Homework
Taulant Avdija
BDO Suisse
« Une formation voulue comme une initiative de praticiens destinée à des praticiens »
BDO Suisse et le Geneva Compliance Group ont joint leur force pour proposer aux gestionnaires de fortune une formation certifiante sur les aspects liés aux autorisations, à la surveillance, à la compliance et à la gestion des risques. Taulant Avdija en présente ici les contours.
Par Levi-Sergio Mutemba
Quels sont les axes principaux de la réglementation entourant la formation des gestionnaires de fortune en Suisse ?
La FINMA met l’accent sur la nécessité pour les établissements financiers d’adapter leurs plans de formation à leurs besoins spécifiques, conformément à l’esprit de la LSFin et de la LEFin. Cependant, elle a également précisé que les organismes de surveillance ne disposent pas de la compétence légale pour fixer des standards de formation obligatoires. Au final, le consensus préexistant entre les OS sur les exigences minimales de formation a été abandonné, ce qui a créé une situation complexe.
Dans l’intervalle, nous avons décidé de continuer à appliquer les standards et pratiques issus de ce consensus initial afin d’éviter toute lacune dans l’approche réglementaire. Toutefois, une clarification de la part de la FINMA serait bienvenue pour uniformiser les attentes. Le phénomène de « OS shopping », où certains acteurs pourraient privilégier des OS aux standards moins exigeants, est problématique, car la loi et son application devraient rester les mêmes pour tous.
En quoi votre cursus peut combler cette incertitude réglementaire ? Qu’est-ce que les gestionnaires de fortune y apprendront ?
Notre objectif est de proposer une formation pragmatique, orientée sur les résultats, basée sur notre expérience en audit ainsi que sur notre expertise des pratiques de compliance et de contrôle des risques. Grâce à notre couverture du marché, nous disposons d’un benchmark qui nous permet d’identifier les problématiques concrètes rencontrées par les gestionnaires de fortune et les trustees. Nous pouvons donc leur suggérer des solutions directement applicables.
La formation traite des aspects réglementaires essentiels tels que la LBA, la LSFin et la LEFin, tout en mettant l’accent sur des thématiques connexes, qui s’inscrivent dans l’actualité, comme les sanctions ou la protection des données. Nous explorons également des questions clés, telles que le rôle stratégique de la fonction compliance et les meilleures pratiques pour identifier, évaluer et gérer efficacement les risques. Nous répondons de cette façon aux attentes des régulateurs et aux besoins opérationnels des participants. En proposant des sessions en présentiel, nous favorisons des échanges directs et constructifs avec les participants. Cette interaction renforce la pertinence du programme et permet de tirer parti des retours d’expérience de chacun. Il se crée ainsi une dynamique d’apprentissage ancrée dans la pratique.
Comment avez-vous élaboré ce cursus ?
L’élaboration de ce cursus s’appuie directement sur notre expérience et notre pratique quotidienne dans le secteur financier. Proposer une solution totalement maîtrisée, alignée sur notre connaissance approfondie du marché, était un développement naturel pour nous.
Nous avons conçu cette formation comme une initiative de praticiens destinée à des praticiens. Elle se concentre sur des problématiques concrètes et actuelles, avec un contenu qui détaille les points clés à maîtriser pour garantir une conformité effective et une gestion optimale des risques. En collaboration avec Geneva Compliance Group, qui partage cette approche pragmatique, nous avons veillé à offrir une solution orientée vers des besoins spécifiques et directement applicables.
En quoi un auditeur tel que BDO est-il légitime pour dispenser cette formation ?
Nous avons toujours cultivé une proximité forte avec le secteur et ses professionnels, nous sommes actifs au sein des organisations professionnelles, et nous entretenons des relations étroites avec les autorités. Cette double proximité – avec le marché d’un côté, et les autorités de l’autre – nous permet de proposer une formation qui soiot ancrée dans la réalité quotidienne des acteurs du marché, et qui intégre en même temps les attentes des régulateurs.
Comment les OS ont-elles réagi à votre initiative commune avec le Geneva Compliance Group ?
Certains OS se sont montrés préoccupés, craignant que nous n’allions dans le sens d’un nivellement vers le bas en matière de standards de formation. Nous avons clairement réfuté cette approche en maintenant les anciens consensus qui garantissent un niveau de qualité élevé. Nous avons également précisé que notre formation se concentre uniquement sur le respect des exigences réglementaires. Les participants doivent continuer à se former sur les aspects métiers auprès des associations professionnelles ou d’autres organismes spécialisés.
Dès le départ, nous avons été transparents sur nos intentions : notre initiative ne vise pas à concurrencer les associations professionnelles existantes, mais à proposer une solution complémentaire, ancrée dans la pratique. Elle permet aux gestionnaires de fortune et trustees de rester en phase avec les attentes réglementaires tout en se dotant d’outils avec lesquels ils pourront gérer leurs responsabilités de manière efficace.
Taulant Avdija
BDO
Taulant Avdija occupe le poste de Responsable Regulatory & Compliance pour la Suisse chez l’auditeur BDO, à Genève, où il a occupé diverses positions depuis près de neuf ans, dont celui de Manager – Legal Counsel, Regulatory & Compliance entre 2016 et 2019. En 2023, il en est devenu Associé. En possession d’un brevet d’avocat, Taulant Avdija est diplômé de l’Université de Lausanne, où il a obtenu un master en droit des affaires, ainsi que de l’Université de Genève, où il s’est spécialisé dans le droit numérique et la régulation financière.
Guillaume de Boccard
Geneva Compliance Group
« Les audits sont plutôt bien vécus par les gérants qui ont su se préparer »
Guillaume de Boccard
Geneva Compliance Group
« Les audits sont plutôt bien vécus par les gérants qui ont su se préparer »
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Par Jérôme Sicard
Aux lendemains de la journée EAM Day organisée par Sphere à Genève, Guillaume de Boccard revient sur les principaux points à retenir du panel consacré aux audits prudentiels et aux premiers retours d’expérience.
Selon quels critères les gérants doivent-ils choisir leur auditeur?
Il faut commencer par s’assurer que l’auditeur maîtrise bien les principes de la gestion de fortune et des services financiers, qu’il comprenne les activités spécifiques à chaque gérant, leurs différents modèles, leur mode opératoire et les produits utilisés. Les auditeurs n’ont pas tous cette voilure. Au-delà de son expertise, l’auditeur doit pouvoir travailler en bonne entente avec les responsables Compliance. Je rappelle en effet que le contrôle s’effectue sur trois niveaux : le gestionnaire, son service compliance, et l’auditeur. Ces trois-là sont tenus de se rassembler sur un calendrier et des objectifs communs, avec l’envie d’avancer ensemble.
Comment l’audit s’inscrit-il dans la continuité de l’autorisation FINMA?
Dans la pratique, les premiers audits permettent à l’organisme de surveillance, par le biais des auditeurs, de vérifier que les éléments présentés à la FINMA dans le cadre de la demande d’autorisation ont bien été mis en place. Il s’agit de démontrer que les engagements pris envers la Finma ont été tenus d’un point de vue fonctionnel. Maintenant, il faudra probablement un ou deux audits pour que tous les gestionnaires rentrent parfaitement dans les clous.
Dans la façon dont les gérants font évoluer leurs services, comment doivent-ils tenir compte du changement réglementaire?
Il ne s’agit pas seulement de la façon dont ils font évoluer leurs services, mais aussi de la façon dont ils font évoluer leur organisation. Ils doivent se montrer totalement transparents auprès de la Finma, quelles que soient les transformations entreprises : un changement dans la structure actionnariale, de nouvelles participations dans des filiales, la nomination de nouveaux membres au conseil d’administration. Il en va de même pour les changements opérés dans les fonctions de contrôle, de compliance et de gestion des risques.
Quant aux services à proprement parler, chaque modification apportée à la gamme proposée doit être soumise à une autorisation préalable de la Finma. Un gérant qui se limite à la gestion discrétionnaire ne peut pas se lancer dans l’advisory s’il n’a pas d’abord averti la Finma et reçu son aval. Idem pour un simple service d’execution only.
Les gérants sont-ils bien conscients de ces obligations ?
Beaucoup les découvrent au fur et à mesure. Dans les points qui ne sont pas forcément évidents, je pense également aux formulaires de type B où les gérants doivent lister toutes leurs participations dans d’autres sociétés ou les mandats qu’ils exercent auprès d’autres sociétés. Un gérant qui souhaite par exemple investir dans l’entreprise d’un confrère doit d’abord informer la FINMA et obtenir son aval avant de lancer les démarches.
Comment sont vécus les audits par les gérants, d’après les retours que vous en avez ?
Je trouve qu’ils sont plutôt bien vécus, du moins pour les gérants avec lesquels notre cabinet travaille. Nous nous préparons depuis déjà quelques années. Un audit ne s’improvise pas, au risque de prendre trois fois plus de temps qu’il n’en fallait au temps des organismes d’autorégulation. Aujourd’hui, les audits durent peut-être un peu plus longtemps, mais ils se déroulent assez facilement pour peu que vous vous entouriez de professionnels expérimentés.
Quels sont les principaux problèmes rencontrés dans les audits?
Comme le résumait Stéphanie Hodara lors de notre panel, il s’agit surtout de l’évaluation des risques accrus en matière de LBA et l’analyse du risque LBA de la société dans son ensemble. Le premier point est bien sûr le plus important. Il n’est pas si facile de disposer des bons critères, adaptés à son activité, sur le plan de la LBA. On a vite tendance à se contenter d’un minimum d’éléments pour l’évaluation des clients concernés. Dans notre pratique, nous observons en général un minimum de 20% de relations classées comme étant à risque accrus En-dessous, cela est très souvent le reflet de critères de risque pas adaptés; l’inverse est également vrai si le pourcentage de relations à risque accru est trop élevé.
Sur le plan de la LSFin, les problèmes apparaissent surtout dans les contrôles d’adéquation ayant trait aux mandats Advisory. Le caractère approprié doit ressortir clairement et il faut pouvoir certifier que les clients ont reçu les informations adéquates. Les instruments financiers employés doivent aussi bien correspondre aux profils établis. C’est loin d’être évident et, à la lumière de ces premiers audits, on pêche encore un peu dans ce domaine.
Avez-vous repéré d’éventuels trous noirs dans ces audits ?
Non, je ne dirais pas qu’il y ait des trous noirs. En revanche, je reconnais que ces audits reposent pour beaucoup sur la façon dont les auditeurs eux-mêmes conçoivent leur approche qui est basée sur les risques. Certains aspects sont quelque peu délaissés pour le moment, car les auditeurs se concentrent principalement sur la LBA, la LSFin et la LEFin. Concernant les autres règlementations, il faut partir du principe que toutes les thématiques d’organisation, de conformité et de gestion des risques seront à termes passées en revue, avec des contrôles plus ou moins strictes selon une approche basée sur les risques. Les gérants ont donc intérêt à être en tout temps et en tout domaine à jour et en conformité. C’est le meilleur que je leur souhaite.
Guillaume de Boccard
Geneva Compliance Group
Guillaume de Boccard est associé gérant de Geneva Compliance Group, une société qui fournit des services de conseil en matière de conformité et de reporting fiscal aux institutions financières. Plus tôt dans sa carrière, il a travaillé au Credit Suisse à Zurich et chez Pictet, où il s’est concentré entre autres sur les projets Rubik, FATCA, Cross-border et CFTC. Guillaume est avocat au barreau de Genève et titulaire d’un MBA obtenu à l’INSEAD.
Guillaume de Boccard
Geneva Compliance Group
« Les audits sont plutôt bien vécus par les gérants qui ont su se préparer »
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