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- Interview Vivien Jain
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« Un processus de succession bien mené peut demander trois à cinq ans »
Plusieurs options s’offrent aujourd’hui aux gérants indépendants qui cherchent un repreneur. Ils sont nombreux dans cette situation aujourd’hui. Vivien Jain examine ici les différents scénarios à envisager, avec leurs avantages et leurs inconvénients. Quel que soit le schéma retenu, le facteur temps joue un rôle crucial dans le processus.
Par Jérôme Sicard
Pourquoi le thème de la planification de la succession est-il particulièrement pertinent pour vous en ce moment ?
Notre expérience, appuyée par les données du marché, montrent qu’au cours des prochaines années, environ 20 à 30 % des gestionnaires de fortune atteindront l’âge de la retraite fixé à 65 ans. Pour bon nombre d’experts, un processus de succession bien mené peut demander trois à cinq ans. Il est donc crucial, en tant qu’entrepreneur, de se pencher sur le sujet suffisamment tôt et d’avoir un plan directeur en tête. Il ne s’agit pas seulement de l’entreprise elle-même, mais aussi des clients qui souhaitent une solution durable. Sans clients, la société ne vaudrait – en forçant un peu le trait – presque rien. Dans la mesure où nous opérons dans un secteur hautement personnel et difficilement interchangeable, ce processus doit être mené avec le plus grand soin.
Quelles options les gérants indépendants devraient-ils envisager aujourd’hui lorsqu’il s’agit de leur succession ?
Il y a deux questions clés qui se posent : puis-je régler la succession en interne, avec peut-être des partenaires plus jeunes voire avec mes propres enfants, ou dois-je plutôt chercher une solution externe ? Une solution de succession interne peut être préparée par des remplacements anticipés au sein du service clientèle. Pour une solution externe, il faut d’abord trouver le repreneur adéquat, ce qui est souvent plus compliqué et prend plus de temps qu’on ne le pense.
Une autre voie est la consolidation – si l’on ne trouve pas de successeur adéquat, il reste la possibilité de s’associer à une autre société. Toutefois, cela nécessite d’abandonner sa propre entreprise et de s’intégrer dans une autre culture d’entreprise, ce qui ne peut fonctionner que si les valeurs et les méthodes de travail sont les mêmes. En outre, la volonté de lâcher prise est déterminante pour la réussite d’une succession.
Quelle serait, selon vous, la meilleure solution?
Il n’existe pas de « meilleure » solution, ou de solution universelle. Tout dépend toujours de la situation individuelle de l’entreprise : sa structure ? les attentes des propriétaires ? l’état d’esprit et l’appétit pour le risque des personnes concernées ? Et le temps pendant lequel le propriétaire souhaite rester actif ? Dans de nombreux cas, la situation actuelle se résume à une consolidation, ne serait-ce que pour des raisons de réglementation et de coûts. Le combattant solitaire a aujourd’hui la vie plus dure, raison pour laquelle les partenariats avec des entreprises partageant les mêmes idées sont souvent le meilleur choix. À la fin de la journée, la meilleure solution est toujours celle qui satisfait les clients.
Quelles sont les principales différences entre les asset deals et les share deals ?
Pour le vendeur, un share deal est souvent plus intéressant, car il y a des avantages fiscaux et il n’est pas nécessaire de liquider l’entreprise. L’acheteur reprend toutefois l’ensemble de la société, y compris toutes ses obligations, d’où la nécessité d’une due diligence approfondie. Les spécialistes du marché pensent que les coûts d’une bonne due diligence ne sont réellement rentables qu’à partir d’un volume d’actifs d’environ 1 milliard de francs. Pour des actifs plus petits, les dépenses peuvent être disproportionnées.
En revanche, un asset deal implique un nouveau transfert de la relation client. L’avantage pour l’acheteur est de pouvoir reprendre seulement les clients qui lui conviennent. Au sein du groupe Aquila, nous avons déjà expérimenté les deux variantes, ce qui nous donne une certaine flexibilité dans la gestion des solutions de succession.
Quel serait, selon vous, le pire scénario dans un processus de succession ?
Le pire des scénarios serait que la répartition des rôles entre le repreneur et le cédant ne soit pas clairement définie. De gros problèmes peuvent également survenir si les stratégies d’investissement diffèrent trop ou si des problèmes de santé doivent accélérer le processus. Le pire des cas est toutefois celui où le cédant n’arrive pas à lâcher prise. Il est crucial de fixer les règles du jeu suffisamment tôt afin d’éviter ce type de malentendus.
Comment Aquila soutient les sociétés de gestion qui s’engagent dans la phase de succession ?
Nous accompagnons nos partenaires dans toutes les phases de développement de leur entreprise, de la création à la planification de la succession. Notre réseau et notre longue expérience nous permettent de trouver le bon match pour une succession.
Nous avons déjà pu mettre en œuvre avec succès plusieurs solutions de succession, que ce soit par des transferts internes, des fusions ou l’intégration de partenaires externes. Par ailleurs, nous ne travaillons pas uniquement pour les sociétés Aquila, nous proposons notre expertise à l’ensemble du marché.
Quelles étapes préliminaires les gérants indépendants doivent-ils suivre pour réussir leur succession ?
L’étape la plus importante est de développer très tôt un plan directeur et de le revoir régulièrement. La famille ou le partenaire devraient être impliqués dans le processus, tout comme les clients, car leurs attentes jouent un rôle important.
Combien de temps faut-il prévoir pour une succession réussie ?
Si tout se déroule sans problème, le processus dure en général deux à trois ans. Mais si l’on doit encore chercher le successeur adéquat, cela peut prendre jusqu’à cinq ans. Plus on prend le temps de planifier, plus les options se multiplient.
Comment les clients doivent-ils être impliqués dans le processus de succession ?
Les clients devraient être informés à temps et complètement intégrés dans ce processus. En effectuant par exemple des visites en compagnie du successeur afin de renforcer la confiance. Une phase de transition d’environ deux ans me semble idéale pour que client puisse percevoir la continuité et s’en satisfaire.
Qu’est-ce qui est souvent négligé dans le processus de succession ?
Les facteurs humains sont souvent négligés dans la transmission. Beaucoup ne prennent pas le temps de réfléchir suffisamment tôt à la façon dont leur rôle évoluera après la passation, ni à la manière dont ils utiliseront le temps ainsi libéré. L’aspect émotionnel du détachement est fréquemment sous-estimé, tandis que l’attention se porte parfois de façon excessive sur les aspects financiers.
Vivien Jain
Aquila
Vivien Jain dirige la société Aquila en tant que CEO depuis 2021, succédant alors au fondateur de l’entreprise, Max Cotting, qui a pris de son côté la présidence du conseil d’administration. Âgée de 39 ans, elle fait partie de la famille Aquila depuis 2014 et a pris en 2016 la responsabilité des domaines juridiques, de la conformité et des risques. Avec sa double nationalité canadienne et suisse ainsi que ses racines indiennes, elle apporte une perspective aux multiples facettes. Vivien Jain a suivi des études de droit avant d’exercer différents postes dans des cabinets d’avocats en Suisse et à l’étranger, notamment au sein de la société d’audit et de conseil PwC à Zurich.
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