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  • Interview Achille Deodato
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« Les GFI doivent surveiller de près leurs activités transfrontalières »

L’environnement réglementaire dans lequel évoluent les GFI s’est considérablement transformé, avec pour effet une extension de leurs obligations prudentielles. Du point de vue d’Achille Deodato, ces développements ont le mérite d’atténuer la distinction qui séparaient auparavant les gérants indépendants des établissements bancaires traditionnels.

En Suisse, les GFI ont bouclé leur première année sous le nouveau régime LEFin/LSFin. Quel bilan en tirez-vous ?

L’impact sur les gérants indépendants est de plus en plus évident. La nouvelle réglementation impose en effet des exigences strictes aux GFI en ce qui concerne la gestion des risques transfrontaliers. Ils doivent tout d’abord démontrer qu’ils connaissent parfaitement les réglementations transfrontalières sur les marchés étrangers qu’ils ciblent ou sur lesquels ils sont présents. Il leur faut donc suivre l’évolution de la législation et veiller à son respect. En outre, les GFI sont tenus de mettre en place une politique transfrontalière globale. A elle de définir les grands principes régissant les activités transfrontalières et couvrant, entre autres, des questions telles que les marchés cibles, les autorisations de voyage et les procédures de dérogation à la politique. Un autre aspect important des attentes de la FINMA est la formation régulière des collaborateurs afin de s’assurer qu’ils sont bien informés et qu’ils respectent le cadre réglementaire.

La réglementation ne s’arrête pas là. De nouvelles règles sur la protection des données s’y ajoutent désormais. Qu’est-ce que cela signifie concrètement ?

Ces prochains mois, l’introduction de la loi fédérale sur la protection des données va constituer un nouveau chantier prioritaire pour les GFI. Ils devront examiner et, le cas échéant, adapter leurs procédures de protection des données personnelles afin de les rendre conformes aux nouvelles exigences légales. Les clients devront également être informés de ces mesures afin que soient garanties la transparence et le respect de la législation sur la protection des données. Les GFI sont désormais confrontés à un paysage réglementaire qui exige une adaptation continue et une conscience aiguë de l’évolution des normes réglementaires. C’est un travail nécessaire pour s’assurer que les opérations restent efficaces et qu’elles sont bien conformes à la loi.

Vous observez également les réglementations dans d’autres pays. Quels changements au niveau européen peuvent être être pertinents pour les gestionnaires de fortune suisses ?

Un développement remarquable dans ce contexte est l’initiative lancée par l’Autorité européenne des marchés financiers, l’ESMA, en collaboration avec les autorités de surveillance nationales. L’ESMA a lancé une enquête sur la communication marketing via différents médias, y compris les médias sociaux, en se concentrant spécifiquement sur la façont dont sont approchés les clients privés européens. L’enquête s’articule autour de deux axes. Premièrement, une étude des stratégies de ciblage et, deuxièmement, une évaluation de la qualité de la communication marketing, y compris le matériel publicitaire.

L’objectif global est de s’assurer que les informations diffusées publiquement sont appropriées, claires et exemptes de contenu trompeur, en mettant l’accent sur la prévention des pratiques d’écoblanchiment. On s’attend à ce que cette étude renforce la position réglementaire des autorités européennes en matière de communication marketing. Par conséquent, les gestionnaires suisses qui s’adressent à des clients européens vont aussi devoir adapter leurs pratiques aux principes établis par ces autorités.

Nouvelles réglementations, nouveaux risques transfrontaliers. Quel en est l’impact sur les plateformes d’Indigita ?

Indigita est sur une trajectoire de croissance solide, avec une augmentation annuelle de 20% de son chiffre d’affaires, de sa rentabilité et de ses effectifs à temps plein. Pour l’année à venir, nous prévoyons de nous implanter sur de nouveaux marchés géographiques, en privilégiant l’Italie, la France et le Royaume-Uni. En 2023, nous avons introduit une nouvelle solution pour les GFI, baptisée inApp Tax. Elle a été conçue pour apporter des solutions dans le domaine complexe de la conformité fiscale. Cet outil, développé en collaboration avec BRP Tax, donne à ses utilisateurs la possibilité de comparer la performance de leur portefeuille d’un point de vue fiscal dans différents pays. Il couvre toutes les classes d’actifs et fonctionne comme une solution autonome, de sorte qu’aucune intégration informatique complexe n’est nécessaire. Nous l’avons voulu accessible et convivial.

 

Achille Deodato

Indigita

Achille Deodato compte plus de 20 ans d’expérience dans le secteur bancaire et le conseil. Il a occupé différents postes de direction dans les domaines du développement commercial, du marketing, de la gouvernance, de l’audit, des projets spéciaux, de la gestion des risques et du compliance. Depuis 2019, Achille Deodato est le CEO d’Indigita, une regtech spécialisée dans le cross-border compliance. L’entreprise, fondée en 2016, est une filiale de BRP Bizzozero & Partners. Auparavant, Achille Deodato a officié en tant que CEO de Procivis et CCO de la banque indienne Hinduja Bank Switzerland. Il est titulaire d’un MBA de l’IMD Business School et d’un diplôme d’économie de l’université LUISS de Rome.

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The Swiss Financial Arena

Depuis sa création en 2016, SPHERE anime la communauté des pairs de la finance suisse. Elle leur propose en français et en allemand différents espaces d’échange avec un magazine, des hors-série réservés aux Institutionnels, un site web et des évènements organisés tout au long de l’année pour aborder de nombreuses thématiques. Toutes les parties prenantes de la finance, l’un des plus importants secteurs économiques de Suisse, ont ainsi à leur disposition une plateforme où il leur est possible d’échanger, de s’informer et de progresser.

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  • Interview Yara Lavanga
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« Nous avons aidé plusieurs de nos GFI à organiser leur succession »

Pour la banque privée zurichoise Maerki Baumann, les relations avec les gérants indépendants prennent de plus en plus d’importance. Pour les GFI qui n’ont pas demandé de licence, Maerki Baumann a rapidement activé son propre réseau pour trouver des solutions et mettre en œuvre des plans de succession.

Comment décririez-vous l’état actuel du secteur des GFI?

Ces dernières années, plus encore que les défis relevés sur les marchés, l’évolution technologique et les changements dans les comportements ou les besoins des clients, ce sont surtout les nouvelles conditions-cadres réglementaires qui ont été déterminantes. Elles ont exigé des efforts et des ressources considérables, et ce sera encore le cas à l’avenir. Elles doivent donc être intégrées dans les modèles et les stratégies d’entreprise afin de pouvoir s’assurer une réussite durable. C’est dans ce domaine que les gérants indépendants, en raison de leur taille raisonnable et de leur grande agilité, bénéficient d’un avantage décisif.

Quel regard portez-vous sur l’évolution du secteur ?

L’octroi de licences par la FINMA, en vigueur depuis début 2023, garantit non seulement une surveillance uniforme, mais constitue également un label de qualité en termes de professionnalisme et de transparence. Les récentes incertitudes rencontrées sur la place financière suisse ont souligné par ailleurs l’importance de l’indépendance et d’une forte fidélisation de la clientèle. Et c’est bien la raison pour laquelle les GFI restent des acteurs significatifs dans la gestion de fortune. Leur indépendance et celle de Maerki Baumann, une entreprise familiale avec un actionnariat personnellement responsable, constituent un bon terrain pour une collaboration voulue dans un esprit partenarial.

Avec l’introduction du nouveau régime réglementaire – LSFIN et LEFin – on a ressenti beaucoup de nervosité dans l’industrie ici en Suisse. Comment l’avez-vous vécu ?

Bien sûr, une certaine tension a été perceptible, car un énorme travail administratif attendait les GFI. Nous travaillons avec des gérants très expérimentés qui n’ont pas eu à « craindre » le processus d’autorisation. Certains de nos partenaires nous ont également mentionnés comme référence sur leur demande FINMA, ce qui nous a bien sûr fait plaisir. Néanmoins, certains de nos gérants ont décidé de ne pas demander de licence. Nous les avons donc aidés à planifier leur succession et, pour cela, avons activé notre réseau.  En procédant ainsi, nous n’avons pas perdu de clients finaux grâce au passage ordonné d’une génération à l’autre. Nous en avons aussi profité pour constater que notre caractère entrepreneurial et notre grande flexibilité sont particulièrement appréciés des GFI. Et dans des cas concrets, nous continuerons de leur proposer notre aide pour trouver des solutions en termes de succession.

Une offre modulaire est au cœur de la proposition que vous adressez aux GFI. En quoi consiste-t-elle?

La solution de placement modulaire de Maerki Baumann offre aux GFI la possibilité d’ajouter des éléments attrayants aux portefeuilles qu’elles gèrent, non pas sous la forme d’un fonds, mais de valeurs de base que le client final détient dans son portefeuille. Cela permet aux gérants de se concentrer sur leur allocation d’actifs ainsi que sur leurs propres spécialités en nous laissant gérer d’autres marchés et classes d’actifs au titre de partenaire. Les modules que nous mettons à disposition sur les marchés privés, comme le private equity, le venture capital ou les cryptos, sont aussi particulièrement appréciés. Mais des segments spécifiques, comme les valeurs secondaires suisses, peuvent aussi venir en complément, en lieu et place de fonds qui peuvent être plus onéreux. Au final, nous soutenons les GFI en leur donnant un accès direct à notre expertise en matière de placement.

 

Yara Lavanga

Maerki Baumann & Co

Yara Lavanga est responsable depuis début 2023 du département EAM de la banque privée Maerki Baumann & Co. Dans cette fonction, elle est chargée, avec son équipe de cinq personnes, de l’encadrement des gérants de fortune indépendants. Avant de rejoindre Maerki Baumann voilà deux ans, elle a travaillé pendant huit ans chez UBS Switzerland et a étudié l’économie d’entreprise en cours d’emploi.

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  • Solutions GFI
  • Florian Schefer
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  • Finstoy

« Les robo-advisors deviennent des outils de soutien importants »

Cet automne, le gérant lausannois Finstoy s’est amarré au groupe Pleion, qui compte désormais sept bureaux en Suisse. Finstoy a cette particularité d’être l’un des rares GFI en Suisse à exploiter le robo-advisor de Swissquote. Florian Schefer en explique ici le comment et le pourquoi.

Où en sommes-nous avec ces robo-advisors qui étaient censés bouleverser le monde de la gestion de fortune voilà quelques années ?

Pour rappel, un robo-advisor est un système de gestion de fortune automatisé qui fonctionne sur la base d’algorithmes avec une stratégie donnée. Ce n’est pas une baguette magique. Les robo-advisors investissent dans les marchés comme tous les autres investisseurs et ils en subissent les mêmes imprévus. En revanche, ils suivent à la lettre la stratégie définie, analysent des données en un temps record, transmettent des ordres tout aussi rapidement, et gèrent le risque inhérent à la stratégie choisie de façon optimale.

Les robo-advisors deviennent ainsi des outils de soutien importants pour les gérants. Je suis toutefois convaincu que la relation humaine restera toujours l’élément central de la gestion de fortune. Les clients aiment toujours s’entretenir avec des vraies personnes, surtout dans les périodes d’incertitude.

L’usage de plus en plus répandu de IA ouvre-t-il de nouvelles perspectives pour ces robo-advisors ?

Oui c’est évident ! L’IA – et plus précisément le « machine learning » – va rendre les robo-advisors plus performants.  Ils pourront garder en mémoire les décisions d’investissements qui n’ont pas été bénéfiques à un temps « T » dans des conditions de marchés bien déterminées, afin de ne pas les répéter à l’avenir. C’est une optimisation par l’expérience. Dans nos discussions avec Swissquote sur l’évolution du robo-advisor, le développement est principalement axé sur l’IA.

Quel est le potentiel des robo-advisors en tant qu’assistants de gestion pour les GFI ?

Ils permettent déjà aujourd’hui d’établir des sélections d’investissement extrêmement rapides, de gérer les risques du portefeuille, de fournir des rapports et des données très précises. Ils soulagent ainsi le travail des gérants, qui peuvent dès lors consacrer davantage de temps à la relation avec leurs clients et prospects. Je suis néanmoins convaincu qu’ils resteront des outils et ne reprendront pas le rôle du gérant, car ils ne pourront jamais comprendre les sentiments et la psychologie des clients.

Dans quels domaines les robo-advisors montrent-ils le plus de potentiel ?

Les robo-advisors fonctionnant avec des algorithmes et les algorithmes ayant besoin de données pour fonctionner, c’est sur le marché des actions qu’ils sont les plus pertinents. Grâce aux bourses, il est possible d’accéder à une quantité importante de données historiques sur les marchés des actions. Ceci est nettement plus difficile avec les obligations, qui se traitent souvent en OTC. Plus vous avez de données, plus votre algorithme fonctionne avec précision.

De quelle manière les intégrer dans une offre de gestion ?

Chez Finstoy, nous avons deux manières d’utiliser le robo-advisor de Swissquote pour la gestion de clients privés. Dans le premier cas de figure, nous l’exploitons pour la gestion de l’intégralité du portefeuille client. Dans le second cas de figure, nous concentrons l’intervention du robo-advisor sur un certain segment de l’allocation, principalement les actions. Nous le consolidons ensuite avec le reste du portefeuille. Ces deux possibilités seront dorénavant également offertes aux clients de Pleion qui le désirent.

Florian Schefer

Finstoy

Florian Schefer est le fondateur et le directeur général de Finstoy depuis novembre 2010. Il est aussi membre du conseil d’administration de plusieurs sociétés en Suisse. De 1998 à 2010 il a travaillé pour Credit Suisse principalement à Genève au Private Banking en tant que gestionnaire de fortune dans différents marchés.

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  • Solutions GFI
  • Cédric Roland-Gosselin
  • Co-fondateur
  • Arode

« Savoir faire travailler ensemble des profils très différents »

Cédric Roland-Gosselin a quitté le costume de banquier, qu’il portait chez Degroof Petercam, pour endosser celui de gérant indépendant. Avec ses associés, Carine Arieh et Jasper de Raadt, il a choisi cette voie pour mieux répondre aux attentes de ses clients.

Que regrettez-vous de vos années de banquier ?

Je ne suis pas nostalgique de caractère. « C’était mieux avant » n’est pas le genre d’appréciation qui me correspond. Je dirais juste qu’il fut un temps où les choses étaient différentes, moins normées, moins pointues. Aujourd’hui, les éléments – régulatoires, concurrentiels, technologiques – nous obligent à répondre de manière plus agile à des demandes toujours plus exigeantes.

Si vous ne vous y adaptez, vous allez regarder passer le train. Mais ce n’est pas nécessairement propre à notre métier. Les clients s’engagent dans des interactions plus rapides, ils sont mieux informés et ils comparent davantage. Ils attendent de nous des échanges plus conséquents, des performances plus élevées et de la transparence. Nous sommes-là pour répondre à leurs attentes tout en maintenant le fond au-delà de la forme. Il faut que nous conservions l’humain et la confiance sur la durée. C’est l’essence même de notre métier.

Quelles étaient vos priorités au lancement d’Arode ?

Nous voulions mettre en place une organisation conforme aux besoins exprimés par certains de nos clients. Eux comme nous ont pu profiter de l’équipe formée au lancement d’Arode. Carine Arieh, Jasper de Raadt et moi-même avons travaillé ensemble chez Degroof Petercam en Suisse. Nous nous connaissons très bien et nos complémentarités sont pour Arode une vraie force. J’ai deux passions sportives : la voile et le rugby. Ce sont deux sports où réunir des athlètes de bon niveau est moins important que de faire travailler ensemble des profils très différents, des avants et des trois-quarts ou des skippers et des winchers.

Il y a aussi le temps, la durée, le long terme sur lesquels nous voulons nous inscrire pour grandir harmonieusement. Le mot harmonie inclut pour moi les notions de cohérence, de confiance et d’esprit d’équipe. Je vous donne un exemple. Nous avons regardé plusieurs dossiers pour d’éventuelles acquisitions ou associations parce que le marché se consolide, mais nous n’avons pas donné suite, car nous n’avons pas vocation à devenir une plateforme de gérants.

Arode est formée aujourd’hui par une équipe qui se connait bien et qui sait travailler ensemble. Nous avons une gestion cohérente et une ligne directrice claire.

Du temps de Degroof Petercam, quel regard portiez-vous sur le métier de GFI ?

Je ne voyais pas forcément leur utilité en raison de la manière dont nous servions déjà nos clients à l’époque. Je ne pensais pas que ce métier allait durer. C’est d’ailleurs ce qui était annoncé depuis dix ans, avec la consolidation ou la disparition des indépendants.

En quoi ce regard a-t-il changé aujourd’hui ?

Nous avons vu les choses évoluer du côté des gérants comme du côté des banques. Les GFI sont désormais régulés par la FINMA et l’offre bancaire a changé. Ces deux développements se sont produits en même temps et ils ont modifié l’offre pour les clients.

Pour des raisons que je comprends, même si je le regrette, les banques se concentrent davantage sur leurs Produits que sur leurs services. Elles ont la pression du résultat trimestre après trimestre, de la simplification à outrance et du soin attentif à éviter toute dérogation au cadre général.

Ces transformations ont eu lieu aussi en France et en Belgique, deux marchés où les gérants indépendants se sont fait leur place.

Finalement, notre rôle est de donner du sens à la relation entre le client et son patrimoine, de les guider dans sa gestion, de l’orienter dans les relais de génération, de le conseiller dans la cession de leur entreprise. Ce sont des tâches que les banquiers assumaient par le passé. C’est moins facile pour eux aujourd’hui dans la mesure où leur activité est devenue plus compartimentée et limitée.

En revanche, en tant que gérant, nous pouvons trouver des solutions parce que nous fonctionnons en architecture ouverte avec un plus grand nombre de prestataires.

Où avez-vous porté plus particulièrement votre attention lorsque vous avez lancé Arode ?

Le lancement d’Arode en 2020, au moment du covid, qui plus est après 25 ans de parcours dans de groupes internationaux, était tout sauf simple. Mais les évènements nous sont parfois imposés et nous avons su gérer. Nous avons pu mettre en place une organisation solide pour nos clients, avec des partenaires fiables et réactifs, « aussi vite que possible et aussi lentement que nécessaire », comme l’a dit un jour Alain Berset !

Cédric Roland-Gosselin

Arode

Cédric Roland-Gosselin a été le CEO de Banque Degroof Petercam Suisse de 2011 à 2020, ainsi que membre du conseil d’administration de Banque Degroof Petercam France et Banque Degroof Petercam Espagne. Il a acquis une expertise bancaire complète au sein du groupe ING en France, Belgique et Luxembourg de 1998 à 2010. Il détient le diplôme d’ingénieur commercial de l’Université Catholique de Louvain.

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  • Solutions GFI
  • Ralph Frey
  • CEO
  • AOOS

« Processus d’autorisations FINMA : le bilan positif de l’AOOS»

Le nouveau processus de réglementation des gérants de fortune indépendants et des trustees est encore en cours. Il est néanmoins déjà possible d’en tirer quelques observations intermédiaires. Pour Ralph Frey, à la tête de l’AOOS, ce processus a été intense, passionnant et fructueux pour les organismes de surveillance. 

La FINMA s’est récemment exprimée sur l’état du processus d’autorisation des gestionnaires de fortune et des trustees, y compris en ce qui concerne la surveillance. Comment avez-vous vécu cette « première année » du nouveau régime, du point de vue de l’organisme de surveillance ? 

Cela fait maintenant trois ans que l’AOOS est active en tant qu’organisme de surveillance pour les gestionnaires de fortune et les trustees, selon les critères de la FINMA, et en tant qu’organisme d’autorégulation selon la LBA. Ces années ont été intenses, passionnantes et fructueuses. En raison du très grand nombre d’examens d’autorisation préalables, les derniers mois ont été particulièrement exigeants pour l’AOOS. Ils l’ont été d’autant plus que la fin de la période transitoire de la FINMA approchait rapidement et que nous avons été incités à examiner chaque demande en profondeur, de manière professionnelle. Nous avons ainsi pu présenter de manière exhaustive à nos clients, très rapidement, les adaptations qu’ils avaient à effectuer, ce qui a facilité ensuite les discussions et permis aux gérants et aux trustees de soumettre leur demande à la FINMA dans les délais impartis. 

Qu’est-ce qui vous a le plus surpris dans ce processus, ces derniers mois ? 

Après de nombreuses années passées à surveiller des gestionnaires de fortune et des trustees, j’ai déjà vu pas mal de choses. Mais certains établissements financiers, même s’ils sont heureusement très peu nombreux, m’ont surpris par la manière dont ils ont abordé la nouvelle législation. Certains n’avaient pas encore préparé leur demande d’autorisation FINMA en décembre 2022, alors même que la longue période de transition de trois ans arrivait à son terme. Ce qui a d’ailleurs parfois entraîné des dépassements de délai.

La consolidation du secteur, dont il a souvent été question avant la mise en œuvre de la nouvelle réglementation, n’a pas été aussi violente que beaucoup le craignaient. Quels ont été les critères déterminants, selon vous ? 

Les gestionnaires de fortune et les trustees ont été, sont et continueront d’être très performants. L’autorisation de la FINMA est un label de qualité qui leur permet d’agir de manière professionnelle sur les marchés nationaux et internationaux. Cela dit, en raison de leur âge, certains gérants de fortune ont décidé fin 2022 de ne plus déposer de demande d’autorisation et de cesser leur activité. C’était prévisible. Outre ces cas, qui restent assez exceptionnels, je continue à ne pas m’attendre à une consolidation importante du secteur à cause de la nouvelle réglementation. Pour preuve, cette année, une cinquantaine de nouvelles entreprises ont déjà déposé une demande d’autorisation auprès de la FINMA en tant que gestionnaire de fortune ou trustee.

Selon les statistiques de la FINMA, c’est l’AOOS qui a « fait passer » le plus grand nombre d’établissements autorisés. Comment expliquez-vous ce très bon résultat? 

Avec l’intégration de l’ancien OAR de l’ASG dans l’AOOS, nous avons pu compter dès le début sur les nombreux gestionnaires de fortune et trustees qui y étaient déjà affiliés. Nous avons pu aussi compter sur des collaborateurs de longue date de l’OAR, ce qui nous a permis de renforcer nos compétences. Notre équipe de collaborateurs, très expérimentés, a pu traiter en temps utile les nombreuses demandes, dont certaines ne sont arrivées que vers la fin de la période transitoire LEFin. En outre, le guide de l’AOOS a été publié très tôt, avec les exigences liées à une demande d’autorisation de la FINMA, ce qui s’est certainement avéré utile. Finalement, nous avons transmis de manière proactive à la FINMA les demandes d’autorisation qui pouvaient potentiellement poser problème. La raison en était des questions ouvertes dans des domaines spécifiques pour lesquelles il n’existait pas encore de jurisprudence de la FINMA ou qui nécessitaient une décision formelle de la FINMA. Ces demandes étaient accompagnées de notre évaluation, ce qui a été très apprécié par toutes les parties car le processus d’autorisation s’en est trouvé accéléré d’autant.

Pour les gestionnaires de fortune et les trustees, la surveillance au jour le jour du respect des conditions d’autorisation n’est pas assurée directement par la FINMA, mais par l’OS. Quelles sont vos attentes en la matière ?

La surveillance prudentielle continue par l’organisme de surveillance commence dès l’obtention de l’autorisation de la FINMA. Comme par le passé, l’AOOS travaille en principe avec des sociétés d’audit externes et des auditeurs responsables, qui sont préalablement agréés par l’AOOS. La société d’audit choisie par le gestionnaire de fortune ou le trustee devra, au cours des deux premières années, procéder à un audit annuel dans les domaines de la LSFin, de la LEFin et de la LBA, ainsi que des éventuelles activités annexes. Il lui faudra également présenter un rapport à l’organisme de surveillance. L’OS se charge alors de la vérification et peut, si nécessaire, recourir à tout moment à d’autres instruments, comme par exemple un audit complémentaire ou un entretien de surveillance. En outre, pour chaque gestionnaire de fortune et chaque trustee un élément central de la surveillance prudentielle par l’organisme de surveillance sera le rating des risques. Le gérant pourra alors obtenir éventuellement un cycle de contrôle étalé sur plusieurs années et ne devoir fournir qu’une auto-déclaration à l’organisation de surveillance pendant les années sans contrôle. 

Actuellement, la FINMA a autorisé cinq organismes de surveillance et doit maintenant veiller à l’uniformité de la pratique en matière d’autorisation et de surveillance. Cependant, nous sommes toujours dans la phase de démarrage et de mise en place, raison pour laquelle la surveillance au jour le jour des gérants de fortune et des trustees va continuer à évoluer. 

La séparation des fonctions, pour renforcer le contrôle des risques et de la compliance à partir d’une certaine taille, est un sujet qui prête à discussion chez de nombreux gestionnaires de fortune. Quand l’externalisation de ces fonctions vous semble-t-elle judicieuse ? 

Les gestionnaires de fortune et les trustees sont soumis à l’obligation de définir les grandes orientations de la gestion des risques et de définir en parallèle la tolérance au risque. La gestion des risques doit leur servir à mesurer, gérer et surveiller les risques liés à l’activité commerciale. Dans la mesure où il est nécessaire de séparer la gestion des risques et le contrôle interne des unités opérationnelles, il est possible de les externaliser auprès de tiers, en particulier pour les petits gérants de fortune et les trustees. La plupart n’atteignent souvent pas la taille critique pour disposer de leur propre gestion des risques ou de leur propre fonction de compliance. La responsabilité de la direction pour une gestion des risques appropriée et un contrôle interne efficace ne peut toutefois pas être externalisée. En outre, le gestionnaire de fortune ou le trustee doit également disposer des ressources en personnel, du savoir-faire technique, des connaissances requises et de processus adéquats pour superviser les fonctions externalisées. Cela dit, un apport externe dans le domaine de la gestion des risques et du contrôle interne représente certainement plus une opportunité qu’une contrainte pour les gestionnaires de fortune et les trustees.

Ralph Frey

AOOS

Ralph Frey est directeur général de l’AOOS, l’organisme de surveillance pour les gestionnaires de fortune et les trustees. Il a été auparavant directeur du bureau principal de l’ASG à Zurich, et membre de sa direction. Avant de passer à la surveillance, il a travaillé comme responsable de la conformité et du contrôle des risques dans une maison de titres suisse puis au service juridique d’une banque privée zurichoise. Ralph Frey a étudié le droit à l’Université de Zurich et a obtenu un MAS en gestion bancaire à la Haute école de Lucerne.

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