• Interview Rochus Appert
  • Country Head 
  • PGIM Investments Suisse

« Notre stratégie de distribution s’aligne aussi sur le cycle d’investissement »

Géant américain de la gestion d’actifs, PGIM poursuit son expansion sur le marché suisse, où son responsable, Rochus Appert, souhaite lui donner une assise locale à la hauteur de son envergure mondiale. Un développement mené avec la volonté d’apporter des solutions autant que des produits à ses investisseurs.

Par Jérôme Sicard

Que souhaitez-vous accomplir avec PGIM en Suisse ?
PGIM est un leader mondial dans la gestion d’actifs. Cependant, en Suisse, notre notoriété ne reflète pas encore l’envergure que nous avons prise à l’échelle mondiale. PGIM gère plus de 850 milliards de dollars en titres à revenu fixe, dont 100 milliards en obligations high yield et en prêts levier, 50 milliards en dette émergente, et 240 milliards en multi-secteur. Nous sommes par ailleurs le quatrième émetteur mondial de CLO.
Nous supervisons aussi plus de 100 milliards de dette privée, pour des entreprises dont l’EBITDA va de 8 à 80 millions de dollars. Nous sommes le troisième plus grand gestionnaire de biens immobiliers au monde, avec plus de 200 milliards d’actifs, et Jennison Investments, notre gérant Actions, compte lui aussi plus de 200 milliards de dollars en AUM.
Nous sommes évidemment un acteur majeur, mais en Suisse, notre marque reste en deça de son potentiel. Notre objectif est donc simple : positionner PGIM parmi les principaux asset managers sur ce marché grâce à nos compétences dans les investissements liquides et alternatifs.

Où en êtes-vous de vos développements en Suisse ?

Nous gérons un portefeuille qui devient significatif, principalement dans le fixed income et l’immobilier. Au niveau de PGIM, notre marché se divise en deux segments : les grands acteurs institutionnels — banques, fonds de pension et certains family offices — qui peuvent allouer de gros montants, et les gérants indépendants qui investissent des montants plus petits mais répétés. Aujourd’hui, les banques et les fonds de pension sont nos plus grands clients.
En plus de cela, nous exploitons des outils numériques pour diffuser des contenus qui présentent une forte valeur ajoutée directement à nos investisseurs. Nous disposons d’énormément d’informations sur notre plateforme – que nous voulons rendre accessibles de la manière la plus efficace qui soit. La distribution en mode digital est un axe clé pour nous à l’avenir. Il s’agit pour nous de diffuser le bon contenu à la bonne personne, au bon moment et au bon endroit.

Quels sont les facteurs clés pour étendre votre clientèle en Suisse ?
Je vois trois éléments essentiels : la marque, le produit, et la performance.
La marque doit inspirer confiance, créer matière à discussion et refléter un certain niveau d’innovation. Avec la marque PGIM, nous avons de quoi nous positionner comme un partenaire incontournable pour des investisseurs qualifiés.
En ce qui concerne les produits, nous proposons une large gamme, mais le timing est crucial. Notre stratégie de distribution s’aligne aussi sur le cycle d’investissement — en mettant l’accent sur les bons produits au bon moment, depuis les opportunités qui apparaissent en début de cycle jusqu’aux allocations en fin de cycle.
Quant à la performance, pour réussir, il faut se classer dans le top décile. C’est le critère de référence.

Dans la gamme PGIM, quels produits intéressent plus particulièrement les investisseurs suisses ?
Ils sont plus sensibles aux high yields, américaines et européennes, ainsi qu’aux obligations d’entreprises et à la dette émergente. Ils regardent aussi le crédit multi-sectoriel. Nos stratégies de rendement absolu, comme notre fonds Credit Opportunities, qui a enregistré des rendements à deux chiffres l’année dernière, suscitent de même beaucoup d’intérêt.
Du côté des actions, c’est aussi le cas de notre stratégie Growth. Dans un environnement de faible croissance du PIB, notamment en Europe, les investisseurs recherchent des titres refuges. Mais lorsque la croissance redémarre, ils veulent y participer. Notre approche nous pernet donc d’identifier des entreprises capables de prospérer dans toutes les conditions de marché. Nous voyons un clair regain d’intérêt pour cette stratégie, alors que les investisseurs se positionnent pour le prochain cycle.

Comment PGIM diversifie-t-il sa gamme de produits ?
Nous explorons toujours des opportunités à partir desquelles nous allons pouvoir ajouter de nouvelles dimensions à notre offre, en capitalisant sur nos points forts, là où nous sommes capables de nous différencier. La diversification passe aussi par le timing. Avec une gamme aussi étendue que la nôtre, tous les produits ne sont pas pertinents en même temps. Encore une fois, l’important est de promouvoir la bonne solution au bon moment, ce qui nécessite un dialogue constant avec les investisseurs.
Prenons les stratégies long-short, par exemple. Dans l’environnement de forte croissance économique qui a prévalu entre 2015 et 2020, les fonds spéculatifs ont eu du mal. Mais aujourd’hui, les conditions de marché ayant évolué, ils reprennent du sens. Identifier ces tendances tôt et aligner les produits avec les besoins des investisseurs est en soi un cycle d’innovation en continu.

Comment voyez-vous l’évolution de l’industrie de la gestion d’actifs en Suisse ?
De 2015 à 2020, l’innovation a été portée par l’investissement responsable et thématique. Aujourd’hui, elle se tourne vers les investissements privés, en particulier le prêt direct. L’essor des fonds evergreen, qui permet la démocratisation des actifs alternatifs, rend le crédit privé plus accessible à une base d’investisseurs plus large.
La taille est un autre facteur déterminant. Dans cette industrie, vous êtes soit grand, soit petit — il y a peu de place entre les deux. Les grandes entreprises bénéficient d’économies d’échelle, réussissant à vendre une large gamme de produits tout en optimisant les coûts. En revanche, les asset managers de type boutique auront toujours leur place. Leur haut degré de spécialisation les rend indispensables dans leur niche.

Comment pensez-vous pouvoir saisir les opportunités qui se présentent sur le marché suisse?
Nous avons l’intention de nous renforcer localement. Nous allons déménager dans de nouveaux bureaux à Zurich et nous voulons élargir notre présence en Suisse de manière plus générale. D’un point de vue produit, nous souhaitons mettre davantage en avant les actifs alternatifs.
Malgré notre envergure mondiale, nous restons un acteur relativement nouveau sur ce marché et nous l’abordons avec une mentalité « high impact, low ego ». Les investisseurs recherchent de la diversification, des marques alternatives et, par-dessus tout, des solutions. C’est là que nous intervenons.
Prenons notre stratégie de crédit multi-sectoriel, par exemple — elle pourrait bien être considérée comme la perle dans tout ce que nous offrons de liquide. Elle propose une exposition Investment Grade, avec des options allant de zéro à six ans en termes de duration. C’est un outil simple et efficace pour les gérants indépendants qui cherchent à construire des portefeuilles de crédit diversifiés tout en maintenant une certaine flexibilité dans la gestion de la duration.

Rochus Appert

PGIM

Rochus Appert est Country Head de PGIM Investments en Suisse depuis novembre 2023 et il en assure également la direction commerciale. Fort de 30 ans d’expérience dans l’industrie financière suisse, il était dernièrement Head of Discretionary Sales Switzerland chez Columbia Threadneedle. Auparavant, il a occupé divers postes de direction, notamment chez BMO Global Asset Management – avant son acquisition par Columbia Threadneedle – ainsi que chez State Street Global Advisors, Credit Suisse et West LB.

 

    Vous aimerez aussi

    LEADERS
    Focus

    Focus

    Aline Fournier
    Geneva Compliance Group
    « Nous intervenons à cette interface : entre complexité juridique et réalité opérationnelle »

    LEADERS
    Expansion

    Expansion

    Florian Rais
    Criptonite Asset Management
    « Devenir le partenaire de référence des hedge funds crypto sur les grands marchés »

    LEADERS
    On top

    On top

    Chantal Baer
    Swiss House of Brands
    La stratégie de marque, un levier clé dans une IPO ou une cession

    SOLUTIONS EAM
    Double

    Double

    Sébastien Berthoud
    Mirante Fund Management
    « Nous sommes à la fois un asset manager et un wealth manager »

    Sphere

    The Swiss Financial Arena

    Depuis sa création en 2016, SPHERE anime la communauté des pairs de la finance suisse. Elle leur propose en français et en allemand différents espaces d’échange avec un magazine, des hors-série réservés aux Institutionnels, un site web et des évènements organisés tout au long de l’année pour aborder de nombreuses thématiques. Toutes les parties prenantes de la finance, l’un des plus importants secteurs économiques de Suisse, ont ainsi à leur disposition une plateforme où il leur est possible d’échanger, de s’informer et de progresser.