- Interview Torsten von Bartenwerffer
- CEO
- Fisch Asset Management
« Ce retour des taux d’intérêt marque la résurgence du fixed income »
Fisch Asset Management, la boutique zurichoise dédiée au fixed income, vient de célébrer son trentième anniversaire. En cadeau, une remontée des taux qui satisfait pleinement Torsten von Bartenwerffer, son CEO, qui voit notamment les convertibles – spécialité maison – revenir sur les devants de la scène.
Par Jérôme Sicard
Comment avez-vous perçu l’évolution du monde obligataire au cours de ces 5 à 10 dernières années ?
Nous avons connu deux phases bien distinctes. Il y a d’abord eu cette longue période de baisse des taux d’intérêt, qui a poussé tout le monde à rechercher des rendements supplémentaires dans différents segments du marché fixed income. Les investisseurs ont donc souvent poussé sur le risque ou la duration, et se sont même aventurés dans des stratégies plus exotiques telles que les stratégies basées sur la volatilité.
Puis, au cours des trois ou quatre dernières années, les taux d’intérêt ont effectué leur retour. L’an passé, en janvier, la dernière obligation d’État japonaise assortie d’un taux d’intérêt négatif est ainsi repassée en territoire positif. Ce changement marque clairement la fin d’une époque. Pour moi, comme pour Fisch Asset Management, je me réjouis de ce retour des taux d’intérêt, car il marque la résurgence de la classe obligataire.
Comment vous êtes-vous adapté à l’environnement très difficile de ces cinq dernières années ?
Il est vrai que ces années ont été pénibles pour les gestionnaires spécialisés fixed income. Nous avons tous souffert. Toutefois, cela nous a également incités à devenir plus efficaces dans nos processus d’investissement et dans nos modes opératoires. Nous avons renforcé nos contrôles de risque – tant en matière de conformité que de risque – et intégré différents systèmes pour rationaliser nos flux de travail.
Nous avons veillé à simplifier nos processus et à mieux les structurer pour être plus productifs et faire en sorte que notre boutique puisse s’aligner en termes de performance sur les grandes enseignes du fixed income. C’est un peu comme perdre du poids – ce n’est pas toujours un effort agréable, mais on en ressort plus mince et en meilleure santé. Nous avons d’ailleurs vu cette transformation s’opérer dans l’ensemble du secteur.
Cela dit, Fisch Asset Management reste très solide. Nous avons récemment célébré notre trentième anniversaire, ce qui témoigne de la vision à long terme de nos fondateurs. Ils ont construit la société en sachant que les marchés connaissent des hauts mais aussi des bas et ils nous ont dotés d’une forte assise financière pour passer sans encombre les moments plus difficiles.
Avez-vous modifié la façon dont vous construisez votre gamme de produits pour vous adapter aux circonstances?
Nous n’avons pas changé d’approche. Nous nous en tenons à ce que nous maîtrisons. Notre stratégie repose sur deux piliers: les stratégies classiques avec les obligations d’entreprises à haut rendement, le crédit mondial voire les marchés émergents de manière un peu plus marginale – et les obligations convertibles, qui constituent notre classe emblématique. Il est d’ailleurs intéressant de noter que ces obligations convertibles reviennent en force et que nous y voyons des opportunités significatives.
Quels sont les marchés sur lesquels vous vous concentrez ?
Nous nous concentrons principalement sur les régions germanophones en Europe. Environ deux tiers de nos actifs proviennent d’Allemagne, le tiers restant de Suisse.
En termes de clients, 37% de nos actifs proviennent de fonds de pension, 17 % de banques et le reste de fondations, de compagnies d’assurance, de trésoreries d’entreprise et de family offices. Dans l’ensemble, notre clientèle est composée à 90 % d’institutionnels.
Comment vos investisseurs ont-ils ajusté leur allocation en titres à revenu fixe au cours des cinq dernières années ?
La plupart de nos investisseurs procèdent à des allocations stratégiques, de sorte que leurs pondérations sont restées en fait relativement stables. Cependant, lorsque les taux d’intérêt ont bougé, certains ont opté pour des durations plus longues, des secteurs plus risqués ou se sont même rabattus sur les marchés privés. Aujourd’hui, avec la normalisation des taux d’intérêt, nous constatons un intérêt moindre pour ce type d’ajustements.
Quels leviers allez-vous activer pour renforcer votre croissance et retrouver vos niveaux de 2021 ?
Le marché des obligations convertibles s’est contracté au cours des trois dernières années, et nous avons subi comme beaucoup de nos confrères, mais nous avons aussi mis à profit cette période pour renforcer nos équipes de gestion. Dans la mesure où nous avons une structure robuste, fondée sur une vision à long terme, nous avons su convaincre plusieurs gestionnaires très confirmés de nous rejoindre, en particulier dans le domaine du high yield.
Cet environnement compliqué nous a en fait aidés à constituer une équipe plus étoffée que nous n’aurions pu le faire en des temps plus cléments. Aujourd’hui, nous comptons une vingtaine de portfolio managers, et notre objectif est de capitaliser sur leur expertise pour optimiser nos performances.
Quels sont les segments fixed income qui, selon vous, offriront les opportunités les plus intéressantes dans les années à venir ?
Comme le renouvellement des cycles nous l’enseigne, les segments qui ont historiquement bien performé, comme les obligations d’entreprises, devraient continuer à le faire. Mais je vois surtout des opportunités exceptionnelles dans les obligations convertibles. L’environnement actuel leur est très favorable et elles offrent d’énormes avantages.
Dans l’allocation d’actifs, elles se rangent dans la classe fixed income mais elles proposent aussi une exposition semblable à celle des actions. Les arbitrages qui s’en suivent son intéressants. Les convertibles deviennent par exemple très attrayantes dans les scénarios où l’inflation repart – ce qui n’est pas à exclure – car les actions ont tendance à être avantagées dans de telles conditions.
Par ailleurs, les convertibles ont prouvé à maintes reprises leur capacité à offrir sur le long terme des rendements supérieurs ajustés du risque, ce qui en fait un choix assez convaincant pour les investisseurs tournés vers l’avenir.
Torsten von Bartenwerffer
Fisch Asset Management
Torsten von Bartenwerffer est le CEO de Fisch Asset Management depuis novembre 2023. En tant que président du Portfolio Management Board, il est en outre responsable de la gestion de portefeuille au sein de la direction. Avant de rejoindre Fisch en octobre 2021, il était Head Multi Asset au bureau de Zurich du groupe FERI. Il était également membre du Steering Committee du FERI Cognitive Finance Institute à Francfort. Torsten a également occupé des postes de direction au sein du groupe Aquila (Hambourg) et a joué différents rôles auprès d’ISP Family Office, Clariden Leu et UBS. Torsten von Bartenwerffer a étudié l’économie d’entreprise et la gestion de la technologie à l’université de Saint-Gall, où il a ensuite obtenu son doctorat.
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