A la loupe

Solutions Investissements

  • Interview Kathleen Gailliot
  • Responsable de la Recherche, Small & Mid Caps européennes
  • Kepler Cheuvreux

« Les Small & Mid Caps présentent plusieurs aspects structurellement attractifs » 

Malmenées ces deux dernières années, les petites et moyennes capitalisations européennes semblent enfin retrouver des couleurs. Servies par des valorisations très basses, ces valeurs devraient pouvoir à nouveau profiter des spécificités qui font leur force.

Francesco Mandalà

Quels sentiments vous inspirent les valorisations actuelles des Small & Mid Caps européennes ?

D’abord, elles sont très basses et, ensuite, elles proposent aujourd’hui d’excellents points d’entrée. Entre décembre 2021 et fin juin 2023, elles ont perdu 22 % par rapport au Large Caps. Les conséquences de la guerre en Ukraine ont bien évidemment pesé sur elles. Les Small & Mid Caps ont par nature une orientation plus domestique que les Large Caps. Le chiffre d’affaires qu’elles réalisent en Europe est de l’ordre de 60%, contre 40% pour les Large Caps. Les investisseurs ont donc été particulièrement sensibles à l’accroissement des risques géopolitiques en zone euro. La dégradation des Small & Mid Caps ces deux dernières années est du même ordre qu’au moment de la crise financière. Elles avaient alors sous-performé les Large Caps de 24% entre fin 2007 et fin 2008.

Certains secteurs ont-ils échappé à la récente correction ?

Dans l’ensemble, non. Certaines capitalisations ont été plus impactées. Les Small Caps, qui se situent sous le milliard d’euros en termes de capitalisation boursière, ont souffert du « flight to liquidity » qui a suivi le crash de la Silicon Bank Valley en début d’année. Les investisseurs ont préféré éviter pour un temps les titres dont le volume traité journalier est faible. La barre d’un million d’euros est le plus souvent le seuil minimal que se fixent les investisseurs All Caps.

Le deuxième semestre 2023 vous paraît-il plus favorable aux Small & Mid Caps européennes ?

Oui, le mouvement semble s’être engagé en juillet. Nous avions déjà vu une amorce de reprise en début d’année mais elle a vite été douchée par la crise de liquidité due à la chute de SVB. En janvier, les Small & Mid avaient surperformé les Large de 7%. Le point d’inflexion semble avoir été franchi et le rebond devrait se poursuivre alors que les valorisations restent encore très basses, comme en témoigne le price-to-book, où les Small & Mids se négocient avec une décote de 20%.

Si les MidCaps ont commencé à rebondir, les Small Caps restent encore délaissées et affichent toujours des valorisations très décotées. Au premier semestre, beaucoup de retraits ont été effectués dans cette catégorie et les flux sont en train de se rééquilibrer.

Ce qui plaide également pour le rétablissement des Small & Mid Caps en Europe, c’est la volonté des gérants All-Caps de revenir sur des dossiers qui sont plus limités en taille, mais qui ont l’avantage de générer de l’alpha dans les phases de reprise de marchés. Dans un contexte international, il faut souligner également que Small & Mid Caps européennes se traitent à une forte décote comparée à leurs homologues américaines. Cette décote, en price-to-book value est de l’ordre de près de 40%, soit plus du double de leur décote habituelle !

Par quelles tendances les Small & Mid caps peuvent- elles aussi se laisser porter aujourd’hui ?

Avant même d’en venir aux tendances, autant rappeler que les Small & Mid Caps présentent plusieurs aspects structurellement attractifs : leur exposition domestique, leur pouvoir de fixation des prix et leur rythme de croissance. A cela s’ajoute le faible suivi qui permet de jouer des inefficiences de marché pour générer de l’alpha.

Pour ce qui est des tendances, il est vrai que les Small & Mid Caps profitent de l’importance grandissante que prennent les thématiques dans les stratégies d’investissement. Pour les gérants qui souhaitent exploiter un thème en particulier – hydrogène, captage du carbone, digital … – les Small & Mids offrent des pistes intéressantes car elles contiennent de nombreux « pure players ».

A terme, il va enfin falloir prendre en compte leur dimension ESG. Nous trouvons beaucoup de ces valeurs appelées ESG-Improvers dans les rangs des Small & Mids. Ce sont des entreprises qui ont un impact positif, mais manquent de ressources pour structurer leur communication ESG, à l’inverse des Large Caps. Sous l’effet des évolutions règlementaires, cette communication s’améliorera fortement dans les années à venir, ce qui devrait entrainer le relèvement de certaines recommandations et donc attirer plus d’investisseurs ESG sur la catégorie.

Kathleen Gailliot

Kepler Cheuvreux

Kathleen Gailliot dirige la recherche sur les petites et moyennes capitalisations européennes chez Kepler Cheuvreux. L’univers SMID englobe environ 700 valeurs, ayant une capitalisation boursière inférieure à 5 milliards d’euros. Elle est responsable également de la « SMID Selected List » européenne et d’autres rapports thématiques. Avant de rejoindre Kepler Cheuvreux en 2018, elle a travaillé chez Natixis pendant huit ans. Elle a débuté en tant qu’analyste Auto puis a couvert les SMID françaises, actives principalement dans les biens d’équipement et les services aux entreprises. Kathleen est diplômée de Grenoble Ecole de Management et de l’Aston Business School.

Hybrides Corporate

Solutions Investissement

  • Gaëlle Boucher
  • Head of Research
  • bridport & cie

Hybrides corporate : un couple rendement risque attractif sur des crédits solides

Dans un environnement empreint d’incertitude, la recherche de rendement reste d’actualité. L’inversion des courbes de taux est un élément de support aux maturités courtes. Bien que la volatilité du marché reste élevée, les investisseurs avec une vision à long terme peuvent aujourd’hui obtenir des rendements attrayants sur des émetteurs non financiers solides au travers de la dette dite hybride, à mi-chemin des actions et des obligations.

 

Francesco Mandalà

Les hybrides corporate sont des titres subordonnés émis par des entreprises non-financières. Leur structure combine des caractéristiques propres aux obligations – le coupon – et aux actions – maturité très longue voire perpétuelle, et coupon discrétionnaire. Point de comparaisons avec le récent épisode de Crédit Suisse, ce ne sont pas des instruments règlementaires: elles n’ont pas de rôle d’absorption des pertes. Il s’agit avant tout d’un instrument de gestion du bilan: les agences de notation les considèrent à 50% comme de la dette, l’autre moitié étant des fonds propres. C’est la notion d’equity content, ou EC. Une perpétuité qui n’en est pas une puisque des options de remboursement anticipée (call) sont prévues, dont la première en moyenne 5 ans après la date d’émission est, dans les faits, presque toujours exercées. Dans le cas contraire, l’investisseur reçoit une rémunération supplémentaire pour conserver l’instrument plus longtemps (step-up).

Comprendre leur risque pour mieux les maitriser

Elles présentent une valorisation similaire à celui des crédits à haut rendement les mieux notés, mais avec une composition du risque différente. En effet, au-delà du risque crédit et du risque de taux, cet instrument a un taux de recouvrement faible en cas de défaut. Cependant, le risque de défaut est plus faible car l’exposition sous-jacente est un crédit de notation investment grade dans la majorité des cas. Son risque d’extension en cas de non-paiement à la première date de remboursement créera un choc important sur la valorisation, sans compter un risque de non-paiement du coupon, et le risque de remboursement anticipé en cas de changement de méthodologie de la part des agences ou d’évènements spécifiques.

Les hybrides comportent des clauses sur les coupons leur permettant d’en reporter le versement si l’émetteur n’est pas en mesure de verser son dividende. Ce risque est néanmoins très faible pour les émetteurs de qualité et l’impact en termes de réputation serait très important. A noter que le coupon est en général cumulatif.

Le risque d’extension est le plus important car souvent le moins bien compris. Il s’agit du risque de non remboursement à la première date de call. En période de stress économique ou en cas de renchérissement des couts de financement, l’inquiétude des investisseurs augmente ce qui les conduit à appliquer une prime de risque additionnelle, les obligations traitant avec une décote.

La méthode S&P assure la certitude du call

Au-delà de la première date de call, l’agence de rating S&P ne prend plus en compte ces obligations hybrides dans le calcul de fonds propres, ce qui en réduit l’intérêt pour l’émetteur. Dès lors, une notation S&P réduit de facto le risque d’extension. A ce titre il est donc primordial de comprendre comment les agences de notation traitent ce type d’instrument.

Une base d’investisseur plus stable

La majorité du marché est représenté par des émetteurs de notation Investment Grade avec un profil financier solide et un rating peu volatile, à l’exception du secteur immobilier, lourdement affecté par la hausse des taux (risque idiosyncratique). Leur présence dans les indices crédit (à l’inverse des AT1) implique une base de clientèle différente et plus stable, ce qui les rend de facto moins volatiles que les subordonnées bancaires AT1s.

Une alternative à l’augmentation de capital

La grande majorité des émetteurs provient de secteurs très lourds en dépenses d’investissement (Utilities, énergie, télécoms), qui utilisent l’instrument pour améliorer leurs ratios de crédit et éviter une baisse de leur rating tout en évitant de diluer les actionnaires. Plus de 90% des émetteurs sont de qualité Investment Grade et affichent des profils financiers solides avec une visibilité sur les flux de trésorerie. C’est une différence notable avec des émetteurs notés dans la catégorie High Yield.

Des valorisations attrayantes pour des émetteurs de qualité

Leur caractère subordonné conduit les agences de notation à leur assigner un rating inférieur à leur dette Senior. Bien que le taux de recouvrement soit faible pour les porteurs de dettes subordonnées, le risque de défaut est très limité chez les émetteurs Investment Grade. La majorité des émetteurs non actifs dans le secteur immobilier continueront de refinancer leurs obligations et la notation S&P garantit l’exercice du call. Ces investissements offrent un rendement supérieur à ceux du segment Investment grade sans pour autant avoir le même risque de défaut que le segment High Yield, aux prix certes d’une plus grande volatilité. A noter que la remontée des taux de défaut favorise le risque de subordination au détriment du High Yield. Il existe aujourd’hui des dettes hybrides «vertes» dont le développement devrait se poursuivre.

Croissance du PIB réel en Chine et indice de confiance des consommateurs.

Gaëlle Boucher
bridport & cie
Gaëlle Boucher dirige la recherche chez bridport depuis 2020. Elle a occupé auparavant différents postes de gérant obligataire chez CCBP, CCR Gestion, AXA et Pictet Asset Management. Elle a été également responsable du Fixed Income Advisory chez Lombard Odier. Gaëlle est titulaire d’un Master II en Finance de l’Université Paris-Dauphine, de la certification Wealth Management Advisor CWMA, du certificat du CFA Institute en investissement ESG et de deux Certificats Executive en Corporate Finance d’HEC Paris.

Rétrospective

Solutions Investissements

  • Interview Philip Best
  • Gérant de portefeuilles Small & Mid Caps
  • Quaero Capital

Les vingt ans animés du fonds Argonaut

Voilà vingt ans, Philp Best et Marc Saint John Webb ont lancé le fonds Argonaut, axé Small & Mid Caps européennes, qu’ils continuent de gérer aujourd’hui chez Quaero Capital. Vingt ans passés à dégager de la perf et à collectionner des souvenirs assez marquants.

Francesco Mandalà

Quelle performance a réalisé le fonds depuis son lancement ?

A la fin mai, il avait généré 782% de rendement !

En vingt ans, quel est le meilleur investissement que vous ayez réalisé ?

C’est Danieli, une entreprise italienne d’aciéries de classe mondiale, mais dont le bilan n’a pas convaincu le marché après le scandale Parmalat en 2003. Il s’est avéré que le marché avait tort et que nous avions bien fait nos devoirs. Depuis 2007, elle a produit +948%. Et l’entreprise est toujours aussi performante aujourd’hui.

Et le pire investissement ?

Il nous est arrivé deux fois de perdre la totalité de notre investissement.  D’abord, avec Smoby en 2008. Il semble que la direction et la famille se soient placées au-dessus des actionnaires et se soient servies elles-mêmes dans la caisse. Malheureusement, cela arrive. Ensuite, avec CNIM en 2022. Cette entreprise était restée aux mains de la même famille depuis 1856, mais tout a dérapé à la sixième génération. Le responsable du fiasco ne doit pas être populaire au sein du clan…

Dans combien d’entreprises avez-vous investi au total ?

Plus de 300. 321 entreprises au total, pour être précis.

Combien en avez-vous visitées ?

Nous nous sommes rendus dans plus d’une centaine d’entreprises pour rencontrer leur direction.

Quelles ont été les visites les plus marquantes ?

La société Heiler Software à Stuttgart en Allemagne nous a accueillis avec des panneaux « Wilkommen » à la réception et des petits drapeaux suisses dans la salle de réunion. Nous avons appris qu’ils n’avaient pas reçu une seule visite d’analystes ou de gérants de fond en trois ans ! 

Votre plus grand moment de solitude ?

Lorsque nous sommes arrivés chez Rinol Flooring à Renningen en Allemagne, on nous a demandé de signer un accord de confidentialité. Puis avons été informés qu’ils venaient de déposer le bilan !

Le titre que vous avez conservé le plus longtemps ?

Nous sommes investis dans NRJ depuis 2013. En 10 ans, le cours n’a progressé que de +15%, soit une performance annualisée de seulement 1%. C’est bien d’être un investisseur patient, mais parfois, cela nous démange aussi d’appuyer sur le bouton «Vendre».

Les trois entreprises qui vous ont le plus impressionnés ?

Indépendamment de la qualité du business, la visite la plus impressionnante a sûrement été la société Camellia au Royaume-Uni. Elle possède, entre autres, de grandes plantations de thé. Leur siège social était un château magnifique dans le Kent avec une collection d’art extraordinaire. Une énorme caverne d’Ali Baba avec énormément d’actifs cachés…

Il y aussi l’iconique Studio Babelsberg à Potsdam, où ont été tournés les films de Marlène Dietrich dans les années 1920, puis les films de propagande nazis  dans les années 1930. Lors de notre visite, ils étaient en train de tourner « Inglorious Basterds » de Quentin Tarentino. Ca sortait vraiment de l’ordinaire pour nous. Le retour sur investissement a pris du temps mais l’investissement s’est bien terminé au travers d’une OPA.

Et terminons avec Orell Füssli, à Zürich, qui imprime les billets de banque suisses. Une histoire fascinante : ils sont dans le même métier depuis le XVe siècle et leur premier client était Zwingli pour qui ils ont imprimé des bibles !

Philip Best

Quaero Capital

Philip Best est l’un des co-fondateurs de Quaero Capital. Il a débuté sa carrière en 1983 comme gérant de fonds chez Warburg Investment Management, dont il gérait le fonds Mercury European Income. En 1987, il rejoint Enskilda Securities, en tant que broker spécialisé dans les petites capitalisations européennes. En 1994, il ouvre et dirige le bureau parisien de The Europe Company Limited, un courtier orienté sur la recherche spécialisé dans les petites valeurs européennes, racheté par Jefferies & Co en 2000. Philip Best a lancé le fonds Argonaut en 2003 avec John Saint Webb. Tous deux continuent à le gérer aujourd’hui.

Stratégie

Solutions Investissements

  • Roberto Bartolomei
  • Responsable des ventes de la gamme THEAM Quant
  • BNPP Paribas Global Markets

Les portefeuilles défensifs dans un contexte de hausse des marchés

Les turbulences économiques de l’année dernière ont abouti à l’entrée de nombreux grands marchés boursiers en territoire baissier. La situation n’a pas été différente pour les obligations, les rendements annuels de la plupart des indices étant dans le rouge. Toutefois, ce scénario a permis aux secteurs et aux actifs défensifs de surperformer.  Mais à l’heure où les marchés d’actions entrent en territoire positif, cette approche défensive est-elle toujours la bonne pour les investisseurs?

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Francesco Mandalà

Si les rendements des titres à revenu fixe sont nettement meilleurs qu’il y a deux ans, les attentes des investisseurs sont également plus élevées. Cela signifie qu’une allocation plus importante aux titres à revenu fixe est rarement suffisante pour attirer ou retenir les investisseurs finaux.

Dans ce scénario, les investisseurs désireux de tirer davantage de rendement des actions ont généralement deux options: soit augmenter la part des actions présentant des caractéristiques plus défensives, soit ajouter une composante défensive en achetant des options. Ils peuvent également envisager d’ajouter d’autres titres, tels que des matières premières, à la composition de leurs actifs.

Mais que se passerait-il si vous pouviez combiner toutes ces sources de rendement dans le cadre de stratégies d’investissement transparentes visant à optimiser le rendement du capital alloué?

Le rôle des actions défensives

Les valeurs défensives jouent un certain rôle, mais il y a des limites: non seulement les portefeuilles peuvent se concentrer s’ils sont trop exposés à certains secteurs, mais leur performance peut être affectée par des facteurs macroéconomiques.

Il s’agit d’une menace réelle en cas d’inflation élevée, lorsque les secteurs défensifs ont tendance à souffrir. Les actions à tendance “value” ont tendance à mieux se comporter, mais elles se trouvent souvent dans des secteurs procycliques (finances, énergie, matériaux) qui ne sont clairement pas “défensifs” face aux récessions.

Innovation systématique pour les portefeuilles d’actions défensives

Cette situation appelle une autre approche de la diversification des portefeuilles – une approche qui n’exacerbe pas les risques ou les coûts, où le processus d’investissement en actions peut être construit de manière à transformer un risque purement directionnel en un investissement orienté vers le rendement. Pour ce faire, il est possible d’utiliser les options comme une couverture défensive.

Par exemple, un portefeuille diversifié d’actions sélectionnées sur la base des fondamentaux peut être complété par la vente d’options d’achat à court terme et l’achat d’options de vente à long terme; tandis que les options d’achat visent à améliorer le rendement et à atténuer la volatilité, les options de vente visent à améliorer le rapport risque/rendement de la stratégie, par rapport à un investissement direct dans les actions.

Au-delà des actions

Toutefois, si l’on recherche des rendements supérieurs à ceux des titres à revenu fixe, mais sans le risque de baisse des actions, s’aventurer au-delà des actions devrait être un moyen approprié de construire un portefeuille plus robuste de manière rentable pour tous les climats.

Par exemple, les stratégies de portage de matières premières sont bien connues pour offrir une combinaison défensive de type “Graal”, avec des rendements positifs moyens à long terme et une forte performance absolue ou relative pendant les baisses ou les récessions des actions.

Prises isolément dans un portefeuille, elles peuvent être utiles, mais combinées à d’autres stratégies non corrélées, elles peuvent réellement faire passer un portefeuille à la vitesse supérieure.

Préservation du patrimoine à long terme

Les investisseurs souhaitant augmenter les rendements corrigés du risque et obtenir des rendements à long terme proches des indices de référence traditionnels pendant les périodes de crise financière, les stratégies de superposition défensives ont gagné en popularité.

Bien menées, les stratégies les plus robustes devraient viser à produire des rendements à long terme qui ne s’éloignent pas trop des indices de référence traditionnels, tout en réduisant sensiblement la volatilité du portefeuille.

Pour l’instant, les marchés mondiaux restent imprévisibles. Pour ceux qui se concentrent sur la préservation à long terme, sans tolérance pour les périodes de fortes baisses, une certaine allocation aux stratégies défensives sur actions, ou une superposition défensive au portefeuille de base, devrait être judicieuse, que ce soit au sein des actions ou au-delà.

 

Roberto Bartolomei

BNP Paribas Global markets

Roberto Bartolomei dirige l’équipe de vente de THEAM Quant Funds pour BNP Paribas Global Markets. Il a auparavant occupé des postes de spécialiste des ventes et des produits chez Nomura, Morgan Stanley, AMP Asset Management et National Australia Bank entre Londres, Sydney, New York et Milan. Roberto est titulaire d’une licence en gestion des technologies et en économie de l’université de Western Sydney et d’un certificat en gestion des investissements de la CFA Society, au Royaume-Uni.

Tableau de bord

Solutions Investissement

  • Marouane Daho
  • Analyste-gérant
  • Iteram Capital

Q2 2023 – le baromètre des stratégies hedge funds

Le début d’année 2023 a valu aux gérants de hedge funds des conditions de marché relativement compliquées, après un exercice 2022 qui a remis au goût du jour les stratégies décorrélées. Tout d’abord, bon nombre de stratégies ont sous-performé en raison de leur positions short du fait d’une amélioration soudaine du sentiment des investisseurs. Ensuite, certains événements, notamment les faillites de banques régionales américaines depuis le mois de mars, ont provoqué une nouvelle vague de volatilité et d’incertitude sur certains marchés.

Les hedge funds se positionnent ainsi comme l’une des rares alternatives à pouvoir apporter des rendements décorrélés face aux incertitudes macroéconomiques croissantes. A moyen terme, l’évolution de l’inflation, des tensions dans le secteur bancaire et de la croissance économique mondiale pourraient recréer une pression baissière sur les actifs traditionnels.

 

Francesco Mandalà
P

RV Arbitrage/Multi-Strategy – Positif 

– Ces stratégies maintiennent une exposition directionnelle faible, ce qui leur permet d’être plus résistantes aux retournements de marchés.

-L’accroissement de la dispersion entre les actifs permet aux stratégies relative value d’identifier d’avantage d’opportunités.

-Néanmoins, la volatilité des actions a été étonnement faible en 2023 malgré un certain nombre d’événements macroéconomiques importants.

Commodities – Positif

-Des déséquilibres structurels entre l’offre et la demande continuent d’exister sur plusieurs marchés, permettant également de bénéficier de tendances pluriannuelles favorables soutenues par les initiatives environnementales d’acteurs publics et privées.

-Les prix des matières premières répondent avant tout à des facteurs fondamentaux ce qui offre des opportunités uniques à des spécialistes aguerris. Par ailleurs, leur corrélation aux marchés traditionnels reste plus faible.

-Les stratégies relative value devraient mieux se comporter, minimisant les renversements liés aux changements de perspectives économiques mondiales, surtout en Chine.

Global Macro – Positif

-Une évolution plus claire des politiques monétaires devrait apporter de nouvelles opportunités sur les marchés des taux et de devises.

-Les rotations de marchés successives depuis novembre 2022 ont été couteuses, notamment sur les positions short taux courts et long dollar.

-La divergence croissante de vues entre les marchés et les banques centrales crée un risque binaire à court terme.

Fixed Income/Credit Arbitrage – Neutre

-Une majorité de stratégies crédit reste directionnelle et éprouve des difficultés à naviguer dans des marchés volatils.

-Le risque accru de récession et des conditions financières plus restrictives pourraient mettre à l’épreuve les marchés obligataires à moyen terme. Les stratégies low-net semblent mieux équipés pour ce type d’environnement.

-Les opportunités en distressed devraient augmenter avec la hausse des taux de défaut, mais il encore tôt pour se positionner.

CTA/Managed Futures – Neutre

-Ces stratégies ont souffert de retournements rapides des marchés depuis le quatrième trimestre 2022, elles continuent d’être vulnérables à ce type d’instabilité.

-La normalisation des politiques monétaires pourrait apporter des opportunités lucratives pour les stratégies de trend following.

-Avec la hausse des taux d’intérêts, le carry sur l’excès de cash est susceptible de devenir une composante importante des rendements

Event Driven – Négatif

-Des taux plus élevés et un ralentissement économique mondial devraient réduire l’activité globale de financement (fusion-acquisition, émissions primaires, spin-off, IPO …).

-La hausse des risques réglementaires et géopolitiques constitue un réel obstacle pour les stratégies de merger arbitrage. Cependant, les primes de risque augmentent avec une volatilité plus élevée.

-Le bruit macroéconomique peut avoir une plus grande influence sur l’évolution des prix que les facteurs idiosyncratiques.

Equity Long/Short – Neutre

-Le bêta structurel de ces stratégies pourrait souffrir si les marchés actions venaient à corriger après la forte hausse de ce début d’année.

-Après une décennie de marchés haussiers, le constat est à une pénurie de véritables compétences de short selling parmi les gérants ELS.

-Les opportunités alpha sont toujours présentes, mais les prix des actions sont plus sensibles aux développements macroéconomiques.

-Une plus grande dispersion des résultats devrait améliorer les perspectives des stratégies à exposition nette faible /neutre.

Marouane Daho

Iteram Capital

Marouane est analyste/gérant chez Iteram Capital et membre du comité d’investissement. Ses principales responsabilités consistent en la recherche de gérants et la gestion de portefeuilles de hedge funds. Avant de rejoindre Iteram, il était en charge des hedge funds et des investissements sur les marchés privés au sein d’un single-family office à Genève. Il a débuté sa carrière chez Lyxor Asset Management à Paris en tant qu’analyste hedge funds. Marouane est diplômé de l’école de commerce NEOMA avec un MSc en finance.

Conjoncture

  • Solutions Investissement
  • Beat Thoma
  • Chief Investment Officer
  • Fisch Asset Management

Baisse inquiétante de la largeur du marché et de la liquidité

En raison d’une consommation très solide à l’échelle mondiale, du risque de reprise de l’inflation et d’une prochaine augmentation des dépenses publiques – après le relèvement du plafond de la dette US – il ne faut pas s’attendre à un revirement rapide de la politique monétaire.

 

Francesco Mandalà

Malgré le ralentissement de la conjoncture, les banques centrales sont contraintes de continuer à retirer des liquidités du système. De plus, une forte baisse de l’octroi de crédits en raison de la crise bancaire qui couve toujours aux États-Unis et de la fuite des dépôts bancaires qui en découle, réduit encore les liquidités. Par ailleurs, les conditions d’octroi de crédit (‘lending standards’) sont nettement plus strictes. En Europe aussi, l’octroi de crédits par les banques est en baisse. Les débiteurs dont la solvabilité est faible, en particulier, ressentent déjà des vents contraires croissants lors du refinancement de leurs dettes.

La faiblesse persistante des marchés immobiliers, tant aux États-Unis qu’en Europe, ainsi que la vente d’obligations d’État par les banques centrales (Fed, BCE) et le Trésor américain, estimée à plus de 900 milliards de dollars dans les mois à venir, renforcent en outre le retrait déjà significatif de liquidités sur les marchés financiers. Tous les facteurs de réduction de la liquidité mentionnés ont été partiellement compensés ces derniers mois par des facteurs spéciaux (liquidités d’urgence, réduction du ‘Treasury General Account’, création monétaire privée). Mais ces effets de compensation disparaissent désormais pour la plupart et il faut s’attendre à ce que l’influence de la politique monétaire restrictive se renforce à nouveau.

Il est en outre frappant de constater que sur les marchés boursiers américains, la largeur du marché diminue dans une mesure rarement observée dans l’histoire. Depuis la mi-mars, le marché élargi, mesuré par l’indice Russel 2000, fait nettement moins bien que le S&P 500. Les investisseurs n’ont plus rien gagné avec la grande majorité des actions depuis mars. Sur les 500 actions du S&P 500, seuls huit ( !) titres ont progressé (Apple, Tesla, Microsoft, Nvidia, Facebook/Meta, Amazon, Netflix et Google/Alphabet). En revanche, les investisseurs ont perdu de l’argent avec tous les autres. Il s’agit là d’un signal indirect d’une liquidité des marchés financiers qui s’écoule rapidement et qui devrait peser sur le moral des investisseurs dans un avenir proche.

Malgré les sommets atteints par certains indices, de nombreux investisseurs sont dans le rouge, même sur une base annuelle, et devraient donc être de plus en plus inquiets. La diminution de la largeur du marché peut être décrite de manière imagée comme une armée en pleine offensive, où seuls quelques généraux avancent encore, mais où les troupes se retirent déjà dans la direction opposée – une entreprise désespérée. Par conséquent, les fluctuations de la largeur du marché ont toujours été de bons signaux de timing à moyen terme. Elles sont l’expression d’une tension croissante entre les forces de hausse et la diminution des liquidités.

 

Beat Thoma

Fisch Asset Management 

Beat Thoma est Chief Investment Officer et, en tant que Head of the Investment Office, il est responsable de la création et de la mise en œuvre de la politique d’investissement. Avant de rejoindre Fisch Asset Management en 2000, il a travaillé pendant 14 ans pour UBS et Security Pacific Bank à Genève, où il était responsable du trading et de la vente d’obligations convertibles. En parallèle, il a publié deux livres, dont “Dynamische Prozesse in der Ökonomie und an den Finanzmärkten”.