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Thomas Tietz
Corum
« Nous participons activement à la vague de consolidation dans le secteur des GFI »
Depuis sa création à Zoug en 2001, Progressive se concentre sur les placements alternatifs. En ce moment, c’est la demande des investisseurs pour des stratégies de couverture, en raison de la forte hausse des taux d’intérêt et des tensions géopolitiques, qui requiert toute son attention, comme l’explique Daniel Germann.
Jusqu’à présent, les stratégies de type « liquid alternatives » et « long volatility » n’étaient plutôt connues que des spécialistes. Avec la forte hausse des taux d’intérêt, il semble que la situation a changé ? Quelle en a été la raison ?
Les crises géopolitiques tant en 2022 qu’en 2023, le recul du marché des actions en 2022 ainsi que les fluctuations accrues sur les marchés en général ont rappelé à de nombreux investisseurs institutionnels la raison d’être des stratégies de couverture. Parallèlement, le recul des marchés en 2022 a également montré qu’une approche de couverture insuffisamment diversifiée pouvait s’avérer décevante.
Couverture, cela sonne toujours comme un coût. Quel est votre point de vue à ce sujet?
Bien sûr, c’est un thème récurrent. Notre approche reste toutefois clairement axée sur les couvertures dites « carry-neutral ». Cela signifie que nous sommes en principe « long » sur la volatilité, qu’elle soit réelle ou implicites. Il en va ainsi de nos 11 sous-stratégies, diversifiées dans toutes les classes d’actifs et dans toutes les régions.
Pour nous, les coûts doivent cependant toujours être considérés eu regard de la qualité de la gestion mise en œuvre. Des solutions prétendument « bon marché » peuvent en fin de compte coûter parfois nettement plus cher que des solutions de grande qualité et une étiquette de prix qui leur correspond. Nous constatons régulièrement qu’il existe des potentiels de diversification considérables à exploiter parmi les approches de couverture très hétérogènes. En outre, et c’est pour nous un point essentiel, un large réseau de couvertures augmente la fiabilité dans la perspective de différents scénarios de crise.
Lorsque les marchés actions étaient performants, vous avez donc vu des rendements moins élevés ?
Exactement, la stratégie Long Volatility, en particulier, est moins utilisée en période de faible volatilité. Pour nos clients, elle joue avant tout le rôle de protection contre les crises. Et nous en avons vraiment beaucoup en ce moment. Pour nous, l’aspect « value » de ces expositions – sélectives et gérées activement – reste toutefois dominant. Nous pouvons typiquement les obtenir dans les 5 à 25% les plus bas des fourchettes historiques à long terme, ce qui recèle en soi un certain potentiel de hausse, même en l’absence de crise majeure.
Les incertitudes macroéconomiques persistent. A quoi doivent s’attendre les investisseurs?
Nous aurons tendance à voir des volatilités encore plus élevées. L’époque où l’inflation était faible est révolue. Les puts accordés par les banques centrales n’existent plus. La transition vers un nouveau « macro-régime » est en cours, même si les taux d’intérêt n’augmenteront plus aussi fortement et qu’ils se sont même arrêtés ici et là. En outre, nous assistons à un renforcement de la réglementation et à une augmentation des coûts sur le marché du travail, ce qui tend à favoriser une hausse continue de la volatilité.
Quel en est l’impact pour Progressive?
Eh bien, nous nous voyons confortés dans notre stratégie d’acteur de niche très ciblé. La demande pour des options de de couverture, notamment dans le domaine de la volatilité, augmente. Ceux qui se diversifient et veillent à des corrélations faibles, idéalement négatives, en particulier dans le domaine des alternatives liquides, devraient être récompensés en ces temps.
Daniel Germann
Progressive Capital Partners
Daniel Germann a rejoint Progressive Capital Partners en 2019. Auparavant, il a travaillé chez Vontobel Asset Management, où il s’est également concentré sur les stratégies Global Macro et Systematic Trading. Il était membre du comité d’investissement alternatif et a travaillé sur des mandats d’investissement alternatifs discrétionnaires et consultatifs. Avant de rejoindre Vontobel, Daniel Germann a travaillé pour Raiffeisen Suisse et sa filiale Notenstein La Roche Privatbank. Daniel Germann est titulaire d’un Master of Arts in Banking and Finance de l’Université de Saint-Gall.
Pour la banque privée zurichoise Maerki Baumann, les relations avec les gérants indépendants prennent de plus en plus d’importance. Pour les GFI qui n’ont pas demandé de licence, Maerki Baumann a rapidement activé son propre réseau pour trouver des solutions et mettre en œuvre des plans de succession.
Comment décririez-vous l’état actuel du secteur des GFI?
Ces dernières années, plus encore que les défis relevés sur les marchés, l’évolution technologique et les changements dans les comportements ou les besoins des clients, ce sont surtout les nouvelles conditions-cadres réglementaires qui ont été déterminantes. Elles ont exigé des efforts et des ressources considérables, et ce sera encore le cas à l’avenir. Elles doivent donc être intégrées dans les modèles et les stratégies d’entreprise afin de pouvoir s’assurer une réussite durable. C’est dans ce domaine que les gérants indépendants, en raison de leur taille raisonnable et de leur grande agilité, bénéficient d’un avantage décisif.
Quel regard portez-vous sur l’évolution du secteur ?
L’octroi de licences par la FINMA, en vigueur depuis début 2023, garantit non seulement une surveillance uniforme, mais constitue également un label de qualité en termes de professionnalisme et de transparence. Les récentes incertitudes rencontrées sur la place financière suisse ont souligné par ailleurs l’importance de l’indépendance et d’une forte fidélisation de la clientèle. Et c’est bien la raison pour laquelle les GFI restent des acteurs significatifs dans la gestion de fortune. Leur indépendance et celle de Maerki Baumann, une entreprise familiale avec un actionnariat personnellement responsable, constituent un bon terrain pour une collaboration voulue dans un esprit partenarial.
Avec l’introduction du nouveau régime réglementaire – LSFIN et LEFin – on a ressenti beaucoup de nervosité dans l’industrie ici en Suisse. Comment l’avez-vous vécu ?
Bien sûr, une certaine tension a été perceptible, car un énorme travail administratif attendait les GFI. Nous travaillons avec des gérants très expérimentés qui n’ont pas eu à « craindre » le processus d’autorisation. Certains de nos partenaires nous ont également mentionnés comme référence sur leur demande FINMA, ce qui nous a bien sûr fait plaisir. Néanmoins, certains de nos gérants ont décidé de ne pas demander de licence. Nous les avons donc aidés à planifier leur succession et, pour cela, avons activé notre réseau. En procédant ainsi, nous n’avons pas perdu de clients finaux grâce au passage ordonné d’une génération à l’autre. Nous en avons aussi profité pour constater que notre caractère entrepreneurial et notre grande flexibilité sont particulièrement appréciés des GFI. Et dans des cas concrets, nous continuerons de leur proposer notre aide pour trouver des solutions en termes de succession.
Une offre modulaire est au cœur de la proposition que vous adressez aux GFI. En quoi consiste-t-elle?
La solution de placement modulaire de Maerki Baumann offre aux GFI la possibilité d’ajouter des éléments attrayants aux portefeuilles qu’elles gèrent, non pas sous la forme d’un fonds, mais de valeurs de base que le client final détient dans son portefeuille. Cela permet aux gérants de se concentrer sur leur allocation d’actifs ainsi que sur leurs propres spécialités en nous laissant gérer d’autres marchés et classes d’actifs au titre de partenaire. Les modules que nous mettons à disposition sur les marchés privés, comme le private equity, le venture capital ou les cryptos, sont aussi particulièrement appréciés. Mais des segments spécifiques, comme les valeurs secondaires suisses, peuvent aussi venir en complément, en lieu et place de fonds qui peuvent être plus onéreux. Au final, nous soutenons les GFI en leur donnant un accès direct à notre expertise en matière de placement.
Yara Lavanga
Maerki Baumann & Co
Yara Lavanga est responsable depuis début 2023 du département EAM de la banque privée Maerki Baumann & Co. Dans cette fonction, elle est chargée, avec son équipe de cinq personnes, de l’encadrement des gérants de fortune indépendants. Avant de rejoindre Maerki Baumann voilà deux ans, elle a travaillé pendant huit ans chez UBS Switzerland et a étudié l’économie d’entreprise en cours d’emploi.
Fanny Eyraud
Jema
« Nous voulions pouvoir travailler sur la diversité des patrimoines contemporains. »
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Le 28 novembre, à Genève, au Mandarin, pour célébrer ses cinquante ans de gestion alternative, NS Partners présente un tour d’horizon complet sur cette classe d’actifs, revenue en grâce ces dernières années. Cédric Dingens livre ici un premier aperçu de cet outlook exceptionnel.
Quelles raisons vous ont-poussé à organiser ce rendez-vous sur la gestion alternative le 28 novembre à Genève ?
Le moment nous a semblé idéal. Nous fêtons cette année nos cinquante ans dans la gestion alternative. Et les turbulences actuelles redonnent tout leur intérêt à ces stratégies. A la fin 1973, lancer l’un des tout premiers fonds de hedge funds était une véritable révolution. Auparavant, si les hedge funds existaient déjà, ils avaient des seuils d’investissement très élevés et ils étaient notoirement difficiles d’accès.
Les fonds de hedge funds ont donc permis à un public plus large d’accéder aux investissements alternatifs et de profiter de leurs atouts en termes de diversification et de protection à la baisse. En posant les bases de la sélection de fonds et de la gestion de portefeuilles multi-manager, nous avons donc été parmi les pionniers d’une toute nouvelle industrie, dont Genève est devenu l’un des centres mondiaux.
Quel le contenu de cet Outlook dans les grandes lignes ?
Nous allons nous livrer à un tour d’horizon complet des perspectives de la gestion alternative pour les douze prochains mois. Nous rappellerons pourquoi le contexte actuel, caractérisé par une volatilité accrue, une hausse des taux et une inflation persistante, est idéal pour la génération d’alpha. Nous rappellerons comment l’industrie s’est réinventée, en particulier à travers l’optimisation de la gestion des risques et nous évoquerons les tendances fortes pour l’année 2024. Enfin, nous nous intéresserons à la Chine et à l’Asie en termes de stratégies alternatives.
Pourquoi est-il devenu si difficile d’investir dans le secteur des hedge funds ?
D’abord, contrairement aux marchés boursiers, il n’existe tout simplement pas d’annuaires des hedge funds, ni de base de données exhaustive. Ils sont donc difficiles à repérer d’autant qu’ils sont domiciliés dans un large éventail de juridictions. Une détection rapide des nouveaux fonds est également très importante car ils clôturent souvent après avoir atteint une certaine taille. Il est donc essentiel de bénéficier d’un excellent réseau dans l’industrie. Une seconde raison tient au fait que ces fonds exigent souvent des investissements minimaux parfois assez lourds. Une troisième raison est la liquidité. Ces fonds imposent une période d’investissement minimale pendant laquelle il n’est pas possible de récupérer son argent. De plus, la liquidité est souvent mensuelle, voire trimestrielle, avec des délais de préavis importants.
Enfin, une dernière raison porte sur la complexité des stratégies utilisées par ces fonds. Pour obtenir des résultats positifs dans un large éventail de conditions de marché, leurs gérants recourent à des stratégies non conventionnelles bien éloignées du « buy & hold » traditionnel. Ils se tournent vers des produits dérivés qu’ils combinent dans des stratégies complexes, utilisent des techniques d’arbitrage, pratiquent la vente à découvert ou investissent dans des marchés exotiques comme les matières premières. Il est donc primordial de disposer des compétences nécessaires pour évaluer le bien-fondé de la stratégie choisie.
NS Partners, c’est donc cinquante ans de gestion alternative. Quels grands enseignements en retenez-vous ?
Contrairement à ce que prétendent ceux qui veulent nous vendre des produits indicés, il existe des gestionnaires de talent vraiment capables de faire la différence. Il suffit pour cela de regarder la performance réalisée par Haussmann Holdings depuis son origine : +36’663%. Et, si les temps changent, il y a toujours une relève de nouveaux gérants talentueux qui ne craignent pas de s’aventurer hors des sentiers battus.
Nous avons aussi constaté que les stratégies alternatives ont été un peu délaissées depuis une dizaine d’années car les marchés boursiers ont pratiquement monté sans discontinuer. On peut faire le parallèle avec les assurances, dont on ne voit pas l’utilisé tant qu’on n’a pas eu d’accident, Aujourd’hui, la situation a changé. Les stratégies plus actives et plus aptes à protéger le capital sont redevenues d’actualité.
Dans les grandes lignes, à quoi devrait ressembler 2024 pour la gestion alternative ?
Avec la hausse des taux d’intérêt, les inquiétudes macroéconomiques et le retour de la volatilité sur les marchés, les stratégies long/short devraient à nouveau pouvoir démontrer leur intérêt. De même, des opportunités et des inefficiences semblent émerger dans les thèmes de la transition énergétique et dans le monde des matières premières.
Les données historiques montrent que les gérants de hedge funds obtiennent leurs meilleurs résultats en période de taux d’intérêt élevés, comme ce fut le cas entre 1990 et 2007. Avec des rendements à 5% pour les emprunts à 10 ans, une inflation qui devrait perdurer et des déficits importants, on se trouve donc dans une situation plutôt favorable aux stratégies alternatives. Elles devraient profiter également des tendances majeures que sont la déglobalisation, la transition énergétique et les élections américaines car leurs performances dépendent aussi de la dispersion sur les marchés actions.
Pour plus d’informations sur l’Outlook du 28 novembre, à l’Hôtel Mandarin Oriental de Genève:
Cédric Dingens
NS Partners
Cédric Dingens dirige le pôle « Investment Solutions & Institutional Clients » de NS Partners. A ce titre, il est membre du comté d’investissement de Haussmann depuis 2016. Cédric a débuté sa carrière à la Banque du Luxembourg en 2001. L’année suivante, il a rejoint Notz Stucki à Luxembourg en tant que gestionnaire de portefeuille. Il a développé le cadre interne de gestion des risques quantitatifs avant d’être nommé responsable de la gestion des risques à Genève en 2010, puis d’être promu à son poste actuel en 2016. Il est titulaire d’un diplôme en finance quantitative de l’École nationale supérieure des mines de Nancy (France) et détient la certification Chartered Alternative Investment Analyst.
Dans le sillage de la SFDR, l’engouement pour les fonds « durables » monte en flèche. Mais derrière le vernis vert, la réalité des investissements n’est pas toujours aussi éthique qu’elle n’y paraît. Maad Osta se penche donc sur la question.
L’introduction de la réglementation SFDR en mars 2021 a initié une ère nouvelle pour la finance durable, visant à distinguer les véritables initiatives écologiques de l’écoblanchiment. Au cœur de cette réglementation, les fonds Article 9, qui, malgré une récente vague de reclassifications en Article 8, gardent une place significative. Avec 301 milliards d’euros, ils représentaient 3.4% du marché européen à fin septembre, selon un récent rapport de Morningstar. Cette situation interpelle et màne à une question inévitable: les fonds Article 9 sont-ils réellement plus durables dans leurs investissements ?
Le dilemme de la définition : quand durabilité rime avec ambiguïté
L’univers des investissements durables, bien que porteur d’espoirs, est encore empreint d’ambiguïtés et de définitions floues. La notion de «sustainable investment», concept central des fonds Article 9, souffre d’une absence de définition uniforme et précise, laissant place à une multitude d’interprétations qui peuvent varier d’un gestionnaire à l’autre.
Cette nébulosité s’étend aux éléments contraignants, ou « binding elements », qui sont censés ancrer les engagements des fonds en matière de durabilité. Ces éléments soi-disant contraignants manquent souvent de transparence et de quantification, s’appuyant sur des méthodologies internes peu rigoureuses et parfois opaques. Cela explique pourquoi il n’est pas rare de trouver des banques, plateformes d’e-commerce, ou entreprises de paiement dans des fonds Article 9.
L’empreinte carbone en question
L’empreinte carbone, souvent érigée en étalon de l’impact climatique, révèle ses limites en tant qu’indicateur unique de durabilité. Sa principale faiblesse réside dans la difficulté à intégrer les émissions indirectes – ou émissions de scope 3 – qui peuvent constituer la majorité des émissions d’une entreprise. Ces émissions indirectes, qui incluent les émissions liées à la chaîne d’approvisionnement et à l’utilisation des produits, sont complexes à mesurer. Elles souffrent par ailleurs d’un manque d’harmonisation dans les méthodologies de calcul, entraînant ainsi une sous-estimation de l’impact climatique réel des entreprises ou alors des double comptages.
En outre, l’empreinte carbone traditionnelle ne prend pas en compte les émissions évitées, un concept pourtant essentiel dans l’évaluation de l’impact environnemental. Les émissions évitées font référence aux réductions d’émissions résultant de l’utilisation de produits ou services plus écologiques par rapport à des alternatives conventionnelles. Une entreprise qui produit par exemple des batteries pour véhicules électriques, malgré une empreinte carbone élevée due à son processus de fabrication intensif en énergie, joue un rôle crucial dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Elle facilite de toute évidence la transition vers des modes de transport plus propres. En revanche, une entreprise spécialisée dans les paiements en ligne, bien que présentant une empreinte carbone relativement faible en raison de ses opérations numériques, peut contribuer indirectement à des pratiques non durables. C’est le cas notamment de la surconsommation et de l’augmentation des transactions électroniques qui encouragent potentiellement une consommation excessive et un consumérisme rapide.
Cette problématique est illustrée par une analyse récente de Goldman Sachs. Elle révèle que les fonds Article 9 sous-pondèrent – de -75% en moyenne – le secteur de la technologie matérielle « Technology Hardware » pourtant essentiel à la fabrication de technologies propres. En parallèle, ces fonds surpondèrent des secteurs moins directement liés à la durabilité, tels que des fonds immobiliers hypothécaires « Mortgage REITs » (+880%) et les produits de loisirs « Leisure Products » (+480%).
Un horizon d’actions, pas d’illusions
L’avenir de la finance durable ne se jouera pas dans les salles de conférence ni dans les déclarations d’intention, mais dans l’arène de l’action concrète et mesurable. Afin d’éviter que les fonds durables ne soient réduits à de simples artifices marketing, une définition rigoureuse et universellement reconnue des « investissements durables » doit être établie, accompagnée d’«éléments contraignants» quantifiables et véritablement significatifs.
Il est essentiel de dépasser les visions réductrices centrées sur l’empreinte carbone pour adopter une approche holistique qui prend en compte l’impact final des produits et services dans le cadre d’une décarbonisation globale. Seule une telle évolution garantira à la finance durable de ne pas être un simple label, mais un véritable moteur de changement en faveur d’un avenir plus vert.
Maad Osta
AtonRâ
Maad Osta a rejoint AtonRâ Partners en 2018 en tant que spécialiste Eergie. Il s’occupe principalement de la recherche fondamentale sous-jacente à l’univers d’investissement de la stratégie « Sustainable Future ». Auparavant, Maad a travaillé en tant qu’ingénieur projet puis gestionnaire de projet au sein d’une société active dans le secteur du gaz et de l’énergie. Maad est titulaire d’un Master en gestion de l’énergie et développement durable obtenu à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne.
En trente ans, EQT, dont les encours dépassent les 200 milliards d’euros, s’est imposé parmi les acteurs de référence qui animent les marchés privés. Dans ses plans de développement figurent des stratégies B2B2C comme Nexus destinées à ouvrir la classe d’actifs au segment HNWI et la montée en puissance sur le marché Suisse.
Quelles tendances animent le marché privé en ce moment ?
Si l’on se place du point de vue du du GP – les objectifs restent les mêmes : identifier de bonnes entreprises qui se négocient à des valorisations très attrayantes. Récemment, les gérants ont étendu leurs recherches aux sociétés cotées en bourse. En raison des difficultés rencontrées sur les marchés, il devient de plus en plus intéressant de délister certaines entreprises et de créer de la valeur après les avoir ramenées dans le privé.
Les gérants ont également tendance en ce moment à porter leur attention sur les secteurs qui restent performants dans des conditions de marché contraignantes. Avec EQT, nous nous concentrons sur le healthcare, traditionnellement non cyclique, où il il y a toujours de belles opportunités à exploiter pour stimuler la performance dans notre portefeuille.
Si vous vous placez maintenant du point de vue de l’investisseur – du LP – l’environnement a clairement changé. Il y a trois ans, les exits étaient très faciles. Aujourd’hui ce n’est plus le cas. Dans des marchés devenus chahutés, comme ceux des 6 à 12 derniers mois, les investisseurs veulent se concentrer beaucoup plus sur la performance et s’assurer que les GP sont en mesure de la générer.
Comment expliquez-vous la croissance impressionnante des marchés privés au cours de la dernière décennie ?
Pendant ces dix dernières années, beaucoup de clients se sont rendus compte qu’ils n’étaient pas suffisamment alloués en marchés privés dans leur portefeuille. Beaucoup ont alors entrepris de remonter leur allocation aux alentours des 20%. Ce travail leur a été facilité par un environnement macro-économique très favorable. C’est la combinaison de ces deux facteurs qui, selon moi, a permis aux marchés privés de croître autant.
Depuis 18 mois, la situation a quand même changé. Les marchés privés restent toujours attractifs mais les investisseurs se montrent beaucoup plus sélectifs.
On parle beaucoup en ce moment de la démocratisation des marchés privés. Où pensez-vous que nous en soyons aujourd’hui dans ce processus ?
Nous n’en sommes vraiment qu’au tout début. C’est le premier jeu du premier set. Il reste beaucoup de chemin à parcourir avant d’arriver à une véritable démocratisation. A ce jour, très peu de GPS ont mis sur le marché des produits réellement destinés aux particuliers. Ces dix dernières années, des plateformes de distribution ont rendu différents produits plus accessibles mais, au final, ils étaient surtout réservés aux Ultra High Net Worth et au segment supérieur des High Net Worth. Or, le segment inférieur des High Net Worth besoin de solutions un peu plus liquides. Et c’est essentiellement l’idée derrière des stratégies comme Nexus.
Vous venez en effet de lancer EQT Nexus au printemps dernier pour jouer un rôle clé dans ce mouvement. Quelle en est plus exactement la stratégie?
Nous entretenons d’excellentes relations avec les gestionnaires de fortune. Avec le temps, beaucoup nous ont exprimé leur souhait de disposer de solutions private markets plus liquides de manière à en faire profiter un plus grand nombre de leurs clients. C’est ce qui a initié le lancement de EQT Nexus. Nous voulions répondre à cette demande. Pour ce qui est de la stratégie à proprement parler, nous allons mettre l’accent sur l’éducation et la formation, autant auprès des clients que des gérants dans la mesure où ce sont eux qui assureront les relais.
Il s’agit donc d’une stratégie B2B2C…
Oui, il très important pour nous que le produit soit consommé de la bonne façon. Les clients doivent bien en comprendre le mode d’emploi, les barrières, les contraintes et c’est là que leur gestionnaire est appelé à jouer un rôle clé.
Comment EQT se positionne en Suisse ?
Initiée par la famille Wallenberg, EQT a été créée en 1994, à Stockholm. Depuis, l’entreprise s’est énormément développée. Nous avons des bureaux dans toute l’Europe, nous sommes présents dans 24 pays à travers le monde, nous gérons plus de 200 milliards d’euros que nous avons investis dans plus de 200 entreprises. Dans ce contexte, la Suisse est un marché essentiel pour nous. Christian Sinding , notre CEO, est d’ailleurs basé à Zurich, de même que Lennart Blecher, qui dirige chez nous le pôle Real Assets, et William Vettorato, le responsable du fonds Nexus. Leur présence ici à Zurich laisse clairement entendre que nous allons beaucoup nous investir en Suisse ces prochaines années.
Peter Beske Nielsen
EQT
Peter Beske Nielsen a rejoint EQT Partners à Copenhague en janvier 2021 en tant qu’associé. Il travaille au sein de l’équipe chargée des relations avec les clients et de la levée des capitaux. Il dirige également les initiatives d’EQT en matière de gestion privée.
Avant de rejoindre EQT Partners, Peter a occupé le poste de managing director chez BlackRock de 2006 à 2021, où il a rempli plusieurs fonctions. Il a eu entre autres la responsabilité EMEA du programme de partenariat stratégique et celle, à l’échelle mondiale, de la distribution des produits alternatifs. Au cours des 15 années passées chez BlackRock, il s’est partagé entre New York, Londres et Copenhague.