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Solutions Investissements

  • Dominique Boehler
  • Spécialiste Produits Dérivés
  • Société Générale Corporate & Investment Banking

Les warrants inline, une réponse possible à la faible volatilité des marchés

Dans un contexte de faible volatilité, les warrants inline offrent une perspective de rendement intéressante. Il faut toutefois bien prendre la mesure des risques qui leur sont associés, lorsque les prix des sous-jacents sortent de leur corridor.

Francesco Mandalà

Alors que les warrants classiques bénéficient de fortes fluctuations des marchés, les warrants inline déploient leur potentiel dans des phases atones. De fait, ils permettent d’obtenir des rendements intéressants lorsque l’évolution de leur sous-jacent – actions, indices boursiers, obligations, devises, matières premières – est contenue dans une fourchette de prix établie, et ce pendant toute la durée du contrat.

Un warrant inline possède une barrière supérieure et une barrière inférieure, qui forment un corridor de prix. Tant que le prix de son sous-jacent n’atteint ou ne dépasse pas la barrière supérieure ou la barrière inférieure jusqu’à l’échéance du produit, les investisseurs reçoivent un remboursement maximum standardisé. Cependant, à tout moment et jusqu’à l’échéance, si l’une des deux barrières est atteinte ou franchie, il expire immédiatement sans valeur.

Calcul et évolution du prix

L’évolution du prix d’un warrant inline est déterminée par le degré de probabilité qu’une barrière soit atteinte ou franchie avant la date d’échéance. Plus cette probabilité est élevée, plus son prix est bas. Le facteur principal qui influe sur son prix est donc le prix du sous-jacent auquel il se réfère.

Un autre facteur qui affecte largement le prix est la volatilité implicite; c’est-à-dire la fourchette de fluctuation future du sous-jacent attendue par les participants au marché à terme. Une augmentation de la volatilité implicite accroît la probabilité qu’une barrière soit atteinte ou franchie et tend donc à faire baisser le prix. A l’inverse, une volatilité implicite en baisse aura tendance à faire augmenter le prix. Ainsi, face à la volatilité implicite, les warrants inline affichent un comportement diamétralement opposé à celui des warrants vanille.

Le temps restant jusqu’à l’échéance impacte également largement la valorisation. En effet, plus la date d’évaluation est proche, plus la valeur du warrant inline tend à être élevée car plus le laps de temps pendant lequel l’une ou les deux barrières peuvent être atteintes ou franchies est court, plus la probabilité d’un tel événement est faible.

Des atouts incontestables, mais non sans risque

Les warrants inline offrent une transparence totale en matière de rémunération à l’échéance puisque l’investisseur reçoit un montant de remboursement maximum préétabli, à condition que leur sous-jacent n’atteigne ou ne franchisse aucune des deux barrières jusqu’à l’échéance. Ils ouvrent également la possibilité de générer des effets de levier intéressants dans des marchés qui évoluent latéralement.

Toutefois, ils ne sont pas sans risques puisque si la barrière supérieure ou inférieure est touchée ou dépassée, le produit expire sans valeur. La fluctuation du prix du sous-jacent peut également entraîner de fortes variations de prix. En cas de vente avant le terme, il est ainsi possible que l’investisseur obtienne un prix inférieur à celui qu’il aura payé à l’achat.

Comme tous les produits structurés, les warrants inline offrent des perspectives de rendement intéressantes mais les risques associés sont importants. Il en va toutefois de la responsabilité des fournisseurs de produits financiers de proposer à leurs clients des investissements en phase avec l’environnement de marché, ce qui est indubitablement le cas des warrants inline dans le contexte actuel.

Dominique Boehler

Société Générale Corporate and Investment Banking

Dominique Boehler a débuté sa carrière dans les produits structurés en 2004 chez Dresdner Kleinwort en tant que responsable de la distribution publique des produits structurés en France. Après avoir rejoint Commerzbank en Suisse en 2009, les ETF ont été ajouté à ses attributions. Il est membre et fondateur de plusieurs associations professionnelles. Dominique Boehler a rejoint Société Générale en janvier 2020 où il occupe depuis le poste d’Expert en produits dérivés. Dominique Boehler est diplômé de l’Université d’Oxford et de la London School of Economics.

Potentiel

Solutions Investissements

  • Gregor Trachsel
  • Chief Investment Officer
  • SG Value Partners

Rester concentré sur la valeur dans des marchés en plein essor

Les indices boursiers mondiaux volent actuellement de record en record. La plupart des véhicules d’investissement passifs sont conçus pour répliquer ces indices. Or, de nombreuses valorisations ne tiennent pas forcément compte des anticipations en termes de revenus et de bénéfices, comme l’explique Gregor Trachsel. 

Francesco Mandalà

L’objectif d’une stratégie d’investissement fondée sur la substance est d’identifier et d’investir dans des entreprises dont le cours actuel reflète de faibles attentes quant à leur véritable valeur économique. Cette discipline permet de tendre à une décote globale du globale, qui va servir alors de base pour générer de solides rendements à long terme.

Actuellement, il est possible d’identifier des titres sous-valorisés en se concentrant sur quatre sources principales Premièrement, bon nombre d’entreprises ont un pouvoir de fixation des prix de leurs produits et services plus solide que ne le suggère leur valorisation actuelle. Dans des secteurs tels que l’ingénierie, le transport et le commerce de gros, les entreprises peuvent par exemple assurer leurs prix en ayant recours à la méthode Cost Plus. De récentes crises adversités récentes telles que la pandémie, avec les perturbations des chaînes d’approvisionnement qui en ont suivi ou l’envolée de l’inflation, avec un impact fort sur les coûts des intrants, ont rendu la gestion de l’exécution des commandes, de la production et de la livraison exceptionnellement difficile. Dans de nombreux cas, ces défis ont temporairement entraîné des écarts importants entre les prix de revient et les prix atteints. Avec la stabilisation progressive des échanges commerciaux, une nouvelle structure de prix se dessinera, qui permettra alors de dégager à nouveau des marges brutes, normalisées et redevenues attrayantes.

Deuxièmement, les entreprises disposent en réalité de moyens nettement sous-estimés pour améliorer leur mix prix/volume, ne serait-ce en élargissant leur offre de produits et de services. Les producteurs de cellulose peuvent utiliser cette matière pour fabriquer non seulement des mouchoirs, du papier et du carton, mais aussi des vêtements, des biocarburants et des matériaux spéciaux. Ou, pour s’intéresser aux matériaux de construction, les fournisseurs de composants individuels comme le ciment ou le verre peuvent se transformer en fournisseurs de solutions complètes, dans le domaine par exemple des enveloppes de bâtiments.

Troisièmement, nous voyons bien que les entreprises actives dans des secteurs à croissance structurellement faible réduisent souvent leur base de coûts plus efficacement qu’on ne le pense. En particulier dans les secteurs à forte production de masse, comme la sidérurgie ou l’agriculture, les entreprises voient généralement plus loin que la phase actuelle du cycle économique et s’efforcent d’améliorer la productivité des ressources et de la main-d’œuvre. Elles partent en effet du postulat que l’environnement commercial restera durablement contraignant

Enfin, quatrième point, la persévérance des entreprises à rendre l’exploitation du capital plus efficace tend à être sous-estimée. Dans les secteurs à coûts fixes élevés, tels que les télécommunications, les services publics et la production de biens d’équipement, elles sont constamment obligées d’améliorer la rentabilité de leurs investissements, en particulier lorsque les charges d’intérêts augmentent. Sur ce point, nous sommes convaincus que la forte immobilisation du capital peut se voir comme une chance malgré tout: les chefs d’entreprise sont généralement incités à optimiser en permanence le capital investi par rapport à la capacité bénéficiaire normalisée de l’entreprise.

Pour conclure, nous partons du principe que les modèles commerciaux de nombreuses entreprises aboutissent à une création de valeur plus diversifiée qu’il n’y paraît à première vue. Comme nous venons de l’expliquer, la dynamique récente de l’environnement opérationnel a créé d’importantes opportunités de rattrapage, grâce à (1) un plus grand pouvoir de fixation des prix, (2) un meilleur mix prix/volume, (3) une structure de coûts plus légère et/ou (4) une efficacité accrue du capital.

Gregor Trachsel

SG Value Partners

Gregor Trachsel est le Chief Investment Officer de SG Value Partners à Zurich. Avec son équipe, il gère depuis plus de 20 ans des mandats d’actions deep value et des fonds de placement mondiaux avec un horizon de placement à long terme. Depuis 2020, il a choisi la voie de l’indépendance avec SG Value Partners. Auparavant, il développait la même stratégie d’investissement chez M.M. Warburg (Switzerland) et chez Credit Suisse Asset Management à Zurich.

Game changers

Solutions Investissements

  • Pieter Busscher
  • Gestionnaire de portefeuille
  • Robeco

Investir dans les smart materials : une stratégie à deux niveaux

La demande en smart materials prend de plus en plus d’ampleur. Les smart materials, ce sont ces matériaux intelligents, capables de modifier leurs propriétés, qui ouvrent de nouveaux champs d’application dans des domaines comme la médecine, ou l’industrie automobile, pour ne citer qu’eux. Il en va ainsi des matériaux à mémoire de forme ou des matériaux piézoélectriques. Pieter Busscher y voit là une opportunité d’autant plus intéressante qu’elle répond à une stratégie d’investissement qui se déploie sur deux axes.

Francesco Mandalà

Cette approche double signifie que les investisseurs se concentrent à la fois sur des entreprises pionnières dans le développement de matériaux supérieurs – les producteurs – et sur celles qui en permettent une exploitation plus efficace – les créateurs. Cette stratégie garantit un engagement total sur la chaîne de valeur de l’innovation permise par ces matériaux. 90 % des entreprises dans lesquelles il est possible d’investir proviennent des secteurs de l’informatique, de l’industrie et des matériaux, mais la priorité est d’abord accordée aux valeurs qui ont une vraie pertinence sur ce thème, plutôt qu’aux grands noms habituels de ces secteurs.

Malgré un environnement parfois difficile, la stratégie a montré ses capacités de résistance en 2023. La dichotomie des performances propre à cette stratégie souligne bien le contexte différencié dans lequel elle opère.

Du côté des producteurs, le cluster a dû affronter des vents contraires en raison de la baisse de la demande, du déstockage et de la chute des prix des matières premières, ce qui a eu un impact négatif sur les performances.

Du côté des créateurs, les  performances ont été en revanche exceptionnelles. Ils ont bénéficié des progrès de la technologie et des équipements, essentiels pour la prochaine génération de recyclage des matériaux.

Libérer le potentiel – Récompenses asymétriques

Investir dans cette thématique devient donc d’autant plus intéressant, car les producteurs et les créateurs offrent désormais, chacun de leur côté, un profil de rémunération asymétrique.

Pour les producteurs, le potentiel de hausse est à la fois structurel et conjoncturel. Avec la décarbonisation de l’économie mondiale, le passage des combustibles fossiles aux métaux comme le lithium, le cuivre et le nickel est inévitable, poussé par la demande de véhicules électriques et de solutions énergétiques propres. Les prix des métaux étant actuellement modérés, un retournement imminent de la demande pourrait profiter considérablement à ces matières premières. Les bâtiments étant les principaux responsables des émissions de gaz à effet de serre, il existe une forte demande de matériaux pour l’isolation et l’amélioration de l’efficacité énergétique.

Pour les créateurs – ou les « enablers » –  les perspectives de croissance sont alimentées par les progrès technologiques dans les domaines de l’équipement, de l’automatisation et des logiciels,  appelés à jouer un rôle fondamental dans la mise en application des smart materials de la prochaine génération.

Les appareils modernes, comme ceux qui exploitent l’IA, nécessitent des technologies de puces plus sophistiquées, augmentant ainsi la demande en équipements avancées pour les semi-conducteurs, tant dans un avenir proche que lointain. En plus de ce puissant moteur structurel, le déstockage de plusieurs marchés finaux prendra probablement fin en 2024, ce qui entraînera une reprise de la demande pour des équipements avancés, comme les instruments biomédicaux et les testeurs industriels.

L’automatisation industrielle est une réponse à la baisse de la population et à la nécessité pour les gouvernements de sécuriser les chaînes d’approvisionnement stratégiques, comme c’est le cas dans la fabrication de batteries. Après bientôt deux ans, les investissements mondiaux dans l’industrie manufacturière semblent avoir atteint des plus bas et tous les grands acteurs dans le domaine de l’automatisation s’attendent à ce que la demande reprenne cette année. Il est clair que l’intelligence artificielle va prendre une importance significative dans ces développements.

Un risque de baisse limité et des perspectives de croissance

Il est important de toujours tenir compte du positionnement stratégique afin de profiter à la fois des reprises cycliques immédiates et des changements structurels à long terme de l’économie mondiale. En investissant dans un pareil mix de producteurs et de créateurs, il est possible de tirer profit de la demande croissante de matériaux intelligents, rendue nécessaire par la décarbonisation, les progrès technologiques et l’évolution vers un monde plus durable.

Pieter Busscher

Robeco

Pieter Busscher est gestionnaire de portefeuille chez Robeco depuis 2007. Il a travaillé chez Credit Suisse Asset Management à Zurich. Pieter est titulaire d’un bachelor en commerce international de l’université RSM Erasmus, d’un master en banque et finance de l’université de Saint-Gall et il détient la certification CFA.

Décorrélation

Solutions Investissements

  • Pascal Schneidinger
  • Fondateur et CEO
  • Partasio

“L’art s’est clairement imposé comme classe d’actifs”

Le marché de l’art s’est révélé très résistant à la crise dans certains segments. La professionnalisation de tous les acteurs impliqués et le fait que la demande reste très forte, notamment en Asie, y ont fortement contribué, comme l’explique Pascal Schneidinger, de retour de Hong Kong.

Francesco Mandalà

Vous revenez de Hong Kong où s’est tenue l’édition locale de Art Basel, qui reviendra à Bâle en juin. Comment voyez-vous le marché de l’art évoluer en ce moment?

En fait, il n’y a pas un marché de l’art mais plusieurs, et leur contenu diffère totalement de l’un à l’autre. Lorsque nous parlons du marché de l’art chez Partasio, il s’agit du marché qui a vu le jour après la Seconde Guerre mondiale. Ce segment, généralement appelé “Post-War & Contemporary Art”, représente chaque année un peu plus de la moitié du chiffre d’affaires généré par la vente d’objets d’art à travers le monde.

Comme tout autre marché, ce segment fonctionne sur la base de l’offre et de la demande, qui dépendent dans une certaine mesure de facteurs externes. Souvent, seuls les résultats des ventes aux enchères d’art sont visibles pour le public. Cela représente environ 40% du volume négocié. Nous suivons à la fois les ventes aux enchères et le commerce privé via les galeries et nous établissons ensuite nos propres statistiques pour les segments et les artistes qui nous intéressent en raison de leur pertinence globale à long terme.

Comment évaluez-vous ce segment plus en détail ?

Il y a des artistes plus établis où l’offre se raréfie, créant ainsi des marchés extrêmement résistants aux crises. Chez les artistes plus jeunes, il y a beaucoup trop de spéculation à notre goût. Cela entraîne de grandes fluctuations de prix, qui sont en outre préjudiciables à la carrière de ces créateurs. Souvenez-vous par exemple de l’engouement autour des NFT, pour lesquels des sommes incroyables ont été dépensées et dont on ne parle plus guère dans le contexte actuel du marché.

Quels sont vos impressions à l’issue d’Art Basel Hong Kong ?

Dans tout l’espace asiatique, l’intérêt pour l’art moderne et contemporain d’inspiration occidentale est grand et ne cesse de croître. Outre Hong Kong, il existe en Asie d’autres centres importants, comme Séoul, Singapour et Tokyo, qui ont été soit développés soit redécouverts ces dernières années. Néanmoins, les exposants de la foire ont fait état de nombreuses ventes réussies à des collectionneurs plus jeunes et ont enregistré des transactions très importantes dans le segment des blue chips, pour des œuvres par exemple de Yayoi Kusama ou de Philip Guston.

Les galeries et les maisons de ventes continuent de penser que Hong Kong continuera à jouer un rôle stratégique à long terme et à représenter un accès important au marché asiatique. En raison de la forte demande et de la démographie intéressante des consommateurs, les trois grandes maisons de vente aux enchères, Christie’s, Sotheby’s et Phillips, ont d’ailleurs annoncé l’année dernière une augmentation massive de leur présence à Hong Kong, où elles inaugureront bientôt de nouveaux espaces d’exposition et de vente.

Qu’attendez-vous d’Art Basel, qui se tiendra en juin ?

Historiquement, Art Basel est la foire la plus importante du calendrier international. Chaque année, plusieurs milliers de galeries présentent leurs concepts d’exposition et seules les meilleures sont retenues. Les collectionneurs et les muséologues du monde entier se rendent alors en pèlerinage à Bâle pour voir et éventuellement acheter le meilleur. Les exposants de la foire principale, des foires satellites et les musées environnants attendent les points forts de leurs programmes pour les présenter en juin. Pour juin, les préparatifs battent leur plein. Même si de nombreux collectionneurs font preuve de prudence dans le contexte actuel du marché, nous sommes certains que des transactions fructueuses auront lieu, surtout pour les œuvres d’artistes de renom qui répondent aux exigences élevées d’acheteurs bien informés.

L’art en tant que classe d’actifs est un domaine dans lequel vous êtes très impliqué. Comment voyez-vous son évolution?

L’art s’est clairement établi en tant que classe d’actifs. La forte performance de ce que l’on appelle les “blue chips”, le segment supérieur du marché, l’intérêt croissant du public, la corrélation pratiquement inexistante avec d’autres classes d’actifs et la raréfaction croissante de l’offre y ont largement contribué. Bien que les crises géopolitiques et les difficultés locales puissent influencer l’humeur du marché, le succès à long terme de l’art en tant qu’actif dépend en fin de compte du nombre de particuliers fortunés. Une tendance qui, malgré des incertitudes temporaires, est à la hausse sur le long terme.

Pascal Schneidinger

Partasio

Pascal Schneidinger est le fondateur et CEO de Partasio, la boutique asset management spécialisée dans l’art. Pascal Schneidinger a commencé sa carrière en 2003 dans les groupes real estate de Credit Suisse First Boston à New York et de la Deutsche Bank à Londres. Il a ensuite dirigé les acquisitions en Europe continentale chez Starwood Capital à Londres, avant de s’installer à Shanghai pour créer une chaîne de magasins de détail pour les consommateurs chinois. Fin 2020, il est revenu en Suisse pour fonder Partasio. Pascal Schneidinger est titulaire d’un Bachelor of Science de la Wharton School de l’Université de Pennsylvanie et il détient également la certification CFA.

Mega Caps

Solutions Investissements

  • Alexandre Drabowicz
  • Chief Investment Officer
  • Indosuez Wealth Management

“Il s’agit plus d’un phénomène de dominance que de concentration”

Les dix plus grosses entreprises du S&P 500, où figurent en bonne place les Magnificent Seven, ont pris ces dernières années un poids considérable. Elles s’annexent à elles-seules le tiers de l’indice, un niveau de concentration qui n’inquiète pas Alexandre Drabowicz outre mesure.

Francesco Mandalà

Les dix plus grandes entreprises du S&P500 représentent aujourd’hui près du tiers de l’indice, en termes de capitalisation. Comment expliquez-vous une aussi forte concentration ?

Il vaut mieux relativiser d’abord ce qui apparait en effet comme une forte concentration. En Angleterre, les dix plus importantes entreprises du Footsie représentent 50% de l’indice. Et si nous prenons le MSCI Emerging Markets, qui rassemble 1’440 sociétés, son Top10 vaut pour environ le quart de sa capitalisation globale ! La concentration sur le S&P500 ne me paraît donc pas inhabituel. Je pense en réalité qu’il s’agit plus d’un phénomène de dominance que de concentration. Aux Etats-Unis, il se trouve en ce moment quelques grandes entreprises qui ont réussi à conquérir leur secteur, leur industrie, à l’échelle mondiale. C’est bien évidemment le cas de la tech.

Il est par ailleurs assez difficile de parler de bulle, si l’on se réfère à celle que nous avons connue au début des années 2000. Pour les Magnificent Seven – que je préfère appeler les Sept Fantastiques, le terme me semble plus juste – les valorisations se traitent à 25 fois les bénéfices sur ces deux prochaines années. C’est plutôt raisonnable. De plus, contrairement à l’épisode dot.com, nous nous retrouvons avec des sociétés extrêmement profitables, dont les ventes présentent de très bons taux de croissance, trois fois supérieurs à la moyenne du S&P500. Il est donc assez naturel que les investisseurs veuillent s’inscrire dans ce mouvement, quitte à payer une prime substantielle pour participer à cette croissance.

Cette concentration peut-elle laisser planer certaines menaces ?

Dans la mesure où les sociétés répondent aux attentes du marché, voire les dépassent, comme le fait Nvidia, je ne vois pas de menace tangible dans l’immédiat. Il y a bien évidemment des risques à prendre en considération. Les profits peuvent chuter, la croissance peut s’enrayer, de nouveaux entrants peuvent se présenter sur le marché avec des technologies profondément disruptives, mais rien de tout cela ne me parait envisageable sur le court terme.

Il est aussi très intéressant de voir comment évoluent les Sept Fantastiques d’une année sur l’autre. L’an dernier, leurs performances étaient relativement homogènes. Elles faisaient bloc. Ce n’est plus le cas en 2024. Au premier trimestre, Tesla et Apple déçoivent. Elles se montrent en retrait comparées à Meta ou à Nvidia qui enregistrent des plus hauts historiques. Il y a de la dispersion qui réapparait dans ce groupe, mais ce n’est pas pour autant que les marchés se replient, bien au contraire. La performance s’étend au-delà des Sept fantastiques, et c’est une excellent nouvelle.

Comment est-il alors possible pour les gestionnaires de fonds de générer de l’alpha avec une dizaine d’entreprises qui commandent le tiers du marché ?

Oui, c’est un vrai sujet mais je reste persuadé qu’il est possible de trouver des solutions à ce problème de diversification dû essentiellement au secteur technologique. Dans ce secteur, si l’on veut bien regarder au-delà du hardware ou software, il existe encore des opportunités à exploiter dans les semi-conducteurs avec de gros fabricants installés en Europe comme en Asie. Et il y a encore de la diversification à aller chercher autour de l’intelligence artificielle.

Pour s’en tenir au marché américain, je vois plusieurs options. Se diversifier par exemple sur les valorisations en se calant sur un indice équi-pondéré comme le S&P Equal Weight. C’est un indice construit autour de la diversification du risque, dont la différence de performance par rapport à l’indice pondéré des capitalisations peut être plus difficile à expliquer à la clientèle privée. L’an dernier, il n’a produit que 12%, contre 24% au S&P500, mais il permet d’adresser en partie ce problème de concentration.

Travailler avec l’indice CAPE Shiller a également du sens. Il est construit de manière très intelligente. Il prend en considération les bénéfices réalisés sur les dix dernières années, corrigés de l’inflation, pour limiter les effets de la volatilité à court terme. Il me semble plus approprié pour limiter les incidences de la concentration rencontrée, sans pour autant sacrifier la performance.

Et enfin, il faudra revenir dans le temps sur les segments Small & Mid Cap où des dizaines de titres présentent aujourd’hui des profils de diversification très intéressants, susceptibles de contribuer à la génération d’alpha. Il est cependant un peu prématuré pour y retourner dans l’immédiat, mais le débat est ouvert.

 

Alexandre Drabowicz

Indosuez Wealth Management

Alexandre Drabowicz a commencé sa carrière à la Société Générale en 1993 où il a occupé différentes fonctions, en Australie puis au Japon. De 2001 à 2008, il a été gérant de portefeuilles chez Systeia Capital Management. Il a rejoint ensuite Amundi où il est devenu, en 2018, devient directeur adjoint des gestions Actions. Alexandre Drabowicz est diplômé de l’école de commerce Neoma, et titulaire d’un BA de la Middlesex Business School de Londres ainsi que de la certification CAIA.

Tableau de bord

Solutions Investissement

  • Marouane Daho
  • Analyste-gérant
  • Iteram Capital

Q2 2024 – le baromètre des stratégies hedge funds

Le dernier trimestre de l’année 2023 a fini de confirmer une nouvelle année record pour les actifs traditionnels malgré la persistance de préoccupations macroéconomiques et la pression accrue des taux élevés sur les entreprises et les consommateurs. Le discours de plus en plus accommodant des banques centrales, notamment de la Réserve Fédérale américaine, a soutenu les actifs à risque jusqu’à la fin de l’année et a entraîné une diminution des rendements obligataires en anticipation de plusieurs baisses de taux courant 2024. Ce type d’environnement, dominé par le beta, constitue généralement un obstacle pour la génération d’alpha et les stratégies hedge fund non-directionnelles.

Cependant, les niveaux de volatilité, implicite et réalisée, observés au quatrième trimestre 2023 ne sont pas susceptibles de durer jusqu’à la fin de l’année 2024. Le prolongement de cette période de transition sur plusieurs fronts devrait aboutir à la création de nombreuses opportunités sur plusieurs classes d’actifs pour les gérants hedge fund.

 

Francesco Mandalà

RV Arbitrage/Multi-Strategy – Positif

-Des niveaux d’intérêts qui restent élevés, ainsi qu’une dispersion accrue dans les marchés fixed income combinés à une liquidité réduite créent des opportunités attrayantes pour générer de l’alpha.

-Malgré la baisse historique des niveaux de volatilité, les stratégies d’arbitrage de volatilité gardent un potentiel de rendement asymétrique et convexe.

Commodities – Neutre

-Les gérants fondamentaux spécialisés dans un secteur en particulier restent les mieux placés pour monétiser les variations de l’offre et de la demande.

-Notre préférence pour les stratégies de valeur relative et de trading tactique demeure inchangée.

Global Macro – Neutre

-En dépit du potentiel attractif d’un environnement de fin de cycle et de l’augmentation de la disparité régionale, les divergences persistantes entre les marchés et les anticipations des banques centrales rendent le positionnement difficile.

-2024 étant une année d’élections, les changements géopolitiques et fiscaux à venir constituent une source intéressante de catalyseurs pour les gérants global macro.

Fixed Income/Credit Arbitrage – Positif

-Des niveaux de spreads crédit bas et des conditions de refinancement plus difficiles sont idéales pour les stratégies credit long/short suivant une approche relative value capables de monétiser les dislocations à venir.

-On s’attend à ce que des opportunités d’arbitrage de structure de capital continuent à émerger alors que les émetteurs constatent des impacts différents résultant du coût plus élevé du capital et d’un accès plus difficile aux marchés de capitaux.

-Malgré une légère augmentation marginale des niveaux de défauts, les conditions optimales pour les situations de détresse ne sont pas encore réunies.

CTA/Managed Futures – Neutre

-Les modèles de trend-following ont récemment bénéficié de circonstances favorables sur les marchés actions (Etats-Unis et Japon) ainsi que de la hausse exceptionnelle des prix du cacao.

-Les stratégies de Statistical Arbitrage devraient bénéficier de l’augmentation attendue de la dispersion et de la volatilité sur les marchés actions en 2024.

-Alors que nous nous approchons d’un éventuel point d’inflexion dans les marchés de taux, les stratégies quantitative macro nous paraissent moins attractives que leurs équivalents discrétionnaires.

Event-Driven – Positif

-Les gestionnaires de merger arbitrage sont optimistes pour l’années 2024 en raison d’une meilleure visibilité concernant les conditions de financement, ce qui devrait se traduire par une hausse de l’activité de fusion/acquisition. Néanmoins les niveaux de spreads se sont globalement resserrés.

-Les opportunités de special situations sont encore dominés par quelques cas complexes et idiosyncratiques (restructurations, litigations).

Equity Long/Short – Positif

-Nous maintenons notre préférence pour les gestionnaires à faible exposition au marché (low-net et market neutral) en raison de niveaux de valorisation élevés.

-Nous anticipons un retour à la sélection de titres alors que nous prévoyons l’apparition de faiblesse sur certaines poches, même en l’absence d’une récession ou d’un retournement brutal du marché.

-Les spécialistes sectoriels constituent une option intéressante pour capturer l’augmentation de la dispersion intra-sectorielle.

Marouane Daho

Iteram Capital

Marouane est analyste/gérant chez Iteram Capital et membre du comité d’investissement. Ses principales responsabilités consistent en la recherche de gérants et la gestion de portefeuilles de hedge funds. Avant de rejoindre Iteram, il était en charge des hedge funds et des investissements sur les marchés privés au sein d’un single-family office à Genève. Il a débuté sa carrière chez Lyxor Asset Management à Paris en tant qu’analyste hedge funds. Marouane est diplômé de l’école de commerce NEOMA avec un MSc en finance.