein d’un réseau structuré, les gérants peuvent mutualiser certaines ressources, accéder à un support spécialisé et partager des best practices pour faire face à la pression réglementaire et opérationnelle. Cette approche collaborative crée un véritable cercle vertueux, en ce qu’elle renforce la solidité des structures membres tout en inspirant confiance aux clients finaux.

Fabian Charlier

AWAP

Fabian Charlier dirige AWAP avec le titre de managing director. Il connait d’autant mieux la structure qu’il en a été membre voilà dix ans. Fabian a plus de 25 ans d’expérience sur les marchés financiers, dont dix années en banque d’investissement et quinze années en gestion d’actifs, au cours desquelles il a piloté le développement de plusieurs sociétés de gestion. Fabian Charlier est titulaire de la certification Chartered Financial Analyst (CFA).

 

 

 

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