Transparence
Patrick Müller
Zwei Wealth
« Élargir le cadre, aller bien au-delà de l’habituel portefeuille Balanced »
Après un rally appréciable au premier trimestre, les actions suisses ont repiqué du nez en avril, prises sous le feu des taxes douanières exorbitantes envisagées par Donald Trump. A mi avril, le SPI avait perdu 2,6% depuis le début de l’année, et le SMI 3,3%. Rien d’inquiétant cependant au vu des excellents fondamentaux qu’affiche toujours l’économie suisse.
Après deux années de performances catastrophiques, le vent semblait avoir enfin tourné sur les bourses suisses au premier trimestre. A la fin mars, les indices avaient fortement rebondi, tandis que l’optimisme des investisseurs à l’égard de l’économie mondiale laissait place à un net regain de volatilité.
Au mois de janvier, il était en effet assez choquant de constater que la décote de valorisation des titres helvétiques atteignait un niveau sans précédent. Alors qu’historiquement les valeurs domestiques se traitent avec une prime de 5% par rapport aux indices mondiaux, c’est une décote de près de 15% qui prévalait en début d’année. Cette situation anormale parlait clairement en faveur des actifs risqués suisses. Cet argument reste d’ailleurs valable aujourd’hui, malgré la large surperformance du SPI sur les trois premiers mois de 2025.
Les valeurs suisses ont souvent montré leur capacité à bien se comporter dans un environnement de forte volatilité sur les marchés financiers mondiaux. L’escalade actuelle dans la guerre commerciale menée par les USA contre leurs partenaires commerciaux mène à un régime de volatilité extrême qui aurait dû normalement pousser les investisseurs vers la cote locale. C’était sans compter sur le caractère imprévisible du nouveau Président américain.
Il y a encore quelques semaines, les observateurs estimaient que la Suisse échapperait aux taxes douanières, malgré les menaces brandies par Donald Trump à l’égard du monde entier. Tout du moins, il n’était pas envisageable que des taxes supérieures à celles appliquées aux pays européens soient mises en place. C’est pourtant bien ce qui s’est passé la semaine dernière. A la suite de l’application de formules mathématiques obscures, les biens helvétiques exportés aux Etats-Unis risquent une taxe supérieure à 30%, un niveau jusque-là réservé aux produits chinois. Cette surprise explique la sous performance récente des bourses domestiques, qui n’ont pas résisté au crash boursier en ce début avril.
Dans un tel contexte, les petites et moyennes capitalisations sont à la peine. Sans surprise, ces entreprises ont fortement corrigé, en raison de leur fragilité financière plus élevée et de leur présence dans des secteurs plutôt cycliques comme l’industrie ou la chimie. Pas de répit non plus pour les valeurs défensives du secteur de la santé, qui ne seront pas épargnées par la politique tarifaire de Donald Trump. Dans la récente baisse, les investisseurs n’ont pas fait de distinction entre grosses et petites capitalisations, cycliques ou défensives. L’onde de choc s’est généralisée à l’ensemble du marché. Ou presque…
Car certaines valeurs parmi les « small cap » se sont relativement bien comportées dans ce moment de panique. Les plus petites sociétés, celles qui ne sont actives que sur le marché suisse et, par conséquent, ne sont que peu concernées par les taxes américaines, ont semblé bénéficier d’une carte joker. Une société de services comme Swisscom, qui opère en grande partie sur sol suisse ne se soucie guère des récents développements macroéconomiques. Même constat pour BKW, Allreal, les petits assureurs suisses ou l’ensemble des banques cantonales helvétiques. Ces valeurs sont à privilégier dans l’environnement actuel et sont largement représentées dans nos solutions d’investissement dédiées au segment des petites et moyennes capitalisations. L’accent est donc mis dans ce segment sur les sociétés exposées en premier lieu à la conjoncture domestique.
Car il faut souligner l’excellence des fondamentaux dont jouit l’économie suisse. Alors que la croissance du PIB ralentit dans la plupart des économies développées, Etats-Unis et Chine en tête, elle devrait rester stable, voire accélérer dans notre pays durant les deux prochaines années. Certes, des révisions baissières sont attendues au vu des récentes mesures mises en place par les Etats-Unis et de la perte de confiance qui en a suivi chez les entrepreneurs. Mais l’impact devrait rester limité pour le PIB suisse. Idem pour les bénéfices des entreprises suisses, qui s’inscrivent dans une tendance de révisions haussières. Notons que la BNS, en assouplissant fortement sa politique monétaire durant les derniers trimestres, a sans doute contribué à préserver la compétitivité des sociétés exportatrices et à limiter l’appréciation du franc, favorisant ainsi la croissance.
Au vu de ce qui précède, nous considérons comme injustifiée la décote que les actions domestiques continuent d’afficher par rapport à leurs homologues mondiales, même après la surperformance des indices SMI et SPI sur le premier trimestre. Le retour à une prime de valorisation est désormais probable au vu des incertitudes économiques, de la situation géopolitique et de la visibilité réduite qui prévaut quant à l’orientation de la croissance mondiale. Nous recommandons dès lors de conserver une exposition substantielle aux actions helvétiques en privilégiant notamment les petites capitalisations domestiques, qui continueront à tirer leur épingle du jeu sur les prochains mois.
Daniel Steck
Piguet Galland
Daniel Steck cumule près de 25 années d’expérience dans le domaine de la finance. Après une première expérience dans l’analyse financière chez Lombard Odier, notamment sur le secteur de la santé, il a continué sa carrière chez Reyl & Cie, comme analyste et gérant de portefeuille. Il a rejoint Piguet Galland en 2018 comme gestionnaire senior pour prendre en charge de la gestion des différents fonds actions et certificats thématiques sur la Suisse et l’Amérique du Nord.
Avec les « smart contracts » que la blockchain a rendu possibles, le web est en pleine évolution. Sous le label Web3, comme l’explique Dramane Meite, il ouvre de nouvelles opportunités dans des domaines tels que les plateformes de type Ethereum, les places de marché, les jeux « play-to-earn » et quelques autres concepts 100% décentralisés.
Le potentiel des crypto-actifs va bien au-delà des simples paiements. La technologie blockchain a permis de créer une large gamme d’applications qui suppriment le besoin d’intermédiaires grâce à des réseaux décentralisés soutenus par des actifs numériques.
Les “smart contracts”, des accords auto-exécutables qui automatisent les transactions et éliminent les intermédiaires, sont l’une des utilisations les plus marquantes de la blockchain. Ils sont employés pour des transactions financières ou juridiques, pour le paiement direct d’artistes, ainsi que pour de nombreux autres cas. Des entreprises comme Starbucks, Nike et JPMorgan les utilisent pour offrir à leurs clients de nouveaux services nouveaux, plus efficaces.
Basés sur la transparence et l’efficacité, les smart contracts favorisent aussi l’adoption des produits et services du Web3. Comment définir alors le Web3 et pourquoi les investisseurs devraient-ils s’y intéresser ?
Les trois phases de l’internet
Internet a connu une transformation spectaculaire depuis sa création. A ses débuts – le Web1 – il était une vaste bibliothèque d’informations, facilement accessible mais avec une interaction limitée. Le Web2 – l’ère actuelle – a entraîné une révolution sociale, permettant aux utilisateurs de se connecter, créer et partager du contenu sur des plateformes comme Facebook et YouTube. Cependant, ces plateformes ont la main mise sur le data de même que sur le contenu généré, soulevant des préoccupations liées à la vie privée et la propriété.
Le Web3, porté entre autres par les smart contracts, s’accompagne d’un changement de paradigme où les individus sont les seuls propriétaires de leurs données, contrôlent leurs actifs numériques et interagissent directement les uns avec les autres sans dépendre d’autorités centrales.
Grâce aux marchés décentralisés, le Web3 offre de nombreux avantages. Il permet à ses utilisateurs de posséder et d’échanger des œuvres d’art numériques via des NFT. Le modèle de jeu « play-to-earn » leur permet aussi de gagner des récompenses quand ils jouent, et les primes obtenues deviennent des actifs échangeables. Enfin, les plateformes de création de contenu décentralisées donnent aux créateurs le contrôle sur leur travail et un accès direct à leur audience.
Voici quelques exemples les plus marquants développés autour de ces smart contracts
Plateformes de contrats intelligents
Ethereum
La plateforme la plus établie, connue pour son écosystème de développeurs robuste et sa sécurité.
Solana
Une alternative rapide et à faible coût à Ethereum, gagnant en traction pour sa scalabilité.
NFT Marketplaces
OpenSea
Le plus grand et le plus populaire des marketplaces pour acheter et vendre des NFTs dans diverses catégories.
Rarible
Marketplace NFT décentralisé avec un accent sur l’autonomisation des créateurs et la gouvernance communautaire.
Jeux Play-to-Earn
Axie Infinity
Un pionnier dans l’espace play-to-earn, où les joueurs élèvent et combattent des créatures pour gagner des récompenses.
Decentraland
Jeu de métavers où les joueurs possèdent des parcelles de terrain virtuel et peuvent créer des expériences ou monétiser leurs créations.
Finance décentralisée (DeFi)
Uniswap
Le principal échange décentralisé (DEX), permettant le trading pair-à-pair de cryptoactifs sans intermédiaires.
Aave
Plateforme de prêt DeFi où les utilisateurs peuvent emprunter et prêter des cryptoactifs, gagnant des intérêts sur leurs avoirs.
Risques et opportunités
Le potentiel du marché pour les applications Web3 est immense. Pour les investisseurs, le champ des possibles est tout aussi étendu, mais il comporte aussi des risques. Les vulnérabilités des contrats intelligents et les problèmes opérationnels de la blockchain peuvent entraîner des pertes financières. Parfois, le pouvoir de décision pour certains nouveaux projets est concentré, avec des droits de vote distribués de manière inégale. De plus, les cadres réglementaires pour le Web3 sont en cours d’évolution, créant une certaine incertitude pour les entreprises et les investisseurs.
L’avenir du Web3 n’en reste pas moins prometteur. Ethereum est actuellement la principale plateforme de contrats intelligents, mais des solutions concurrentes comme Solana émergent. De nouvelles solutions construites sur ces réseaux, appelées « Layer-2 », aident à la scalabilité de ces réseaux et réduisent les frais et autres coûts ayant créé des obstacles à l’adoption.
À mesure que cette industrie évolue, le Web3 offre une opportunité massive de remodeler internet et de redéfinir la propriété à l’ère numérique. Les plateformes de contrats intelligents et leurs applications continueront de perturber les industries traditionnelles et de libérer toute la capacité d’un internet véritablement décentralisé.
Dramane Meite
Hashdex
Dramane Meite est responsable des nouveaux produits chez Hashdex, avec plus de 10 ans d’expérience dans les marchés financiers, la gestion d’actifs et la fintech. En poste auparavant chez Pimco, il a piloté les initiatives stratégiques et l’innovation en tant que Business Manager au bureau exécutif, puis en tant que stratège produit dans le groupe Solutions Client et Analytics. Il a également travaillé dans la vente, le trading et la trésorerie à la Standard Chartered Bank et à la Société Financière Internationale. Dramane Meite détient un MBA de l’Université Stanford, ainsi qu’une maîtrise en statistiques et économie. Il est titulaire du CFA.
Zwei Wealth a lancé son portail Transparence, pour donner aux clients davantage de visibilité sur les offres que leur destinent les banques et gestionnaires de fortune. Mais, pour Patrick Müller, le portail doit également encourager les gérants à élever un peu plus encore la qualité de leurs services.
Lors d’une interview réalisée avec SPHERE il y a quelques années, vous aviez exprimé votre désir de contribuer à l’amélioration des services financiers en Suisse. Depuis lors, quelles avancées avez-vous pu observer?
Nous poursuivons toujours cet objectif, avec la même détermination. Bien que l’écosystème financier suisse soit assez remarquable, on ne peut pas vraiment dire qu’il soit à la pointe en termes de concurrence et de transparence. C’est un inconvénient auquel nous souhaitons remédier pour le bien de l’ensemble du secteur.
Deux améliorations majeures méritent cependant d’être notées. Il y a cinq ans, à peine un tiers des gestionnaires de fortune ou des banques répondaient à des request for proposals. Aujourd’hui, seuls un tiers d’entre eux refusent d’y prendre part, ce qui montre bien qu’un environnement plus concurrentiel se crée. Le deuxième changement concerne la volonté des clients de changer de banque ou de gestionnaire. Elle a considérablement augmenté. Chaque année, de plus en plus de personnes préfèrent baser leurs décisions sur des offres concurrentielles, adoptant ainsi une approche plus dynamique.
Selon vous, quels domaines nécessitent encore des améliorations ?
Il y a deux principaux domaines. L’un est axé sur la technologie – c’est le contenant en quelque sorte – et l’autre sur les investissements – c’est le contenu. Sur le plan technique, la gestion de patrimoine devient de plus en plus modulaire, et les clients souhaitent combiner beaucoup plus de services ou de solutions qu’avant, ce qui n’est pas encore suffisamment facile à réaliser sur le plan technique.
Sur le plan du contenu, les gestionnaires de patrimoine doivent passer à la vitesse supérieure, être en mesure de proposer et d’intégrer des investissements dans les marchés privés de bonne qualité, en plus des placements traditionnels. Ils doivent élargir le cadre et aller bien au-delà de l’habituel portefeuille « balanced », menacé d’obsolescence.
Quels sont les principaux services que vous proposez avec votre Transparenz Portal ?
Nous offrons trois grands types de services. Tout d’abord, nous permettons aux clients d’effectuer gratuitement leurs recherches, au cas où ils souhaitent changer de banque ou de gérant indépendant. Chacun d’entre eux peut alors recevoir gratuitement des propositions provenant de nombreux wealth managers. Ensuite, nous disposons d’un espace où les clients peuvent comparer différentes solutions, y compris celle qu’ils utilisent, en se concentrant sur les risques, les coûts et la qualité du gestionnaire. Cette évaluation est également gratuite.
Enfin, nous guidons les clients à la recherche de solutions spécifiques, telles que des plans de prévoyance ou des investissements en private equity. Nous avons mis en place un réseau de prestataires spécialisés, y compris pour les marchés privés, que les clients peuvent consulter. Nous avons également rendu ce réseau accessible à des clients institutionnels.
Quels critères utilisez-vous pour évaluer les banques et les gestionnaires de patrimoine ?
L’évaluation des banques et des gérants indépendants ne repose pas uniquement sur leurs performances. Nous appliquons en fait quatre critères. Le premier est la compétence, que nous appelons le « provider rating ». Ensuite, nous prenons en compte le track record, qui inclut la performance, le risque et la consistance. Le troisième critère concerne les coûts, et nous nous basons alors sur le total expense ratio. Enfin, nous évaluons la qualité, c’est-à-dire les composantes qualitatives importantes pour les clients, que nous appelons l’adéquation de la solution. Ces quatre critères permettent une évaluation sur mesure des gestionnaires et des solutions qu’ils proposent.
Dans le communiqué de presse que vous avez envoyé pour annoncer le lancement du Transparenz Portal, vous mentionnez une certaine confusion quant aux coûts associés à la gestion de patrimoine. Quelle en est, selon vous, la cause ?
Cette confusion provient principalement de l’incapacité des clients à évaluer l’ensemble de leurs coûts. Les clients se voient souvent proposer un all-in fee, souvent d’environ 1 %, mais cet all-in fee n’inclut pas tout. De nombreux frais supplémentaires s’y ajoutent, que les clients ignorent. En réalité, les coûts peuvent facilement doubler. Le all-in fee ne couvre peut-être en réalité que 50 à 60% de l’enveloppe globale, d’où cette confusion.
Patrick Müller
Zwei Wealth
Patrick Müller a occupé différentes fonctions dans le secteur bancaire et financier, notamment auprès de Credit Suisse et d’UBS. Il a été chargé en particulier d’établir une fondation philanthropique et de gérer les marchés Israël et Afrique. En outre, en tant que responsable Sales & Marketing, il a assumé la responsabilité du développement et de la commercialisation de solutions d’investissement. Il détient un master de l’Université de Saint-Gall.
Patrick Müller
Zwei Wealth
« Élargir le cadre, aller bien au-delà de l’habituel portefeuille Balanced »
Daniel Steck
Banque Piguet Galland
Quand Donald Trump siffle la fin de la récréation
Patrick Müller
Zwei Wealth
« Élargir le cadre, aller bien au-delà de l’habituel portefeuille Balanced »
Chez Citadel Finance, comme chez beaucoup de gestionnaires de fortune, les investissements durables ne représentent encore qu’une moindre proportion dans les portefeuilles. La demande se précise, mais elle se heurte encore à une certaine inertie. Marc Lemaire en livre ici quelques explications.
Quels sont les attentes de vos clients en matière d’investissements durables ?
Elles sont relativement limitées. Jusqu’aujourd’hui, nous n’avons été que très peu sollicités sur ces questions. Elles ne semblent pas préoccuper nos clients outre mesure. Ils sont plus sensibles aux meilleures performances qu’il est possible d’obtenir avec leurs portefeuilles. Alors oui, nous avons quelques clients qui souhaitent exclure certaines valeurs, mais nous n’avons pas vraiment de demande pour une gestion globale entièrement tournée sur l’environnemental, le social et la gouvernance.
Quelles proportions représentent les investissements durables dans les portefeuilles que vous gérez ?
C’est difficile à mesurer précisément, mais je ne pense pas que nous allions au-delà des 10%. Attention, nous ne sommes bien évidemment pas hermétiques aux investissements durables. Deux des fonds appartenant à la gamme que propose Trillium, notre filiale asset management, l’un investi en actions et l’autre en obligations, répondent d’ailleurs à l’article 8 de la SFDR. Mais la prise de conscience n’est peut-être pas aussi profonde que certains le laissent penser.
Comment expliquez-vous ce décalage ?
Il y a d’abord des perspectives qui divergent entre les générations. Les plus seniors n’ont pas grandi avec cette conscience aigüe de l’environnement et de la gouvernance. Il faut tenir compte de ce décalage. Chez les seniors, nous sentons également une certaine crispation par rapport au matraquage ou à la surabondance d’informations qui accompagne la thématique ESG. Le retour de nos clients est que le discours servi tourne parfois à la culpabilisation.
Voyez-vous un changement d’attitude dans le comportement des nouvelles générations parmi vos clients ?
Oui, c’est clairement un sujet que nous abordons davantage avec les nouvelles générations, quel que soit leur profil. Les uns héritent de leurs parents, les autres se sont construits comme entrepreneurs, mais dans la plupart des cas, ils considèrent que leur engagement ESG doit se manifester dans leur manière de vivre et de diriger leurs affaires plutôt que dans leurs placements financiers
Avec nos clients, nous sommes encore loin de la dimension prise par l’ESG chez les investisseurs institutionnels qui ont remodelé la structure de leurs portefeuilles, ou chez certains gestionnaires d’actifs qui ont complètement repensé leur offre. Ils sont un peu en avance car il me semble que cette tendance de long terme n’a pas encore trouvé chez les investisseurs privés autant de résonnance. Il faut en effet noter que les critères d’évaluation sont parfois discutables. A titre d’exemple, une compagnie pétrolière qui investit beaucoup dans les énergies renouvelables doit-elle être exclue d’un portefeuille ou pas ?
Dans tous les produits estampillés ESG que vous voyez circuler, lesquels vous semblent plus particulièrement intéressants ?
Je regarde par exemple les ratings ESG que propose une plateforme en ligne sur plusieurs milliers d’entreprises, à partir des évaluations que lui transmettent ses membres. Je trouve ce modèle participatif très original, avec des infos et des données qui remontent du terrain, plutôt que des rapports ESG de prestataires parfois influencées par le greenwashing des compagnies qu’ils évaluent.
Pour s’en tenir aux produits, je trouve par exemple intéressante l’offre d’un de nos confrères qui propose un fonds exclusivement investi dans de l’or physique traçable et bénéficiant de labels de production éthiques. A mon sens, c’est le genre de produits qui peut avoir un réel impact sur le respect des droits humains et sur l’environnement, même si l’investisseur doit accepter de payer une prime raisonnable.
Marc Lemaire
Citadel Finance
Marc Lemaire est le directeur général de Citadel Finance depuis 2014. Il a rejoint en 2010 la société de gestion créée par Anne de Boccard. Gestionnaire de formation, Marc Lemaire a entamé son parcours professionnel au Credit Suisse, d’abord à Genève, puis au bureau d’Istanbul qu’il a lancé en 1998. En 2001, il a choisi de poursuivre sa carrière au sein de HSBC Private Bank pour se consacrer essentiellement à la clientèle turque.
Dans un monde où l’autonomisation financière et l’égalité des sexes sont essentielles pour un développement durable, Colivar Gestion se distingue par son approche. Tirant parti de la puissance de l’intelligence artificielle, elle vise à démocratiser la gestion de patrimoine pour les femmes, en abordant l’écart de richesse et en redéfinissant la finance durable. Pour elle, la durabilité transcende les métriques ESG traditionnelles et les ratings produits, en se concentrant sur des solutions financières impactantes, inclusives et transformatrices.
Malgré des progrès significatifs, l’écart de richesse entre les sexes reste un problème critique. En moyenne, les femmes gagnent moins, épargnent moins et investissent moins que les hommes. Cette disparité est aggravée par une espérance de vie plus longue et des interruptions de carrière souvent liées aux responsabilités de soins. Les services de gestion de patrimoine traditionnels se sont principalement adressés aux clients masculins, laissant de nombreuses femmes mal desservies et sous-représentées dans la prise de décisions financières.
Les femmes comme catalyseurs d’une économie durable
Les contributions des femmes dans la finance sont vitales pour créer une économie durable et assurer un avenir prospère. Traditionnellement, les femmes ont été encouragées à épargner et à gérer les finances du ménage plutôt qu’à investir. Cependant, avec une augmentation de la richesse, des modes de vie changeants et une crise de confiance croissante envers les institutions financières, le moment est idéal pour créer des outils qui permettent aux femmes d’investir et de prendre le contrôle de leurs finances. La plateforme Colivar se distingue en exploitant les perspectives et les approches de décision uniques des femmes pour favoriser une croissance économique plus durable et inclusive. Au cœur de l’approche innovante de Colivar se trouve son planificateur de parcours financier piloté par l’IA. Cet outil est conçu pour comprendre et s’adapter aux besoins et objectifs individuels de chaque femme, offrant un niveau de personnalisation auparavant inaccessible.
En utilisant des algorithmes de machine learning avancés, le planificateur de parcours financier analyse en continu les tendances du marché, les indicateurs économiques et les données financières individuelles pour fournir des recommandations d’investissement personnalisées. Ces recommandations sont alignées avec l’appétit pour le risque de chaque femme, ses capacités, son horizon temporel et ses objectifs financiers, garantissant que son portefeuille d’investissement est optimisé pour la croissance et la sécurité.
Le planificateur piloté par l’IA n’est pas une solution ponctuelle mais un outil dynamique qui évolue avec le parcours financier de l’utilisateur.
Créer un impact par la finance durable
La véritable durabilité implique la création de systèmes financiers inclusifs et équitables qui autonomisent tous les individus, en particulier ceux qui ont été historiquement marginalisés. Les femmes autonomisées sont plus susceptibles d’investir dans leurs communautés, de soutenir les entreprises locales et de contribuer à la croissance économique. Cet effet d’entraînement va au-delà de la stabilité financière individuelle, favorisant une économie plus inclusive et résiliente.
L’approche de Colivar promeut également la diversité au sein du secteur des services financiers. En adaptant leurs services pour répondre aux besoins uniques des femmes, ils remettent en question les normes et pratiques traditionnelles qui ont exclu les femmes de la prise de décisions financières. Ce changement profite non seulement aux clientes individuelles mais encourage également un secteur financier plus diversifié et inclusif.
Démocratiser la gestion de patrimoine représente une approche transformative de la finance durable. Ce modèle innovant favorise non seulement l’égalité des sexes mais contribue également à une économie plus inclusive et durable.